Numărul 4 / 2014

STUDII

 

 

L’IMPACTE DE LA JURISPRUDENCE DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE DE LA ROUMANIE SUR LE DROIT PRIVÉ[1]

- Sélection de certaines décisions pertinentes –

 

Mircea Ştefan MINEA*

dr. Anca Mihaela GEOROCEANU**

 

 

Abstract. Adoption of the new codes – the civil code, the code of civil procedure, the criminal code and the code of criminal procedure –, as well as of other legislative acts with significant impact on Romanian society, was indubitably a positive event. All the aforementioned regulatory acts contain legal rules that reflect the current (new) concept of the Romanian legislature, a concept that crystallised after observing and analysing the developments taking place also in other countries’ legislation.

However, the application of the new legal rules to the social relations that characterise the Romanian society (in other words, the application thereof to real life) reveals that some of the new legal provisions do not sufficiently meet the requirements imposed by the constitutional rules and principles. This is the reason why the Constitutional Court has been often asked (provoked) to rule on the constitutionality of some of the legal provisions contained in the new regulations.

The present paper intends to highlight– through a summary of relevant decisions – the impact of the case-law of the Constitutional Court of Romania on private law (more specifically, on civil law and on civil procedural law).

 

Keywords: civil law, civil procedural law, insolvency, court of law, lawyer, bailiff, public ministry, case-law, Constitutional Court

 

 

 

            1. En Roumanie, dans la première moitié de la deuxième décennie du XXI siècle, de   nouveaux codes ont été adoptés, qui – en remplaçant les anciennes réglementations – sont entrés en vigueur comme suit : le Code civil – le 1 octobre 2011[2], le Code de procédure civil – le 15 février 2013[3], le Code pénal – le 1 février 2014[4] et le Code de procédure pénale – le 1 février 2014[5]. Avec ces codes – dans la dernière période de temps – un nouveau Code de l’insolvabilité[6] a été adopté – en vigueur à partir du 28 juin 2014, ainsi qu’une série d’autres actes normatifs couvrant les plus divers domaines[7].

Tous les actes normatifs mentionnés contiennent des réglementations réfléchissant la conception actuelle (nouvelle) du législateur roumain, conception cristallisée suite à l’observation et à l’analyse de l’évolution de la législation d’autres pays aussi. Il résulte de la comparaison des nouvelles règles juridiques avec les relations sociales qui se déroulent dans la société roumaine (autrement dit, leur application dans la vie réelle) le fait que certaines des nouvelles dispositions légales ne répondent pas suffisamment aux exigences imposées par les principes et les règles constitutionnelles. Pour cette raison, la Cour Constitutionnelle a été et est souvent saisie (appelée) à décider de la constitutionnalité de certaines des dispositions légales que les nouvelles réglementations contiennent.

2. Selon une statistique récemment présentée[8], en Roumanie, ces dernières années, environ 3.300.000 dossiers sont pendants devant les juridictions chaque année, dont environ 1/3 sont résolus dans la Cour d’Appel Bucarest et, respectivement, 2/3 dans les autres 14 cours d’appel. Environ 50% de ces dossiers ont comme objet des litiges civiles, 15% litiges de contentieux administratif/fiscal et assurances sociales, 10% sont litiges entre professionnels, 9% sont procès pénaux et le reste de dossiers concernent d’autres domaines. Enfin, environ 25% du nombre des dossiers pendants devant les juridictions ont comme objet des exécutions forcées. Compte tenu de ce qui précède, ainsi que pour respecter le thème proposé à ce congrès, nous allons essayer d’illustrer la manière dans laquelle la Cour Constitutionnelle contribue – par sa jurisprudence – à nettoyer/éliminer dans les nouvelles réglementations (qui forment le droit privé) les éléments (règles juridiques) qui sont contraires aux dispositions de la Loi fondamentale.

3. Ainsi, en matière du droit privé, la Cour Constitutionnelle de la Roumanie a décidé sur la constitutionnalité du nouveau Code de l’insolvabilité qui a été adopté – premièrement – par une ordonnance d’urgence du Gouvernement (A), et ensuite par une loi adoptée par le Parlement (B).

A. Par la Décision n° 447/2013[9] la Cour Constitutionnelle a décidé d’une exception d’inconstitutionnalité relative à l’adoption d’un nouveau Code de l’insolvabilité par une ordonnance d’urgence du Gouvernement. La Cour a analysé la manière dans laquelle la nouvelle réglementation a été promue, en retenant que l’adoption par le Gouvernement de l’Ordonnance d’urgence n° 91/2013 (sur les procédures de prévention et l’insolvabilité et d’insolvabilité) n’a pas été motivée par la nécessité de la réglementation dans un domaine dans lequel le législateur primaire n’est pas intervenu. Au contraire, il y avait des réglementations en la matière, même si non pas codées dans un seul acte normatif, de sorte qu’il était d’autant plus nécessaire de mettre en évidence et d’expliquer l’urgence de la réglementation du domaine par le Gouvernement.

La Cour a rencontré aussi d’autres situations similaires dans sa jurisprudence lorsqu’elle a sanctionné une ordonnance d’urgence émise dans un domaine dans lequel le Parlement était déjà intervenu[10]. Par conséquent, tant que les conditions pour l’adoption d’une ordonnance d’urgence ne sont pas accomplies, le Gouvernement ne peut pas intervenir dans un domaine déjà couvert par le Parlement.

Le législateur constituant dérivé, en utilisant le syntagme « situation extraordinaire », a essayé de « restreindre le domaine dans lequel le Gouvernement peut se substituer au Parlement, adoptant des règles primaires pendant la considération de certaines raisons qu’il est souverain lui-même de les déterminer ». Les situations extraordinaires expriment un haut degré de déviation de l’habituel ou commun, aspect renforcé aussi par l’ajout du syntagme « dont la réglementation ne peut pas être reportée », en étant ainsi consacré in terminis l’impératif de l’urgence de la réglementation.

De plus, par la Décision n° 421/2007[11], la Cour a jugé que « l’urgence de la réglementation n’équivaut pas à l’existence de la situation extraordinaire, la réglementation opérative pouvant être aussi réalisée par la procédure législative habituelle ».

La Cour a jugé également qu’il appartient au législateur de réaliser la codification en un seul acte normatif du domaine de l’insolvabilité. Le législateur est aussi en droit d’éliminer les situations qui ont conduit, dans certains cas, au détournement du but des procédures d’insolvabilité. Mais cela doit être fait dans le respect des dispositions constitutionnelles, après une analyse attente et détaillée des conséquences de l’acte normatif proposé à être adopté.

La Cour a souligné en même temps que les exigences de l’État de droit imposent que les mécanismes juridiques prévus par la Loi fondamentale soient utilisés selon le but pour lequel ils avaient été établis. On peut arriver de cette façon au renforcement d’une véritable démocratie constitutionnelle.

Par conséquent, la Cour Constitutionnelle a jugé que l’adoption d’un Code de l’insolvabilité par une ordonnance d’urgence, étant donné que – à ce temps-là – il y avait une réglementation en vigueur qui couvrait la matière de l’insolvabilité, était contraire aux dispositions de la Loi fondamentale[12].

B. Par la suite, par la Décision n° 283/2014[13], la Cour Constitutionnelle – saisie de l’exception d’inconstitutionnalité de la Loi sur le Code de l’insolvabilité (qui contient les mêmes dispositions normatives que la réglementation adoptée auparavant par le Gouvernement) – a exercé le contrôle a priori et a jugé que le Parlement a adopté un acte normatif relevant de paramètres constitutionnels.

4.  Comme on le sait, les affaires concernant la restitution des biens immeubles pris abusivement[14], pendantes devant les juridictions, ainsi que les affaires pendantes devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme ont été suspendues – en vertu de l’Arrêt pilote du 12 octobre 2010, rendue dans l’Affaire Maria Atanasiu et autres c. Roumanie[15] – jusqu’à l’adoption et la mise en application d’une loi nouvelle par laquelle les demandes formulées par ceux qui ont été dépossédés arbitrairement soient équitablement résolues. Acceptant que les anciennes réglementations en la matière se sont avérées inefficaces, le législateur a décidé, par dispositions expresses, que la sphère d’application de la nouvelle loi devait contenir les demandes pendantes jusqu’à la date de l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation.

5. La nouvelle réglementation – Loi n° 165/2013 – est vulnérable, puisque beaucoup de ses dispositions, soumises au contrôle de constitutionnalité, se sont avérées être en collision avec la Loi fondamentale. Nous allons essayer d’illustrer cela en évoquant l’une des premières décisions rendues par la Cour Constitutionnelle en la matière. Il s’agit de la Décision n° 88 du 27 février 2014 relative à l’exception d’inconstitutionnalité des dispositions de l’article 4, deuxième phrase par rapport aux dispositions de l’article 33 de la Loi n° 165/2013[16].

La Cour Constitutionnelle a d’abord retenu que dans les affaires dans lesquelles l’exception d’inconstitutionnalité a été soulevée, les demandes formées devant la cour ont été introduites avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013, celles-ci étant pendantes devant les juridictions à la date de l’entrée en vigueur de cet acte normatif. Suite à l’entrée en vigueur de la loi mentionnée, ces affaires ont soulevé le problème de l’incidence des dispositions de l’article 33, à savoir le non-épuisement des délais prévus par ces dispositions, avec la conséquence du rejet des affaires comme « devenues prématurées ». Par les dispositions de l’article 33 de la Loi n° 165/2013 certains délais procéduraux ont été établis en vue de la résolution des demandes par les entités ayant des attributions conférées par la loi dans la restitution des biens immeubles pris abusivement ; ces délais – qui ont commencé à courir à partir du 1 janvier 2014 –  n’ont pas permis aux ayants droit de formuler des demandes au tribunal.

La Cour a noté que l’incidence des nouveaux délais procéduraux dans les affaires mentionnées a été le résultat de l’interprétation judiciaire donnée au contenu normatif de la Loi n° 165/2013, déterminée par un certain manque de précision des dispositions de l’article 4 de cette loi, qui ne font pas distinction entre les normes procédurales et celles substantielles ; or, cela peut générer confusion dans l’application de celles-ci dans les affaires pendantes à la date de l’entrée en vigueur de la loi.

De l’analyse de l’entier contexte normatif, ainsi que de l’analyse des affaires dans lesquelles l’exception d’inconstitutionnalité a été soulevée, la Cour note que plusieurs hypothèses peuvent être distinguées. Ainsi, selon la nature des dispositions de la Loi n° 165/2013, d’une part, il y a certaines dispositions à caractère procédural instituant certains délais, dispositions qui incluent aussi les dispositions de loi critiquées et, d’autre part, il y a certaines dispositions à caractère substantiel, relatives au montant et à la modalité d’octroi des mesures compensatoires. En même temps, selon le moment de l’introduction de la demande formée devant la cour dans les affaires sur la restitution des biens immeubles pris abusivement, la Cour remarque que ces demandes soit ont été introduites avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013 et étaient pendantes devant les juridictions au moment de l’entrée en vigueur de la loi, soit elles ont été introduites après l’entrée en vigueur de la Loi nr.165/2013.

Ainsi, la Cour est appelée d’établir si l’application des nouvelles normes procédurales aux affaires introduites avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013 qui étaient pendantes devant les juridictions au moment de l’entrée en vigueur de la loi détermine une violation du principe de la non-rétroactivité de la loi consacré par l’article 15, paragraphe (2) de la Constitution.

En ce qui concerne l’action dans le temps de la loi de procédure civile, la Cour remarque l’existence de deux possibilités : l’application immédiate de la nouvelle loi de procédure civile et l’ultra-activité de l’ancienne loi de procédure civile.

Notant que l’application immédiate de la nouvelle loi de procédure civile, concernant certains effets juridiques consommés, peut donner lieu à la violation des dispositions constitutionnelles relatives au principe de la non-rétroactivité de la loi, la Cour retient que la résolution du conflit dans le temps des dispositions de procédure civiles, qui du point de vue constitutionnel vise le respect du principe de la non-rétroactivité de la loi, nécessite une appréciation différentiée de celles-ci. Ainsi, dans sa jurisprudence[17], la Cour a jugé que, si la réglementation concernée se referait à une situation juridique à caractère de continuité, constitutive de facta pendentia, sur laquelle le législateur peut intervenir dans l’avenir, il ne peut être question d’une violation du principe de la non-rétroactivité.

La Cour a aussi analysé dans quelle mesure les dispositions critiquées généraient la possibilité d’invoquer l’exception de la prématurité de la demande formée devant la cour, qui a été introduite avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013. 

La Cour a noté que pour la défense de ses droits et intérêts légitimes, toute personne pouvait s’adresser à la justice par la saisine de la juridiction compétente d’une demande formée devant celle-ci. Ainsi, l’exception de la prématurité de l’action est l’exception de procédure invoquant le fait que le droit subjectif n’est pas encore actuel. Dans ce contexte, la Cour retient que la prématurité est une sanction procédurale qui intervient pour défaut de parcourir une procédure préalable obligatoire, ainsi que pour la violation d’un délai dilatoire ou prohibitif. Ainsi, la prématurité d’une action se transpose dans un conditionnement de l’exercice du droit de recours en termes de suspension ou dans une atteinte au droit procédural apportée par un délai à caractère suspensif. Ainsi, la prématurité d’une action en justice impose une analyse des conditions dans lesquelles la procédure judiciaire devait être commencée, conditions qui sont prévues par la loi en vigueur au moment de l’introduction de la demande formée devant la cour. Par conséquent, la Cour a constaté que la prématurité ne pouvait pas résulter d’une norme de procédure civile suite à l’introduction de la demande formée devant la cour.

Au vu de ces constatations, la Cour Constitutionnelle note que, selon l’article 25, paragraphe (1) de la Loi n° 10/2001, « dans les 60 jours depuis l’enregistrement de la notification ou, le cas échéant, de la date de dépôt des pièces justificatives […], l’unité détentrice est obligée de statuer, par décision ou, le cas échéant, par disposition motivée, sur la demande de restitution en nature ». Ainsi, la Cour a retenu qu’au moment de l’introduction des demandes formées devant la cour, avant l’entrée en vigueur de la Loi n° 165/2013, les ayants droit avaient un droit subjectif actuel qui, du point de vue procédural, n’était pas grevé que de l’obligation de respecter le délai de 60 jours prévu à l’article 25, paragraphe (1) de la Loi n° 10/2001. Ainsi, les dispositions de l’article 4, en combinaison avec celles de l’article 33 de la Loi n° 165/2013, indiquant que les dispositions établissant le nouveaux délais de résolution des demandes formulées en vertu de la Loi n° 10/2001 s’appliquent aussi aux affaires sur la restitution des biens immeubles pris abusivement, pendantes devant les juridictions, ne font qu’établir une condition d’exercice de l’accès à la justice, qui n’existait pas au moment de l’introduction de la demande. En d’autres termes, une telle hypothèse ne tient pas compte du fait que la demande formée devant la cour doit respecter les conditions de forme et de fond qui sont régies par les actes normatifs en vigueur à partir du moment de son introduction. Par conséquent, les effets consommés des relations juridiques nées en vertu de la Loi n° 10/2001, republiée, sur les conditions d’exercice du droit de recours ne sont pas reconnus.

Compte tenu de tout ce qui précède, la Cour a estimé que les dispositions de l’article 4, deuxième phrase, qui pouvaient être interprétées en ce sens que l’article 33 de la Loi n° 165/2013 s’appliquait aux « affaires sur la restitution des biens immeubles pris abusivement, pendantes devant les juridictions », donnaient aux nouvelles normes procédurales les effets rétroactifs, ce qui contrevient aux dispositions de l’article 15, paragraphe (2) de la Constitution.

La Cour Constitutionnelle a aussi retenu que le principe du libre accès à la justice offrait à toute personne le droit d’accès à une juridiction en vue de défendre ses droits. Tel que souligné dans la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, sa simple consécration légale, même au niveau suprême, par Constitution, n’est pas susceptible d’assurer aussi une efficacité réelle de celui-ci, aussi longtemps que, dans la pratique, son exercice rencontre des obstacles. Par conséquent, l’accès à la justice doit être assuré de manière efficace et efficiente[18].

De même, la Cour a noté que le principe constitutionnel établi par l’article 21 sur le libre accès à la justice se referait à la possibilité de toute personne de s’adresser directement aux juridictions pour défendre ses droits, libertés et intérêts légitimes, aucune loi ne pouvant limiter l’exercice de ce droit. Considérant que le principe du libre accès à la justice implique aussi l’adoption par le législateur de certaines règles de procédure claires, qui contiennent avec précision les conditions et les délais dans lesquels les individus peuvent exercer leur droits procéduraux, la Cour a noté que le droit de libre accès à la justice ne se limitait pas seulement à la possibilité de l’introduction d’une demande devant la cour, mais il incluait aussi le droit de bénéficier du jugement et du règlement au fond du litige existant devant une juridiction.

Cependant, dans les affaires déduites au contrôle de constitutionnalité, la Cour a retenu que par l’application rétroactive des délais procéduraux prévus à l’article 33 de la Loi n° 165/2013 on portait atteinte au droit du libre accès à la justice des ayants droit aux mesures consacrées par les lois de réparation, droit que ces personnes réjouissent à partir du moment auquel la juridiction est investie jusqu’à la résolution définitive de l’affaire. L’effet juridique des solutions rendues par les juridictions, à savoir le rejet des actions mentionnées comme « devenues prématurées », constitue une évidente violation du libre accès à la justice et, par conséquent, une violation des dispositions constitutionnelle de l’article 21, paragraphe (2)[19].

Par conséquent, l’introduction dans le cadre d’un procès en cours d’un obstacle qui tend à nier le droit du libre accès à la justice de la personne concernée viole les dispositions de l’article 21, paragraphes (1) et (2) de la Constitution.

Pour les raisons exposées, la Cour a estimé que les dispositions de l’article 4, deuxième phrase de la Loi n° 165/2013 étaient constitutionnelles uniquement si les délais prévus à l’article 33 de la même loi ne s’appliquaient pas aux affaires sur la restitution des biens immeubles pris abusivement pendantes devant les juridictions à la date de l’entrée en vigueur de la loi, à savoir le 20 mai 2013.

6.  Le nouveau Code de procédure civile a formé, par une série de dispositions qu’il contient, un objet favori des exceptions d’inconstitutionnalité. Les saisines étaient liées à : les conditions de fond et de forme que doit accomplir la demande de poursuite devant les tribunaux ; les conditions dans lesquelles la voie extraordinaire de recours peut être exercée ; la compétence de la juridiction qui décide de la demande de renvoi de l’affaire pour raison de doute légitime ; la manière dont on établit la juridiction d’exécution etc.

A. Ainsi, par exemple, sur l’article 200 en combinaison avec les articles 194-197 du Code de procédure civile[20], la Cour a décidé plusieurs fois en constatant la constitutionnalité de ces dispositions légales.

Par plusieurs décisions rendues en la matière[21], la Cour Constitutionnelle a jugé que la procédure prévue par les dispositions légales critiquées vise à remédier aux insuffisances de l’action introductive, de sorte que, au début de la procédure pour l’établissement du premier délai de jugement, celle-ci contienne tous les éléments prévus à l’article 194 du Code de procédure civile. Le législateur a voulu de discipliner les parties au procès et respecter, de cette façon, le principe de la célérité et du droit à un procès équitable. Une telle procédure n’est pas de nature à affecter l’essence-même du droit protégé, en étant accompagnée aussi par la garantie offerte par le droit de formuler une demande de réexamen. De plus, l’instance judiciaire décide sur un problème concernant exclusivement la bonne administration de la justice.

Il a été aussi indiqué dans les décisions mentionnées que la procédure de régularisation de la demande introductive est basée sur une solution de principe (consacrée par le Code de procédure civile) selon laquelle les parties doivent s’informer mutuellement et en temps opportun, directement ou par le biais de l’instance, le cas échéant, les moyens de fait et de droit sur lesquels elles fondent leur prétentions et défenses, ainsi que les moyens de preuve qu’elles entendent utiliser, de sorte que chacune d’elles puisse organiser sa propre défense.

La Cour a également conclu que les dispositions du texte de loi critiqué prévoient la nécessité de vérifier la demande de poursuite devant les tribunaux par la formation de jugement à laquelle l’affaire avait été repartie aléatoirement, ainsi que l’obligation de régulariser cette demande, si elle n’accomplit pas certaines exigences prévues aux articles 194-197 du Code, relatives au contenu de la demande de poursuite devant les tribunaux, le nombre d’exemplaire, l’estampage de la demande ou aux cas de nullité de celle-ci. Les dispositions des articles 194-197 du Code de procédure civile établissent des conditions de forme de la demande de poursuite devant les tribunaux, en régissant le contenu de celle-ci (article 194), le nombre d’exemplaires (article 195), les éléments essentiels qu’elle doit contenir, sous peine de nullité (article 196), ainsi que l’exigence de l’estampage de celle-ci (article 197).

La Cour a aussi souligné que l’établissement de conditions pour l’introduction des actions en justice n’est pas une violation du droit d’accès à la justice. En outre, tel que déclaré dans la jurisprudence citée, le libre accès à la justice suppose l’accès des moyens de procédure par lesquels l’administration de la justice est réalisée, le législateur étant exclusivement compétent d’établir les règles de déroulement du procès devant les instances judiciaires, solution qui résulte des dispositions de l’article 126, paragraphe (2) de la Constitution.

De même, dans la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, par exemple l’Arrêt du 26 janvier 2006, rendu dans l’Affaire Lungoci c. Roumanie, alinéa 36, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 588 du 7 juillet 2006, il a été indiqué que l’accès libre à la justice implique par sa nature une réglementation de la part de l’État et peut être soumis à certaines limitations, à condition que la substance du droit ne soit pas atteinte.

Engin, par la Décision d’inadmissibilité du 15 avril 2014 rendue dans l’affaire Lefter c. Roumanie (Demande n° 66.268/13), la Cour Européenne des Droits de l’Homme a retenu que la procédure de régularisation de la demande de poursuite devant les tribunaux régie par l’article 200 du Code de procédure civile ne remplace pas une demande judiciaire et n’anticipe pas la phase d’admission des preuves, mais il s’agit d’une étape obligatoire, visant à imposer aux plaignants une certaine discipline, en vue d’éviter toute tergiversation dans le cadre de la procédure ; par conséquent, une telle procédure est prévue par la loi et poursuite une bonne administration de la justice (alinéa 18). La Cour apprécie que l’annulation de la demande du plaignant n’est pas une ingérence disproportionnelle à son droit d’accès au tribunal, puisque la partie est informée sur son omission, ainsi que sur la sanction susceptible à lui être appliquée (alinéas 20 et 21).

La Cour a retenu à cet égard que l’établissement de certaines conditions formelles de la demande de poursuite devant les tribunaux ne pouvait pas être considérée de plano comme une négation de l’effectivité du droit d’accès à la justice, mais celle-ci devait être une expression de l’obligation de l’exercice de bonne foi des droits et des libertés, dans les limites établies par la loi. En outre, le non-respect des conditions prescrites pour la conformité de la demande introductive d’instance n’attire pas de manière inconditionnelle l’annulation de l’acte procédural, avec la possibilité de le modifier ou compléter dans le délai établi par la loi et imposé par l’instance.

La Cour Constitutionnelle a estimé que l’instance judiciaire décidait d’un problème concernant exclusivement la bonne administration de la justice. Or, tout comme la Cour Européenne des Droits de l’Homme avait établi à plusieurs reprises, la plupart des droits procéduraux, par leur nature, ne sont pas, en vertu de la Convention, « des droits civils » et, donc, ils n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales[22]. Par conséquent, tant que la procédure critiquée ne concerne pas le jugement au fond de la demande introductive, les dispositions critiquées ne sont pas prioritaires aux dispositions relatives au droit à un procès équitable, puisque la procédure spéciale visée ne se réfère pas au fond des affaires, respectivement aux droits civils, tel qu’imposé par l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, mais seulement aux aspects d’ordre purement légal, dont l’examen ne fait de rien nécessaire un débat, les parties convoquées.

B. Par la Décision n° 462/2014 (non-publiée) la Cour Constitutionnelle a fait droit à l’exception d’inconstitutionnalité formulée en ce qui concerne les dispositions des articles 13, 83 et 486 du Code de procédure civile qui ont établi l’obligation de déclarer, rédiger/motiver et soutenir le recours par avocat (dans le cas des justiciables personnes physiques), respectivement par conseiller juridique (dans le cas des personnes morales).

La Cour a retenu que – suite au changement de l’optique du législateur, reflétée, parmi d’autres, dans le nouveau Code de procédure civile – le recours est régi exclusivement comme une voie extraordinaire de recours[23]. Cela étant, la cassation d’un arrêt peut être sollicitée seulement pour des raisons d’illégalité[24] et, par conséquent, pour soulever, discuter et analyser les questions de droit invoquées par/dans le recours on a besoin de personnes qualifiées.

La Cour a également noté que – selon les nouvelles dispositions du Code de procédure civile – ont été adoptées certaines réglementations connexes[25] établissant certains privilèges ; ces privilèges peuvent être accordés – de façon limitative – aux justiciables sans possibilités matérielles (sans liquidités suffisantes) pour leur assurer, au minimum, l’accès à la justice et le droit de la défense (lorsque le recours doit être déclaré, motivé et soutenu obligatoirement par avocat).

Enfin, la Cour a retenu que dans d’autres états européens il y a aussi des réglementations similaires, selon lesquelles la présence d’un avocat est d’habitude nécessaire devant les instances supérieures. La Cour Européenne des Droits de l’Homme a jugé aussi que l’obligation de la présence de l’avocat aux instances supérieures peut être acceptée si cela ne porte pas atteinte au libre accès à la justice.

La Cour Constitutionnelle a analysé les dispositions légales critiquées par rapport aux dispositions constitutionnelles prétendument violées et – en constatant que, dans les conditions économiques actuelle de Roumanie, l’aide publique judiciaire que l’État peut accorder n’est pas, dans la plupart des cas, suffisante – elle a décidé que l’obligation des justiciables d’employer un avocat pour déclarer, motiver et soutenir le recours (respectivement, pour rédiger et soutenir le mémoire en défense etc.) représente, pour trop d’eux, un poids insurmontable, de nature à restreindre le libre accès à la justice (garanti par l’article 21 de la Constitution).

Pour ces raisons, la Cour a déclaré comme inconstitutionnelles toutes les dispositions légales du Code de procédure civile relative à l’obligation d’employer un avocat pour le recours.

C. Par la Décision n° 348/2014 on a résolu l’exception d’inconstitutionnalité relative au choix de l’instance d’exécution selon le siège de l’huissier de justice élus pour mettre en application le titre exécutoire.

La Cour a d’abord constaté que les dispositions de l’article 650, paragraphe (1) du Code de procédure civile déterminent comme instance d’exécution le tribunal de première instance dans la circonscription duquel se trouve le bureau de l’huissier de justice qui fait l’exécution.

Ensuite, en retenant les critiques formulées, selon lesquelles les dispositions légales critiquées établissent un critère subjectif lorsqu’il est décidé de la compétence territoriale des instances judiciaires de solutionner les contestations à l’exécution en matière civile, la Cour a jugé les suivants.

La Cour a retenu que l’acte de justice, en vertu de l’article 124 de la Constitution[26], est l’attribut exclusif des instances judiciaires, et les dispositions légales critiquées se réfèrent à la compétence territoriale des instances judiciaires qui est établie selon le bureau de l’huissier de justice ; enfin, la compétence de l’huissier de justice est déterminée par rapport à la circonscription de la cour d’appel dans laquelle l’exécution aura lieu, selon le type de la poursuite ou de l’exécution.

Il est vrai que c’est la loi qui détermine l’instance compétente, mais à cause de sa généralité – la circonscription de la cour d’appel -, le texte de l’article 650, paragraphe (1) du Code de procédure civile laisse une marge large d’appréciation au créditeur qui est, indirectement, celui qui détermine l’instance d’exécution par le choix de l’huissier de justice. Dans une telle situation, on constate que, en offrant un tel droit procédural au créditeur, la loi n’a fait que créer la prémisse normative nécessaire pour que celui-ci remplace même le législateur, ce qui est contraire au principe constitutionnel prévu à l’article 126, paragraphe (2) de la Constitution selon lequel le législateur doit déterminer concrètement l’instance compétente. Or, le législateur n’a pas la compétence constitutionnelle de laisser à l’appréciation des parties le choix de l’instance compétente afin de juger une demande adressée à la justice, quelle que soit la nature de cette demande.

La Cour a aussi noté que, par la réglementation à niveau légal des principes constitutionnels relatifs à la procédure de jugement, le législateur assure le droit des parties d’avoir un parcours procédural prévisible, ainsi que le droit d’adapter de manière raisonnable sa conduite procédurale conformément à l’hypothèse  normative de la loi, aspects qui sont des garanties indispensables du droit à un procès équitable.

Dans sa jurisprudence, la Cour Constitutionnelle a retenu à maintes reprises que tout acte normatif doit répondre à certaines exigences qualitatives, s’agissant de la prévisibilité, ce qui suppose que celui-ci doit être suffisamment précis et clair pour pouvoir être appliqué[27].

 De même, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a jugé que la loi doit vraiment être accessible au justiciable et prévisible en ce qui concerne ses effets. Or, pour satisfaire à l’exigence de prévisibilité, la loi doit préciser avec suffisante clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités dans le domaine respectif, en tenant compte du but légitime poursuivi, afin d’offrir à la personne une protection adéquate contre l’arbitraire. De plus, on ne peut considérer « loi » qu’une règle énoncée avec suffisante précision, afin de permettre au citoyen d’adapter sa conduite selon celle-ci[28]. À la lumière de ce qui précède, la Cour constate que, de toute évidence, les dispositions de l’article 650, paragraphe (1) du Code de procédure civile ne répondent pas aux exigences de clarté, précision et prévisibilité et sont ainsi incompatibles au principe fondamental concernant le respect de la Constitution, de sa suprématie et des lois, prévu à l’article 1, paragraphe (5) de la Constitution. Cela étant, la Cour a conclu que le texte de loi soumis au contrôle de constitutionnalité permettait l’utilisation d’un critère subjectif d’appréciation de la part de l’une des parties au litige, ce qui équivaut au manque de choix précis de l’instance d’exécution compétente, respectivement à l’impossibilité pour le débiteur de connaitre, dans l’affaire respective, cette instance. Il résulte qu’une telle solution normative affecte les garanties constitutionnelles et, implicitement, celles conventionnelles qui caractérisent le droit à un procès équitable. 

Cela étant, la Cour constate que les déficiences de réglementation mises en évidence en ce qui concerne les dispositions de l’article 650, paragraphe (1) du Code de procédure civile sont susceptibles de contrevenir aux dispositions de l’article 1, paragraphe (5), de l’article 21, paragraphe (3) et l’article 126, paragraphe (2) de la Constitution, ainsi que l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

D. Nous restons en la matière de l’exécution forcée pour présenter une autre décision pertinente de la Cour Constitutionnelle. Il s’agit de la Décision n° 473/2013[29] par laquelle l’instance de contentieux constitutionnelle a décidé d’une exception d’inconstitutionnalité dont l’objet ont été les dispositions de l’article 659, paragraphe (3) du Code de procédure civile[30]. À l’opinion de l’auteur de l’exception d’inconstitutionnalité, les dispositions légale critiquées sont contraires aux dispositions constitutionnelles prévues à l’article 1, paragraphe (5) concernant l’obligation de respecter la Constitution, sa suprématie et les lois et à l’article 131, paragraphe (1) sur le rôle du Ministère Public.

En procédant à l’analyse de l’exception d’inconstitutionnalité, la Cour a constaté que les dispositions légales critiquées n’étaient pas claires et leur manquait la prévisibilité.

Elles ne sont pas claires, puisqu’elles créent la fausse impression que le Ministère Public pourrait se trouver sous le contrôle de l’huissier de justice dans la phase de l’exécution forcée d’un procès. Dans ce contexte, il faut retenir qu’en vertu des dispositions de l’article 132, paragraphe (1) de la Constitution de la Roumanie, « les procureurs exercent leur activité conformément au principe de la légalité, de l’impartialité et du contrôle hiérarchique, sous l’autorité du ministre de la justice. » En outre, selon l’article 62, paragraphe (4) de la Loi n° 304/2004[31], « Les parquets sont indépendants dans les relations avec les instances judiciaires, ainsi qu’avec les autres autorités publiques ».

Il est vrai que, dans l’activité judiciaire, le Ministère Public représente les intérêts généraux de la société et défend l’ordre de droit, ainsi que les droits et les libertés des citoyens, mais les dispositions légales critiquées transfèrent à la charge du procureur des attributions dans le domaine de l’exécution forcée, par la réalisation, sur demande de l’huissier de justice, de démarches concrètes, ce qui mène à l’établissement de rapports de subordination entre l’huissier judiciaire, d’une part, et procureur, d’autre part.

La Cour retient que le législateur peut attribuer certaines compétences au procureur dans cette phase du procès civil, même si les attributions du Ministère Public sont exercées, principalement, dans l’activité judiciaire pénale[32]. Cela doit être fait dans le respect des dispositions constitutionnelles.

Bien entendu, le législateur a la possibilité de mettre en place divers mécanismes supposant aussi l’implication des organes d’enquête pénale, tandis que, dans la phase de l’exécution forcée, une sollicitation pourrait être adressée au Ministère Public pour obtenir les informations voulues. Ces mécanismes doivent quand même prévoir la possibilité du procureur d’apprécier sur la nécessité de son intervention, par rapport aux intérêts généraux de la société, la nécessité de défendre l’ordre de droit, ainsi que les droits et libertés des citoyens[33].

Quelle que soit l’option législative future du législateur, celui-ci doit tenir aussi compte, outre les dispositions constitutionnelles mentionnées, de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, tel, par exemple, l’Arrêt du 15 janvier 2009, rendu dans l’Affaire Menchinskaya c. Russie, alinéa 35. Ainsi, selon cette jurisprudence, l’intervention du procureur au procès civil peut être justifiée par certaines circonstances, telle la protection des groupes vulnérables — enfants, personnes handicapées — dont on suppose ne pas pouvoir défendre tous seuls leurs intérêts, lorsque de nombreux citoyens sont affectés par certains faits ou les intérêts de l’État doivent être protégés.

D’ailleurs, la Cour Constitutionnelle a décidé de même lorsqu’elle a retenu qu’en ce qui concerne le procès civil, celui-ci est par sa nature un procès dans lequel des intérêts privés sont confrontés. C’est pourquoi, par conséquent, de manière objective, le rôle du Ministère Public est plus réduit[34]. Ce devoir du législateur découle du fait que la Roumanie est devenue partie à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales après sa ratification par la Loi n° 30/1994[35], s’assumant l’obligation de respecter les dispositions de cette convention, ainsi que l’interprétation que la Cour Européenne des Droits de l’Homme offre à cette convention, dans les limites prévues par celle-ci, selon les dispositions de l’article 46 qui se lit comme suit « Les hautes parties contractantes s’engagent à respecter les arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties »[36].

La Cour constate donc que ces mécanismes pourraient intervenir seulement dans ces cas strictement définis et seulement après l’épuisement par l’huissier de justice de tous les moyens juridiques prévus par la loi, en vue de la mise en exécution des titres exécutoires[37].

Les dispositions légales manquent de prévisibilité puisque, tel qu’indiqué aussi par l’auteur de l’exception d’inconstitutionnalité, elles ne réglementent pas les moyens procéduraux dont le Ministère Public dispose en vue d’accomplir la démarche prévue par la loi, elles ne prévoient pas les actes et les mesures procédurales que le procureur peut ordonner à cet effet, elles n’établissent pas le mode de contestation des mesures ordonnées et ne précisent pas quel parquet dans le cadre du Ministère Public est compétent pour accomplir la mesure [vu, en ce qui concerne ce dernier aspect retenu, l’article 650, paragraphe (1) et article 651, paragraphe (1) du Code de procédure civile].

La Cour note également que les dispositions légales critiquées ne sont pas accompagnées par des dispositions légales (qu’on peut retrouver aussi dans un acte normatif séparé) allouant les ressources humaines et matérielles nécessaires (éventuellement supplémentaires) de nature à assurer l’application efficace des mesures légales. Les exigences de l’État de droit imposent l’adoption d’un cadre législatif intégré permettant l’application effective et efficace des dispositions légales, de sorte que les droits et/ou les mesures prévues ne soient pas théoriques et illusoires.

Dans ces conditions, la Cour constate la violation des dispositions constitutionnelles prévues à l’article 1, paragraphe (5), l’article 131, paragraphe (1) et l’article 132, paragraphe (1).

7. Nous pourrions continuer avec d’autres exemples, puisque la Cour Constitutionnelle a rendu beaucoup plus décisions sur les nouvelles réglementations en la matière du droit privé. En confirmant ou infirmant des solutions législatives contenues dans les nouvelles réglementations adoptées récemment en Roumanie, l’instance de contentieux constitutionnel a développé des motifs et explications qui sont susceptibles, au cas par cas, de renforcer certaines des dispositions légales contestées ou d’enlever du fond législatif actif celles qui sont contraires à la Loi fondamentale, en obligeant ainsi le législateur de les reformuler pour les mettre en accord avec les règles et les principes constitutionnels.


[1] Cet ouvrage a été présenté au Conférence internationale intitulé „Droit civil et la Constitution” qui c’etait déroulé en cadre du XVI-eme Congrès International de droit européen et constitutionnel comparé, organisé à Regensburg – le 17-18 octombre 2014.

* Professeur à la Faculté de Droit de l’UBB Cluj-Napoca, juge à la Cour Constitutionnelle de la Roumanie ; msminea@yahoo.fr .

** Avocate, Bareau de Cluj.

[2] Voir la Loi n° 287/2009 sur le Code civil, republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 505 du 15 juillet 2011, qui a remplacé le Code civil de 1864 entré en vigueur le 1 juillet 1865.

[3] Voir la Loi n° 134/2010 sur le Code de procédure civile, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 545 du 3 août 2012, qui a remplacé le Code de procédure civile de 1865 entré en vigueur le 11 septembre 1865.

[4] Voir la Loi n° 286/2009 sur le Code pénal, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 510 du 24 juillet 2009, qui a remplacé le Code pénal de 1968 entré en vigueur le 21 juin 1968.

[5] Voir la Loi n° 135/2010 sur le Code de procédure pénale, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 486 du 15 juillet 2010, qui a remplacé le Code de procédure pénale de 1968 entré en vigueur le 21 juin 1968.

[6] Voir la Loi n° 85/2014 sur les procédures de prévention de l’insolvabilité et d’insolvabilité, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 466 du 25 juin 2014, qui a remplacé la Loi n° 85/2006 sur la procédure de l’insolvabilité entrée en vigueur le 20 juillet 2006.

[7] Selon certaines estimations (plus ou moins formelles), en Roumanie il y aurait environ 14.000 actes normatifs en vigueur!

[8] Voir A. V. Mihai, E. Terş, „Ce mai mediem ? Statistică şi întrebări”, sur www.juridice.ro posté le 1 octobre 2014.

[9] Décision n° 447 du 29 octobre 2013, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie n° 674 du 1 novembre 2013.

[10] À titre d’exemple, dans la Décision n° 1.221 du 12 novembre 2008, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 804 du 2 décembre 2008, la Cour a jugé que la relation entre le pouvoir législatif et celui exécutif était exprimée par la compétence attribuée au Gouvernement d’adopter des ordonnances d’urgence dans les conditions établies à l’article 115, paragraphe (4) de la Constitution. Ainsi, l’ordonnance d’urgence, en tant qu’acte normatif permettant au Gouvernement, sous le contrôle du Parlement, de répondre à une situation extraordinaire, est justifiée par la nécessité et l’urgence de régir cette situation qui, à cause de ses circonstances, impose l’adoption de solutions immédiates en vue d’éviter une grave atteinte apportée à l’intérêt public.

[11] Décision n°421 du 9 mai 2007[11], publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 367 du 30 mai 2007

[12] La Cour Constitutionnelle a apprécié comme méconnues les dispositions de l’article 115, paragraphe (4) de la Constitution, selon lesquelles « le Gouvernement peut adopter des ordonnances d’urgence seulement en situations extraordinaires dont la réglementation ne peut être ajournée, étant tenu de motiver l’urgence dans leur contenu ».

[13] Décision n° 283 du 21 mai 2014, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 454 du 20 juin 2014.

[14] Les principaux actes normatifs adoptés sur la restitution des biens pris abusivement dans la période du régime communiste sont :

— la Loi n° 18/1991 sur le fonds foncier, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 37 du 20 février 1991 (republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 1 du 5 janvier 1998), telle que modifiée et complétée ultérieurement ;

— la Loi n° 1/2000 pour la reconstitution du droit de propriété sur les terrains agricoles et forestiers, sollicités en vertu des dispositions de la Loi n° 18/1991 sur le fonds foncier et de la Loi n° 169/1997, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 8 du 12 janvier 2000, telle que modifiée et complétée ultérieurement ;

— l’Ordonnance d’urgence du Gouvernement n° 83/1999 portant restitution de certains biens immeubles ayant appartenu aux communautés des citoyens appartenant aux minorités nationales de Roumanie, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 266 du 10 Juin 1999 (republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 797 du 1 septembre 2005) ;

— l’Ordonnance d’urgence du Gouvernement n° 94/2000 sur la restitution des biens immeubles ayant appartenus aux cultes religieux de Roumanie, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 308 du 4 juillet 2000 (republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 797 du 1 septembre 2005), telle que modifiée et complétée ultérieurement ;

— la Loi n° 10/2001 sur le régime juridique des biens immeubles pris abusivement entre le 6 mars 1945 et le 22 décembre 1989, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 75 du 14 février 2001 (republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 279 du 4 avril 2005 et au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 798 du 2 septembre 2005), telle que modifiée et complétée ultérieurement ;

— la Loi n° 247/2005 sur la réforme dans les domaines de la propriété et de la justice, ainsi que certaines mesures adjacentes, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 653 du 22 juillet 2005, telle que modifiée et complété ultérieurement.

[15] Nous rappelons que par l’Arrêt du 12 octobre 2010 rendu dans l’Affaire Maria Atanasiu et autres c. Roumanie (l’Arrêt est resté définitif le 12 janvier 2011 et a été publié au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 778 du 22 novembre 2010), la Cour Européenne des Droits de l’Homme a retenu l’inefficacité du système de restitution des propriétés en Roumanie et a décidé d’initier la procédure-pilote dans les affaires répétitives de ce genre pendantes devant celle-ci. Ainsi, à compter de la date où l’arrêt est devenu définitif, l’État roumain a reçu un délai de 18 mois, prolongé ensuite, pour prendre des mesures « capables de fournir un remède adéquat à toutes les personnes touchées par les lois de réparation » (alinéa 241 de l’arrêt pilote). Suite au prononcé de cet arrêt, en engageant la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement, en vertu de l’article 114 de la Constitution, la Loi n° 165/2013 sur les mesures pour la finalisation du processus de restitution, en nature ou par équivalent, des biens immeubles pris abusivement dans la période du régime communiste en Roumanie, publiée au Moniteur officiel n° 278 du 17 mai 2013, a été adoptée.

[16] La Décision n° 88 du 27 février 2014 a été publiée au Moniteur officiel n° 281 du 16 avril 2014.

[17] Voir, par exemple, la Décision n° 546 du 18 octobre 2005, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 1.004 du 11 novembre 2005.

[18] Voir la Décision n° 670 du 18 mai 2011, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 421 du 16 juin 2011.

[19] Conformément aux dispositions de l’article 21, paragraphe 2 de la Constitution « Aucune loi ne peut limiter l’exercice de ce droit ».

[20] Les dispositions mentionnées établissent que – lorsque la demande de poursuite devant les tribunaux n’accomplit pas toutes les conditions prévues par la loi – le juge (auquel le dossier a été attribué aléatoirement afin de le solutionner) doit restituer la demande de la partie qui l’avait formulée, en la conseillant de la compléter, conformément à la loi, dans dix jours. Si la partie/le plaignant n’accomplit pas son obligation légale, la demande sera annulée. Contre le jugement avant dire droit par lequel le juge a ordonné l’annulation de la demande de poursuite devant les tribunaux, dans les 15 jours une demande de réexamen peut être formulée, qui va être résolue définitivement en chambre du Conseil, le plaignant convoqué.

[21] Voir, à titre d’exemple : Décision n° 31 du 21 janvier 2014, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 112 du 14 février 2014 ; Décision n° 66 du 11 février 2014, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 286 du 17 avril 2014 ; Décision n° 235 du 15 avril 2014, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 496 du 3 juillet 2014.

[22] Pour le même raisonnement, voir aussi la Décision de la Cour Constitutionnelle n° 142 du 7 mars 2013, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 206 du 11 avril 2013). On cite à cet effet comme exemples : le refus d’autoriser l’introduction de l’appel prononcé par une cour suprême — Décision du 9 mai 1989, prononcée par la Commission Européenne des Droits de l’Homme dans l’Affaire Helmers c. Suède (Demande n° 11.826/85) ; l’examen de la demande de révision d’un procès civil — Décision du 8 octobre 1976, prononcée par la Commission Européenne des Droits de l’Homme dans l’Affaire X, Y et Z c. Suisse (Demande n° 6.916/75).

[23] Selon les dispositions de l’article 483 du Code de procédure civile, le recours vise d’habitude de soumettre à l’examen de la Haute Cour de Cassation et de Justice, conformément à la loi, la conformité de l’arrêt attaqué avec les règles de droits applicables.

[24] Les motifs de cassation sont énumérés de façon limitative à l’article 488, paragraphe 1 du Code de procédure civile.

[25] Voir l’Ordonnance d’urgence du Gouvernement no 51/2008 sur l’aide publique judiciaire, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie n° 327 du 25 avril 2008 et la Loi n° 51/1995 sur l’organisation et l’exercice de la profession d’avocat, republiée au Moniteur officiel de la Roumanie n° 98 du 7 février 2011.

[26] Selon les dispositions de l’article 124, paragraphe 2 de la Constitution, la justice est unique, impartiale et égale pour tous.

[27] Voir, par exemple, la Décision n° 189 du 2 mars 2006, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 307 du 5 avril 2006, la Décision n° 647 du 5 octobre 2006, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 921 du 14 novembre 2006, la Décision n° 903 du 6 juillet 2010, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 584 du 17 août 2010, la Décision n° 1 du 11 janvier 2012, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 53 du 23 janvier 2012 et la Décision n° 26 du 18 janvier 2012, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 116 du 15 février 2012.

[28] Voir l’Arrêt du 4 mai 2000, rendu dans l’Affaire Rotaru c. Roumanie, alinéa 52 et l’Arrêt du 25 janvier 2007, rendu dans l’Affaire Sissanis c. Roumanie, alinéa 66.

[29] Décision n° 473/2013 a été publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 30 du 15 janvier 2014.

[30] Le texte de loi établit que : « Si ceux saisis n’ont pas les informations requises ou, le cas échéant, refuses de les donner, le Ministère Public va entreprendre, sur la demande de l’huissier de justice, les diligences nécessaires pour apprendre les informations requises, notamment pour identifier les entités publiques ou privées auxquelles le débiteur a ouvert des comptes ou dépôts bancaires, des placements de valeurs mobilières, est actionnaire ou associé ou, le cas échéant, il a des titres d’État, bons de trésor et d’autres titres de valeur susceptible de poursuite forcée » .

[31] La Loi n° 304/2004 sur l’organisation judiciaire, republiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 827 du 13 septembre 2005.

[32] Voir, à cet effet, la Décision n° 71 du 5 mars 2002, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 309 du 10 mai 2002.

[33] Voir l’article 131, paragraphe (1) de la Constitution.

[34] Voir, à cet effet, la Décision n° 71 du 5 mars 2002, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 309 du 10 mai 2002.

[35] Publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 135 du 31 mai 1994.

[36] Voir, à cet effet, aussi la Décision de la Cour Constitutionnelle n° 233 du 15 février 2011, publiée au Moniteur officiel de la Roumanie, Partie I, n° 340 du 17 mai 2011.

[37] Par exemple, celui-ci dispose des instruments juridiques prévus à l’article 659, paragraphe (1) conjointement avec l’article 187, paragraphe (1), point 2, point f) et l’article 189 du Code de procédure civile.


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