Numărul 1 / 2012
ARTICOLE
UNE VISION COHÉRENTE DE L’ACTIVITÉ DES AUTORITÉS PUBLIQUES SUR LES BIENS QU’ELLES DÉTIENNENT[1]
Ovidiu Podaru*
Résumé: Une vision cohérente de l'activité des autorités publiques sur les biens qu'elles détiennent.L'administration mise face à face avec les biens. Surtout ses biens à elle, mais aussi les biens privés. Peut-on identifier, à partir de l'analyse de ses actions, une conduite fondée sur certains principes et cohérente? Notre article propose justement une réponse à cette question. Toutd'abord,l'administrationdoitmettreenvaleurlesbiensaffectésàuneutilitépublique:unerèglesimpleetarchiconnueditquelatotalitédesesbiens,ledomainepublic,estinaliénable.Mais,malheureusement,l'administrationtrouvesouventdesmodalités(fréquemmentillicites)d'enleverlaprotectiondurégimedomanialafindelesaliéner.Parfois,mêmelelégislateurluidonneuncoupdemainencesens. Ensuite,l'administrationdoitrésoudrelesproblèmesposés par sesbiensrelevantdela propriété«privée».Uneautrerèglesimpleaffirmequeceux-cisontgouvernésparledroitcommun.Maisparexemple,commentunpréfetpourrait-ilaliénersonsiègesocial-lebâtimentdelapréfecture-construitavecdesressourcesfinancièresextrabudgétaires?Untelimmeublesembleplutôtinaliénable,dumoinsenfait.Maisalors,pourquoin'appartient-ilpasàlapropriétépublique? Enfin,l'administration,alorsqu'elleveutdéveloppersesprojets,rencontresouventlesbiensdesparticuliers,quiluisontnécessaires.Ellerecourtàl'expropriation,quisedéroulesoittroplentement,soittropvite.Danslaplupartdessituations,lesparticulierssesententlésésparlesabusdel'administrationetilss'adressentàlajustice,mais,enmêmetemps,l'intérêtpublicestaffectéaussi,parcequelestravauxd'utilitépubliquetraînentoumêmen'avancentpoint. Peut-on donc caractériser l'activité de l'administration en ce qui concerne les biens comme cohérente et conséquente? Malheureusement, la réponse ne peut être que négative. Du moins pour l'instant.
Mots-clefs: administration, propriété publique, afféctation, inaliénabilité, cohérence
Le résumé ci-dessus représente aussi la conclusion, concise et assez pessimiste, que nous avons placée sur la quatrième de couverture d'un volume récemment paru consacré au droit administratif des biens[2]. Cette idée transparaît d'ailleurs des pages de ce volume, lequel ne s'était cependant pas proposé de mettre l'accent sur cette question. Aussi, dans les lignes qui vont suivre, essaierons-nous de mettre en évidence, de façon structurée, le plus de situations anormales, incohérentes, du législateur ou de l'administration vis-à-vis des biens sur lesquels s'exerce le pouvoir public, après quoi nous essaierons de proposer des solutions en vue de trouver la cohérence dont a besoin toute activité accomplie dans le but déclaré de satisfaire l'intérêt public. En passant en revue le droit administratif des biens, nous avons remarqué plusieurs situations au moins anormales. Certaines concernaient la relation entre le critère matériel de la domanialité publique - l'affectation à un intérêt ou à un service public et le critère formel - le classement d'un bien comme domanial (A). D'autres visaient la relation entre l'affectation et le protecteur de celle-ci - l'inaliénabilité (B). Enfin, il y a quelques incongruences aussi dans la législation et la pratique administrative et judiciaire des expropriations[3] (C).
A. Affectation, classement et incohérence
1. La relation théorique de l'affectation et du classement Ainsi que nous l'avons montré[4], si l'affectation est un fait matériel, le classement est l'acte formel qui atteste l'appartenance d'un bien au domaine public, reconnaissant de cette façon son caractère indispensable à l'intérêt public. Pour l'essentiel, le rôle du classement est de protéger l'affectation, présente ou, éventuellement, future, que l'administration a en vue dans un avenir prévisible. Par conséquent, en théorie, les rapports normaux entre les deux notions devraient tenir compte des repères suivants: a) un bien affecté à une utilité publique présente devrait être classé; en plus, le classement étant obligatoire dans cette situation, toute personne qui justifie un intérêt légitime a une action dans le contencieux administratif contre le refus de l'administration de le faire. Dans le même ordre d'idées, le déclassement d'un bien affecté est en principe illégal, de sorte que l'instance de contencieux administratif, saisie par un particulier ou par le préfet peut annuler cet acte de déclassement. La doctrine française[5] montre ainsi que même le déclassement intermédiaire[6] est nul, au cas où l'on a l'intention de modifier une affectation, l'administration étant obligée de garder le bien dans le domaine public y compris pendant l'intervalle où l'ancienne affectation ne subsiste plus et la nouvelle affectation n'est pas encore d'actualité. Dans ce dernier cas, nous parlons d'une protection du domaine public virtuel[7] (ou à venir), et l'interdiction du déclassement intermédiaire évite les risques d'une aliénation subite et abusive. b) peracontrario,unbienquin'estpasaffectéàuneutilitépublique(niprésentenifuture) ne peut pas être classé comme bien domanial. Par conséquent, sil'affectationd'uncertainbienadisparu,l'administrationestobligéededéclasserlebien et de le rendre au circuit civil aussi longtemps qu'elle n'a pas l'intention de lui faire changer d'affectation. De même, un acte de classement d'un bien qui relève la propriété privée, s'il n'a pas comme fondement une affectation concrète de celui-ci, est illégal, ayant une cause illicite[8]. Ainsi seulel'affectationpeutassurerlefondementd'unactedeclassement, de sorte que, naturellement, le fait matériel de l'affectation d'un bien à une utilité publique sera suivi d'un acte de classement de celui-ci comme bien domanial, tout comme le fait matériel de la désaffectation sera suivi de l'acte formel du déclassement. Certes, ça ne se passe pas toujours dans cet ordre-là.. Ainsi, parfois, la volonté de l'administration de classer précède les actes matériels conclus avec l'affectation effective du bien en question. Tout comme il est possible que, dans certaines situations, un bien affecté à une utilité publique se détériore graduellement, l'usure physique étant suivie d'une usure morale, de sorte que son utilité publique diminue au fur et à mesure qu'il est utilisé. La décision de l'administration de déclasser à un moment donné le bien (même si, à ce moment-là, il est encore affecté à l'utilité publique en question), est parfaitement légale, si, par exemple, le rendement financier du bien est négatif et son utilité publique est même remise en question. En conclusion, que le classement suive ou qu'il précède l'affectation, ce qui est certain c'est qu'entre les deux notions il y a un rapport étroit.
2. Des situations (aumoinsapparemment)anormales En analysant les diverses situations apparues dans la vie administrative, nous avons découvert quelques hypothèses dans le cas desquelles le raisonnement exposé ci-dessus ne s'applique pas rigoureusement. En voilà quelques-unes: a) l'hypothèse où l'appartenance d'un bien au domaine public est déclarée par la loi. Conformément à l'art. 136 alin. 3 de la Constitution „Les richessses d'intérêt public du sous-sol, de l'espace aérien, les eaux à potentiel énergétique valorisable, d'intérêt national, les plages, la mer territoriale, les ressourcesnaturellesdelazoneéconomiqueetduplateaucontinental,demêmequed'autresbiensétablisparlaloiorganique,fontl'objetexclusifdelapropriétépublique". À première vue, il semblerait que dans ces hypothèses réglementées par la Constitution ou dans celles établies par la loi organique le classement de certains biens comme appartenant au domaine public se fait directement par les actes normatifs qui les réglementent. Cependant, en réalite, un véritable acte de classement ne peut être qu'individuel. Ainsi, bien que dans les hypothèses rappelées les plages fassent partie du domaine public, rien ne peut nous assurer qu'une certaine bande de terre concrète entre dans cette catégorie et, implicitement, dans le domaine public, en l'absence d'un acte administratif individuel qui l'atteste spécialement: c'est ça le véritable l'acte de classement. La technique de l'établissement d'une certaine catégorie de biens comme domaniale doit être utilisée par le législateur avec beaucoup de précaution et seulement dans des situations évidentes, parce que ça peut déterminer des dérapages des autorités dans l'interprétation de ces textes de loi. Par exemple, dans l'hypothèse citée des „plages", bien que la Constitution ne prévoie pas cela expressément, la citation de cette catégorie avant la mer territoriale et avant les ressources naturelles de la zone économique et du plateau continental nous fait croire qu'il s'agit uniquement des plages de la Mer Noire, et non pas de n'importe quelle plage de tout le territoire de la Roumanie[9]. Mais, même si c'était ainsi, dans ces hypothèses nous devons convenir que le principe d'interprétation de ces textes de loi est celui qu'un acte normatif qui établit l'appartenance d'une catégorie de biens au domaine public présume seulement leur affectation à un intérêt public, et non pas le titre de l'État ou des unités administratives-territoriales aussi[10].De la compréhension erronée de ce principe peut apparaître, dans la pratique, une multitude d'abus de l'administration, confirmés par des décisions judiciares: sous la protection du principe de la prééminence des prévisions constitutionnelles face à toutes autres règles de notre système juridique, on pourrait arriver à la conclusion (abusive) au sens que tout bien de ces catégories appartiendrait au domaine public même si un tiers peut en présenter un titre de propriété justificatif. Par exemple, dans l'hypothèse que le littoral avancerait de quelques dizaines ou centaines de mètres à l'intérieur de la terre ferme à la suite des actions naturelles de la Mer Noire, une administration de mauvaise foi pourrait soutenir que les parcelles de terrain à proximité de la mer et sur lesquelles celle-ci a apporté du sable appartiennent de droit au domaine public et, par conséquent, l'administration ne doit rien au particulier qui, de cette façon, se voit purement et simplement spolié de son bien. En réalité, par ce changement de l'état de fait, l'administration acquiert seulement le droit d'exproprier les parcelles qui constituent le nouveau littoral.
b) L'hypothèse où l'administration abuse de sa prérogative de classement/ déclassement. Pendant les derniers vingt ans, soit par ignorance, soit par mauvaise foi, ont pu être identifiées de nombreuses situations dans lesquelles l'administration a eu l'intention de passer un bien du domaine public dans le domaine privé ou vice versa, sans que derrière cette mesure il y ait une affectation/ désaffectation effective du bien en question. En d'autres mots, l'administration a pris cette mesure dans un autre but: d'habitude, une aliénation ou une rétrocession ultérieure à un tiers (dans le cas du déclassement), respectivement afin d'éviter une exécution forcée (dans le cas du classement). Il s'agissait en fait d'une mesure artificielle, et la seule solution à portée du particulier qui se considère lésé de cette façon dans ses droits ou intérêts légitimes est l'action en contencieux administratif en raison des dispositions des articles 8 alin. 2 et 10 alin. 3 de la Loi nº 213/1998 concernant les biens propriété publique[11]. Cependant, là encore il risque que les instances rejettent l'action en raison du fait que le passage d'un bien du domaine privé dans le domaine public ou l'inverse est un attribut discrétionnaire de l'administration que les instances ne peuvent censurer[12], solution qui, appliquée de plano, est évidemment illégale, étant contraire premièrement au texte des articles 8 alin. 2 et 10 alin. 3 de la Loi nº 213/1998 qui prévoit expressément cette possibilité du particulier concerné. Il existe en effet une certaine dose de vérité dans cette orientation jurisprudentielle, mais on doit souligner une distinction subtile: les instances ne peuvent censurer la volonté de l'administration de passer un bien dans le domaine public (pour une cause évidente d'utilité publique), en préférant la solution qui consiste à garder le bien dans le domaine privé en raison du fait que l'intérêt d'un particulier irait dans ce sens, mais elles peuvent censurer l'absence de la cause de l'utilité publique. Autrement dit, la cause illicite de l'acte administratif peut toujours être censurée par l'instance de contencieux, mais non l'appréciation au sujet des différentes situations d'utilité publique possibles[13].
B. Affectation, inaliénabilité et incohérence 1.Prémisses En général, l'inaliénabilité est considérée comme le gardien de l'affectation. Aucun bien ne peut être considéré inaliénable qu'en considération du fait qu'il est affecté à une cause d'utilité publique, et cela mérite une protection qui ne pourrait lui être assurée au cas où le bien circulerait librement dans le circuit civil, sans aucune restriction. En ce qui concerne les rapports entre l'affectation et l'inaliénabilité[14], on peut adopter l'une des deux grandes conceptions de celle-ci: la première, celle française, selon laquelle lebienmêmeestinaliénable. Cette conception part de la prémisse qu'un bien affecté à une utilité publique ne peut être protégé avec efficacité que s'il se trouve aux mains de l'administration publique. Aussi, dans ce système, la propriété affectée à une utilité publique ne peut pas être privée. La seconde, la conception allemande, part de la prémisse qu'on peut distinguer le bien regardé dans sa matérialité et son affectation d'utilité publique et seule la dernière doit être protégée d'inaliénabilité. Par conséquent, le bien en soi peut être la propriété privée d'un particulier, mais il sera toujours grévé d'une servitude d'utilité publique[15]. De toute façon, ce que les deux conceptions diamétralement opposées ont en commun c'est l'idée qu'ilnepeutexisterd'inaliénabilitésansaffectation. Peu importe si seule cette affectation ou le bien en soi est protégé par l'idée de l'inaliénabilité, en l'absence de celle-ci tout bien doit faire, obligatoirement, l'objet du circuit civil. Dans ce domaine nous allons mettre en évidence trois situations d'incohérence législative (qui détermine ultérieurement une activité administrative dépourvue de repères théoriques): la première, en matière d'application de la Loi nº 10/2001 concernant les rétrocessions des immeubles confisqués abusivement par l'État communiste (a), la deuxième en matière d'application de la Loi nº 18/1991 du fonds foncier (b); enfin, la troisième, en matière d'habitations à statut spécial (c).
a) Incohérence dans la façon d'appliquer la Loi nº 10/2001. Ainsi que nous l'avons montré à une autre occasion[16], apparemment sans un critère unique de différenciation, dans certaines hypothèses où les biens confisqués abusivement par l'État roumain pendant la période 1948-1989 étaient affectés à une utilité publique, ils devaient être rétrocédés (voir ainsi l'art. 16 alin. 1 de la loi[17]), tandis que dans d'autres situations la restitution se fait obligatoirement en équivalent (voir l'art. 10 alin. 2 de la loi[18]). Comme nous l'avons montré aussi dans l'étude respective, le critère distinctif des deux situations a été, probablement, le degré de mutabilité de l'activité ou des services d'utilité publique hébergés par le bien dont la rétrocession était en question, avec les coûts afférents: dans le cas des bâtiments qui abritaient des institutions publiques, y compris des sièges d'ambassades et des consulats étrangers, c'était beaucoup plus facile de trouver de nouvelles locations pour les activités en question; en échange, déplacer des installations, les relais sous-terrains de transport d'électricité, d'énergie thérmique, etc., c'est, sinon impossible du point de vue technique, au moins extremêment coûteux[19]. À ce sujet, il faudrait faire encore une remarque intéressante, à savoir que, dans les deux situations distinctes, le législateur a appliqué les deux principes distincts en matière de relation entre l'affectation et l'inaliénabilité. Dans la première situation, seule l'affectation est inaliénable, et cette situation a un caractère temporaire (3, respectivement 5 ans conformément à l'alin. 1 de l'art. 16); dans la seconde, le bien même est inaliénable, puisque la rétrocession se fait en équivalent. Ces situations ne comportent plus de propositions pour de véritables solutions, étant donné que le phénomène des rétrocessions est en soi „épuisable", la Loi nº 10/2001 s'approchant de la fin de son application.
b) Incohérence dans la façon de concevoir l'application de la Loi nº 18/1991dufondsfoncier.Bien que de nombreux textes de loi on peut déduire l'idée que le législateur semble avoir compris les rapports corrects entre l'affectation et l'inaliénabilité, seuls les biens affectés à une utilité publique doivent être exceptés du principe de la reconstitution du droit de propriété sur les anciens emplacements, il existe un texte qui infirme cette conclusion. Ainsi, en conformité avec l'article 26 de la Loi nº 18/1991: „Les terrains situés dans la zone intra-muros des localités, restés à la disposition des autorités de l'administration publique locale, passent des personnes qui sont décédées et/ ou qui n'ont pas de successeurs dans la propriété publique des unités administratives-territoriales et dans l'administration des conseils locaux respectifs, sur la base du certificat de vacance successorale délivré par le notaire public. En ce sens, le secrétaire de l'unité administrative-territoriale a l'obligation que, dans un intervalle de 30 jours depuis l'enregistrement de chaque décès des personnes respectives, il communique à la chambre des notaires publics compétente les données prévues à l'art. 68 de la Loi des notaires publics et de l'activité notariale nº 36/1995, avec les modifications et les amendements ultérieurs, en vue du débat de la procédure successorale. La non-observance par le secrétaire de l'unité administrative-territoriale de l'obligation prévue par l'alinéa en question recevra une sanction administrative, en conformité avec la loi" [alin. (1)].
„La modification du régime juridique des terrains prévus à l'alin. (1) de propriété publique des unités administratives-territoriales respectives en propriété privée de celles-ci est interdite et frappée de nullité absolue." Le texte semble n'avoir aucune logique: non seulement un bien qui n'a aucune affectation d'utilité publique est inaliénable, faisant partie du domaine public local, mais on interdit aux autorités publiques locales de le désaffecter! Il semblerait ainsi que le législateur utilise l'inaliénabilité (conséquence de l'appartenance d'un bien au domaine public) dans un autre but que celui de protéger l'usage ou le service public, spécifique des biens domaniaux. Delegeferendanousproposons l'abrogation de ce texte de loi.
c) Incohérence législative dans l'établissement des rapports normaux entre le domaine public et le domaine privé. Nous avons découvert de telles situations dans l'analyse de la législation qui réglemente les habitations à régime spécial: sociales, d'intervention de fortune. Ainsi, selon notre opinion, il aurait été recommandable qu'un seul acte normatif les réglemente toutes, en établissant des principes communs ainsi que des traits distinctifs, dus au spécifique de chaque catégorie. Cependant, malheureusement, la vision du législateur n'est nullement conséquente sur plusieurs plans. Premièrement, apparemment sans aucune raison, l'une des catégories fait partie du domaine public local (les habitations sociales[20]) alors que les autres sont des biens relevant de la propriété privée, selon les prévisions de la Loi nº 114/1996 de l'habitation[21]. Deuxièmement, même certains biens appartenant à la propriété privée sont déclarés, étonnamment, par la loi, inaliénables (définitivement ou au moins temporairement). Ainsi, en conformité avec l'art. 54 alin. (3) de la Loi de l'habitation nº 114/1996, „Les habitations d'intervention/ de service ne peuvent être vendues aux locataires." De même, en conformité avec l'art. 53 alin. (4) de la loi, „Les habitations de service aménagées dans les conditions de la présente loi, financées du budget de l'Etat et des budgets locaux, peuvent être vendues dans les conditions de la loi, avec l'accord du Gouvernement, au cas où l'activité qui a générée l'aménagement des habitations en question a été restreinte ou a cessé." Normalement, ce type d'habitations devraient relever de la propriété publique, pour la simple raison qu'elles sont affectées à une utilité publique, même si elles ont reçu une utilisation privée[22].. Delegeferenda,l'option du législateur quant à ces types d'habitations devrait être repensée.
C. Expopriation et incohérence L'étude du comportement de l'administration en matière d'expropriation relève, d'après nos observations, au moins deux causes de l'incohérence de celle-ci: le manque aigu d'une infrastructure routière actuelle (1), respectivement l'actuelle crise économique (2). Nous allons les analyser à tour de rôle.
1. L'incohérence et la nécessité de développer l'infrastructure Au moment où elle a été adoptée, la Loi nº 33/1994 de l'expropriation pour cause d'utilité publique a manifesté un souci particulier pour la protection des droits des personnes concernées par l'expropriation, étant moins préoccupée par la protection de l'utilité publique en vue de laquelle va avoir lieu l'expropriation. Aussi, la Loi nº 33/1994 suscite-t-elle trop peu de problèmes de constitutionnalité[23], car le texte de l'art. 44 alin. 3 de la Constitution conformément auquel personne ne peut être exproprié que pour cause d'utilité publique, avec un dédommagement préalable juste, est rigoureusement observé, même dans son esprit. Le revers de cette générosité du législateur s'est fait sentir tout de suite: corroboré aussi avec le chaos qui existe en matière de reconstitution du droit de propriété réglementé par la Loi nº 18/1991 du fonds foncier, modifiée et amendée plusieurs fois jusqu'en 2009, les grands travaux d'utilité publique dont tout État a besoin (premièremement le développement de l'infrastructure) et qui supposent des expropriations considérables ont tardé excessivement. En fin de compte, le législateur a réagi en adoptant, successivement, la Loi nº 198/2004 concernant certaines mesures préalables aux travaux de construction d'autoroutes et de routes nationales[24], laquelle a subi une modification massive par la Loi nº 184/2008 pour la modification et l'amendement de la Loi nº 198/2004 concernant certaines mesures préalables aux travaux de construction d'autoroutes et de routes nationales[25]. Enfin, la Loi nº 255/2010 concernant l'expropriation pour cause d'utilité publique, nécessaire à la réalisation de certains objectifs d'intérêt national, départemental et local[26] modifiée y compris à la fin de l'année 2011 par la Loi nº 205/2011. Cependant cette réaction a généré plusieurs inconséquences sur plusieurs plans: a) Incohérences au niveau de l'établissement de la procédure d'expropriation à suivre dans une situation particulière. Pour une raison connue seulement par lui, le législateur a choisi d'intervenir en matière d'expropriation seulement au niveau de la procédure. En d'autres mots, la Loi nº 33/1994 est restée une sorte de „droit commun" en la matière, s'appliquant d'un côté à toutes les expropriations qui n'ont pas été prévues expressément par la législation spéciale (en ce qui concerne l'étape administrative) et, d'un autre côté, à toutes les expropriations en ce concerne l'étape judiciaire, avec certains éléments d'exception dans les cas des expropriations réglementées par la législation spéciale. Voilà donc le premier cas d'incohérence législative: quelle devrait être la raison pour laquelle dans certaines situations l'utilité publique réclame une certaine procédure, simplifiée et extrêmement rapide, alors que dans d'autres on se contente d'une procédure beaucoup plus difficile, fondamentalement différente? La question pourrait rester sans réponse.
b)Incohérences au niveau de l'établissement de l'instance compétente pour solutionner un différend en matière d'expropriation. Ainsique nous l'avons montré dans l'ouvrage cité[27], même la Loi nº 33/1994 concernant l'expropriation pour cause d'utilité publique a établi un partage de compétence entre la section de contencieux administratif de la Cour d'Appel et la section civile du Tribunal dont relève le bien, deux instances qui, apparemment, n'ont rien en commun. En partant de la mise en évidence d'une pratique non unitaire en ce qui concerne la compétence de la Cour d'Appel d'établir le taux des dédommagements, nous avons découvert que toute cette situation embrouillée en matière d'expropriation est provoquée par notre législateur qui a essayé d'adapter aux réalités présentes certaines prévisions de la Loi de l'expropriation pour cause d'utilité publique du 20 octobre 1864, en réalisant une mixture impossible à digérer dans le contexte actuel d'organisation de notre système juridique. Et comme si cela n'avait pas suffi, la nouvelle loi en la matière, la Loi nº 255/2010 disjoint la question du dédommagement de celle de la reprise forcée du bien exproprié, en établissant qu'il faut émettre deux actes juridiques distincts, la décision d'expropriation et l'ordre de paiement du dédommagement, chacun avec son régime juridique, y compris en ce qui concerne l'instance compétente de la censurer: ainsi, si la décision d'expropriation est considérée un acte administratif d'autorité (art. 9 alin. 2 de la loi) pouvant être attaquée, par conséquent, devant l'instance de contencieux administratif dans les conditions réglementées par l'art. 10 de la Loi nº 554/2004, la disposition d'octroi du dédommagement (dont la nature juridique, qui n'est pas précisée expressément par la loi, ne peut pas être différente) peut être attaquée dans la section civile du tribunal dont relève le bien (l'art. 22 de la loi). Apparemment, ce choix n'a aucune logique.
c) Incohérences législatives et jurisprudentielles concernant l'établissement des dédommagements. En premier lieu, au niveau législatif nous allons remarquer une superposition (un concours) de réglementations, ce qui constitue une source évidente de litiges indésirables. Ainsi, à l'étape administrative des expropriations pour la réalisation de l'infrastructure, l'évaluation des biens se fait globalement, selon l'art. 5 de la Loi nº 255/2010, pour tous les immeubles qui constituent le corridor d'expropriation, „sur la base d'un rapport d'évaluation rédigé en fonction des expertises réalisées et actualisées par les chambres des notaires publics". Cependant, si l'exproprié se considère endommagé par cette évaluation et qu'il s'adresse à l'instance, à l'étape judiciaire, le taux des dédommagements est établi en conformité avec les articles 25-27 de la Loi nº 33/1004, c'est-à-dire par une commission de trois experts qui établira la valeur de l'immeuble exproprié sur le marché "à la date de la rédaction du rapport d'expertise" (l'art. 26 alin. 2). À une analyse plus attentive, la situation semble sans issue, résultant de l'absence d'une réglementation unique en matière d'expropriation. Ainsi, d'une part, le dédommagement doit être juste et préalable (l'art. 44 alin. 3 de la Constitution). Pourtant, la procédure instituée par la Loi nº 255/2010 tient compte du fait que l'expropriation se fait par un acte administratif (la décision d'expropriation) qui ne peut faire son effet qu'après avoir consigné le dédommagement au nom des qui de droit, tandis que, en raison de la Loi nº 33/1994, l'expropriation étant faite par décision judiciaire, l'établissement du taux des dédommagements par expertise judiciaire respecte la prévision constitutionnelle car la rédaction de ce rapport est évidemment antérieure au prononcé de la décision en question. Par la combinaison des deux procédures on arrive cependant à une situation qui n'est pas permise: il est (apparemment) non seulement légal, mais aussi obligatoire que l'administration établisse les dédommagements par voie administrative avant d'émettre la décision d'expropriation et la disposition d'octroi des dédommagements.
En respectant la procédure, celui qui opère l'expropriation émet un acte légal. Mécontent du taux des dédommagements, l'exproprié conteste la disposition dans l'instance de sorte que celle-ci, en observant à son tour la loi, va administrer la preuve de l'expertise d'évaluation, l'objectif de la preuve en question étant celui d'évaluer le bien selon les critères établis par la Loi nº 33/1994, c'est-à-dire au moment de la rédaction du rapport d'expertise, un moment évidemment ultérieur à l'expropriation (laquelle, conformément à la loi spéciale, s'est déjà produite par l'emission de la décision d'expropriation). Or, il est évident que la valeur d'un immeuble peut être différente aux deux moments [28], cas où l'instance va annuler la disposition d'établissement des dédommagements même si, ainsi que nous l'avons déjà établi, celle-ci représentait un acte légal au moment de son émission. Voilà donc que, en dehors de la prévision constitutionnelle non observée, le concours de réglementations détermine aussi la non-observance d'un principe essentiel du droit, qui prévoit que la valabilité de tout acte juridique est appréciée au moment de son émission, toutes modifications ultérieures étant irrélevantes pour son légalité. Le même article 5 de la Loi nº 255/2010 contient deux autres raisons pour lesquelles la manière d'établir les dédommagements pourrait être considérée en contradiction avec l'esprit de la Constitution: par rapport à la manière d'établir les dédommagements (sur la base des expertises réalisées par les chambres des notaires publics), le dédommagement pourrait s'avérer injuste. Ainsi, comme nous l'avons montré à une autre occasion, surtout dans l'hypothèse des bâtiments, les finissages différents déterminent des prix différents, de sorte qu'une méthode de calcul par mètre carré appréciée globalement conduirait à des dédommagements injustes. D'autre part, même si les expertises entreprises par les chambres des notaires publics sont actualisées de temps à autre, il se pourrait qu'elles ne reflètent pas la réalité du marché immobilier à un moment donné, une sous-évaluation des immeubles étant tout aussi possible qu'une sur-évaluation. d) Solutions possibles. Le concours de réglementations représente donc la cause de toutes les incohérences signlées supra. Aussi, toute solution proposée doit-elle partir de la prémisse d'une nouvelle loi - unique - en matière d'expropriation, qui contienne les principes suivants:
i. Toutes les expropriations se déroulent selon une seule et même procédure. Ainsi, au cas où on procède à des expropriations massives (comme cela arriverait dans l'hypothèse du développement de l'infrastructure), l'utilité publique sera déclarée par la loi de sorte qu'on évite le contrôle en contencieux de la déclaration d'utilité publique[29], en raccourcissant ainsi la procédure d'expropriation. ii. Excepté le contrôle en contencieux de la déclaration d'utilité publique (lorsque celui-ci est possible), la section civile des Tribunaux a la pleine jurisdiction en matière d'expropriation. Ainsi, que ce soit la justice ou bien un acte administratif qui dispose à l'expropriation, dans la pratique, il est notoire que la quasi-majorité des litiges concernent le taux des dédommagements accordés. Or, dans cette situation, les instances de droit commun sont les plus appropriées pour solutionner ces litiges. D'autre part, il existe une tradition (illustrée par les prévisions de l'art 2 du Code de procédure civile) au sens d'une attribution de la compétence de solutionnement des litiges en matière d'expropriation en faveur des tribunaux civils; iii. La valeur du dédommagement doit être appréciée au moment de l'expropriation effective. Ainsi, qui que ce soit qui établisse le taux du dédommagement, celui-ci doit être établi à un moment très proche de celui de l'expropriation effective, de préférence avant celui-ci et sans tenir tenir compte du plus de valeur que le terrain a acquis justement à cause des travaux d'utilité publique[30]. Pourtant, si c'est l'administration qui établit initialement le taux du dédommagement, pour décourager une pratique qui consiste à établir un dédommagement très sous-évaluée par voie administrative, une prévision est nécessaire qui oblige l'administration à payer des intérêts légaux (ou même d'autres intérêts établis au niveau d'intérêts bancaires) pour tout l'intervalle entre le paiement du dédommagment initial et du dédommagement final, établis par voie judiciare en fonction de la valeur réelle de l'immeuble exproprié sur le marché.
2. L'incohérence, les fonds publics et la crise économique Par hasard ou non, les situations d'incohérence en matière d'expropriation suivantes sont à mettre à leur tour en rapport avec l'extension de l'infrastructure routière. Pourtant, à l'encontre des situations signalées ci-dessus, le comportement incohérent de l'administration (et non pas du législateur ou des instances judiciaires) a été déterminé, au moins dans une certaine mesure, par les effets indésirables de l'actuelle crise économique. En ce qui nous concerne, nous avons identifié dans la pratique administrative deux cas d'attitude dépourvue de cohérence:
a) Le renoncement de l'adminstration au but d'utilité publique. Premièrement, nous devons remarquer que, bien que le phénomène fût possible aussi en ce qui concernait les expropriations justifiées par les dispositions de la Loi nº 33/1994, les effets indésirables sur le particulier n'étaient nullement les mêmes. Ainsi, dans une telle situation, seulement trois cas étaient possibles: soit les travaux d'utilité publique commençaient, et cela signifiait que le particulier avait déjà reçu la somme établie en guise de dédommagement, soit on déclarait l'utilité publique une année après (et alors on supposait que les intentions de l'administration étaient sérieuses et, en fin de compte, on démarrait la procédure effective d'expropriation), soit la déclaration d'utilité publique devenait caduque après une année et de cette façon le particulier visé par l'expropriation retrouvait pleinement son droit de propriété.
Mais la Loi nº 33/1994 ne comprenait aucune prévision qui limite l'exercice du droit de propriété privée pendant l'intervalle compris entre le moment de la publication de la déclaration d'utilité publique et celui de l'expropriation effective; il s'agissait ainsi seulement d'un impédiment de fait, car le propriétaire menacé d'une expropriation imminente n'avait aucune raison de commencer des travaux (de renovation, de nouvelles constructions, etc.) sur l'immeuble visé par l'expropriation et, d'autre part, personne n'était tenté d'acheter ce bien pendant cet intervalle de temps; par conséquent, pendant cette période, un tel immeuble n'avait aucune valeur marchande. En échange, en conformité avec l'article 30 de la Loi nº 255/2010, après que l'Office du cadastre a visé les documentations cadastrales des futurs travaux d'utilité publique, toute autorisation de construction (émise, bien sûr, au sujet des immeubles qui vont être expropriés, identifiables grâce à la documentation cadastrale en question) est frappée de nullité. Ainsi, dès que les indicateurs économiques des futurs travaux sont approuvés par une décision du gouvernement, les immeubles visés par l'expropriation sont pratiquement inutilisables pour des constructions, ce qui annule leur valeur sur le marché libre. Pour ne plus parler du fait que depuis le moment où les dédommagements sont affichés, les biens en question sont pratiquement retirés du circuit civil, car tout acte juridique conclu à propos de celui-ci est nul (l'art. 29 de la loi). Et parfois, après une telle période d'immobilisation de ces immeubles, l'administration se ravise et abandonne le projet d'utilité publique. Telle est aussi la situation de la ceinture au nord du municipe Cluj-Napoca, dont les indicateurs technico-économiques ont été approuvés par l'arrêté gouvernemental nº 784/2009. Or, au début de l'année 2012, par manque de fonds, après avoir ajourné plusieurs fois le démarrage de la procédure de déclenchement des expropriations dans la région, le représentant de l'expropriateur, C.N.A.D.N.R S.A., a initié l'abrogation de cet arrêté. À supposer que ce sera la fin de l'objectif d'utilité publique, on se demande de quelle manière le particulier lésé dans ses droits par cette attitude incohérente de l'administration peut obtenir des dédommagements pour l'inutilité du bien finalement non exproprié. En ce qui nous concerne, nous croyons qu'une action pour un dédommagement justifié par cette inutilité (comme forme du préjudice causé) est pleinement admissible.
b) La superposition de plusieurs projets d'utilité publique. Le manque de communication au sein de l'administration publique peut mener à des situations d'incohérence. Par exemple, dans une espèce[31], ayant l'intention de réaliser une chaussée périphérique du Municipe Cluj-Napoca dans sa partie sud, le Conseil local a adopté un plan urbanistique de zone (PUZ) par lequel il réglementait du point de vue urbanistique tout le couloir de celle-ci et prévoyait le commencement des expropriations dans cette régoin (approuvé par la Décision du Conseil Local Cluj-Napoca nº 787/2007). Cependant, jusqu'en ce moment-ci, conformément à ce PUZ les terrains affectés par la variante du périphérique ont été déclarés inutilisables pour des travaux de construction (ce qui était, d'ailleurs, normal, pour éviter les dépenses inutiles autant de la part des particuliers que des budgets publics). Selon les projets de la municipalité, le périphérique allait avoir deux bandes par sens et allait être raccordé dans divers points au réseau de rues du Municipe Cluj-Napoca. Cependant, ultérieurement, disposant d'autres fonds, beaucoup plus consistants, le Gouvernement est passé à l'élaboration d'un nouveau projet de périphérique, sur le même couloir: le projet d'une autoroute urbaine à trois bandes par sens, les autorités centrales informant les autorités locales que le projet de ces dernières „n'est plus d'actualité". Cette superposition des deux projets d'utilité publique a généré une situation incertaine qui a affecté la substance du droit de propriété sur les terrains de la zone concernée par les expropriations, situation qui pourrait être résumée comme suit: d'une part, on ne pouvait entreprendre de travaux de construction sur ces terrains ni vendre ces terrains; d'autre part, pour l'instant, on ne passait pas à l' expropriation, étant donné que le projet des autorités centrales n'était pas finalisé, que le Ministère des Transports et de l'Infrastructure ne s'était pas prononcé quant à l'opportunité de celui-ci (vu que le rapport entre les bénéfices de ce projet et les coûts qu'il supposait ne pouvait être apprécié qu'une fois le projet achevé); enfin, cette situation tendait à se perpétuer. Dans ces conditions, la Cour d'Appel de Cluj, par deux décisions extrêmement courageuses[32], d'une part a annulé le PUZ réalisé par les autorités publiques locales surtout parce que le projet était trop vague et trop ambiguu, et, d'autre part, a obligé les autorités centrales compétentes à finaliser le projet d'utilité publique et à se prononcer sur l'opportunité de celui-ci, en établissant des délais dans ce sens; enfin, les autorités publiques locales ont été obligées de réglementer de nouveau la zone en question du point de vue urbanistique, en fonction de l'existence ou de l'inexistence de la nouvelle autoroute urbaine. Ce qui arrivera à l'avenir reste à voir.
c) Les solutions pour que ces situations soient évitées sont évidentes. Il convient que l'administration calcule mieux ses mouvements, car tout retour en arrière est, à ce niveau, extrêmement coûteux. D'autre part, une meilleure collaboration des différentes autorités impliquées dans la même procédure ne peut être que bienvenue.
Brèveconclusion.Dans une des décisions de référence prononcées contre la Roumanie[33], la Cour de Strasbourg a utilisé une expression qui, du moins dans notre système de droit, a fait carrière: „l'incertitude - qu'elle soit législative, administrative, ou tenant aux pratiques appliquées par les autorités - est un facteur important qu'il faut prendre en compte pour apprécier la conduite de l'Etat." Ainsi, l'une des facettes du principe de la sécurité des rapports juridiques - la qualité du droit - prétend que les normes juridiques soient claires, lisibles, cohérentes, prédictibles; de même leur application par l'administration. L'absence de ces attributs détermine la violation du droit des membres de la société à la sécurité juridique et de pareilles situations doivent être évitées autant que possible.
[1] Cet article est le résultat du projet PNII - IDEI 921/2009, 2432/2008, intitulé "The inconsistency of the public authorities in capitalizing the State and local authorities' property", subventionné par le CNCSIS -UEFISCSU. * Chargé de cours, Faculté de Droit de l'UBB Cluj-Napoca; avocat, Barreau de Cluj; opodaru@law.ubbcluj.ro [2] Ov. Podaru, Dreptadministrativ.Dreptuladministrativalbunurilor,Ed. Hamangiu, Bucureşti, 2011. Ce volume a été à son tour un produit du projet IDEI indiqué ci-dessus. [3] Certes, ce sont seulement les principales situations de comportement incohérent que nous avons découvertes en analysant la question de la relation de l'administration avec les biens. Car certaines attitudes apparemment anormales, mais de moindre importance, se retrouvent partout dans la vie administrative. Cependant, si l'on nous permet un jeu de mots, une certaine dose d'anormalité caractérise toute normalité. [4] Ov. Podaru, op.cit.,nº 23 et 47. [5] Pour des détails, voir J. Morand-Deviller, Cours de droit administratif des biens, 3e éd., L.G.D.J., Paris, 2003, p. 41; Y. Gaudemet, Droit administratif des biens, 12e éd., L.G.D.J., Paris, 2002, p. 90-94 [6] Par déclassement intermédiaire on entend la situation où un bien domanial est déclassé seulement pour qu'ultérieurement il soit classé de nouveau comme un bien appartenant au domaine public, mais ayant une affectation différente. [7] Pour plus de détails sur cette notion, voir Y. Gaudemet, op.cit., p. 94 [8] Ainsi, seulement deux hypothèses sont possibles: soit le bien a été classé par erreur, soit l'administration a eu l'intention de sortir le bien de l'incidence des règles du circuit civil (par exemple: elle a essayé d'éviter une exécution forcée). [9] Delegeferendale remplacement de cette notion avec la notion de littoral (ou bord) de la Mer Noire pourrait être utile. D'une part, il est évident que tout le littoral de la Mer Noire doit faire partie du domaine public, et non seulement ces parties qui représentent des plages, car le droit de promenade (selon le terme utilisé dans la jurisprudence française) de toute personne doit être exercé librement le long de toute la côte maritime. D'autre part, il faut établir une largeur maximale de ce littoral à l'intérieur duquel les plages fassent obligatoirement partie du domaine public, de sorte que, si les autorités publiques n'ont pas de titre valable, elles soient obligées de paser à l'expropriation. [10] Dans le même sens, voir V. Stoica, Dreptcivil.Drepturilerealeprincipale,vol. I, Ed. Humanitas, Bucureşti, 2008, nr. 184; E. Chelaru, Administrareadomeniuluipublicşiadomeniuluiprivat,Ed. All Beck, Bucureşti, 2005, p. 54. Certes, parfois, ce titre est présumé de façon absolue, mais cette présomption résulte aussi de l'impossibilité de toute autre personne de justifier un droit de propriété sur les biens domaniaux en question. Par exemple, dans l'hypothèse des richesses d'intérêt du sous-sol ou des ressources naturelles de la mer territoriale et du plateau continental , il est évident que de par leur formation par voie naturelle elles deviennent la propriété de l'État roumain. [11] Publiée dans le Moniteur Officiel nº 448 du 24 novembre 1998. [12] En ce sens, voir, par exemple, l'opinion à part de la Cour d'Appel Oradea, la décision civile n º 976 du 18 novembre 2010 (non publiée). Certaines instances sont encore les adeptes de la vieille orientation (attribuée autrefois à „l'école de Cluj"), au sens que l'opportunité échappe au contrôle du pouvoir judiciaire (pour des détails à ce sujet voir D- Apostol-Tofan, Putereadiscreţionară şi excesul de putere al autorităţilor publice,Ed. All Beck, Bucureşti, 1999, passim; A. Iorgovan, Tratatdedreptadministrativ,vol. II, Ediţia 4, Ed. All Beck, Bucureşti, 2005, p. 41-52;Ov. Podaru, ŞcoaladelaBucureştivs.ŞcoaladelaCluj:războisaupseudo-conflict?Eseudesprevariileviziuniasupraoportunităţiiacteloradministrative(mitologiepentrujurişti) in StudiaIurisprudentia nr. 2/2009, accesible à http://studia.law.ubbcluj.ro/index.php. [13] Pour la notion de cause de l'acte administratif, voir G. Vedel, Essai sur la notion de causeendroitadministratif, thèse, Toulouse, 1934, passim; Ov. Podaru, Dreptadministrativ,vol.I,Actuladministrativ.Reperepentruoteoriealtfel,Ed. Hamangiu, Bucureşti, 2010,nr. 151-153. Dans la situation analysée, l'instance devrait rejeter une action en contencieux administratif par laquelle une personne solliciterait l'annulation d'une décision du conseil local par laquelle celui-ci a passé de son domaine privé dans le domaine public local afin de transformer l'aire dans une zone verte (parc public), en préférant cette solution à celle (tout aussi possible, mais probablement considérée inopportune) de la rétrocession envers le particulier, comme mesure réparatoire sous forme d'équivalent, en raison de la Loi nº 10/2001. [14] Pour une discussion extrêmement intéressante de cette question dans le droit français, à partir d'une espèce concrète, voir Capitant, Notă la C.E., 17 februarie 1933, Commune de Barran, Dalloz, 1933, p. 49; A. de Laubadère, Domanialité publique, propriété administrative et affectation, L.G.D.J., Paris, 1950, p. 6-10 [15] Dans ce système, si le bâtiment dans lequel le Gouvernement déroule son activité était la propriété privée d'un particulier, celui-ci serait obligé d'héberger perpétuellement l'autorité publique en question, son seul droit étant de percevoir un loyer. Ainsi, l'usaged'utilitépubliquerevienttoujoursàl'administration, la propriété pouvant être cependant privée étant affectée par cette servitude perpétuelle. [16] Pour des détails, voir Ov. Podaru, Afecţaţiunea,cauzădeinadmisibilitatea acţiunii în revendicare a imobilelor preluate în mod abuziv de către regimul comunist?,in Studia iurisprudentia, nr. 4/2010, http://studia.law.ubbcluj.ro/articol.php?articolId=362 [17] En conformité avec celui-ci, „Dans le cas des immeubles ayant les destinations mentionnées dans l'annexe nº 2 lett.. a) qui fait partie intégrante de la présente loi, nécessaires et affectés inconditionnellement et exclusivement aux activités d'intérêt public, d'enseignement, de santé ou socio-culturelles, on restitue l'immeuble auxancienspropriétairesou,selonlecas,àleurssuccesseurs,avecl'obligationdemaintenirsonaffectation pourunepériode allant jusqu'à 3 ans, pour ce qui vient d'être montré aux points 3 et 4 de l'annexe nº 2 lett. a) ou, selon le cas, jusqu'à 5 ans depuis l'émission de la décision ou de l'arrêté, pour ce qui vient d'être montré aux points 1 et 2 de l'annexe n º 2 lett. a)". [18] Selon ce texte de loi, „Aucasoùsurlesterrainssurlesquelsilyavaitdesimmeublesconfisquésabusivementontétéédifiésdenouveauxbâtiments,autorisés,lapersonneendroitobtiendralarestitutionennaturedelapartiedeterrainrestéelibre,etpourlasuperficieoccupéeparlesnouveauxbâtiments,celleaffectéeauxservitudeslégalesetàd'autresaménagementsd'utilitépubliquedeslocalitésurbainesetrurales, lesmesuresréparatoiressontétabliesenéquivalent." [19] Certes, il y avait aussi une autre variante possible: celle de restituer en nature les immeubles en question, affectés d'une servitude administrative, celle du droit d'accès et d'intervention aux utilités en question, pour leur entretien ou en cas de dégât. [20] Voir en ce sens le point III.6 de l'annexe à la Loi nº 213/1998 concernant les biens propriété publique. [21] Publiée dans le Moniteur Officiel nº 254 du 21 octobre 1996. [22] L'idée d'affectation comme base de l'inaliénabilité est cependant visible, en ce qui concerne les habitations de service, même dans le texte de loi cité: celles-ci peuvent être aliénées si l'activité qui a généré l'aménagement des habitations en question a cessé (l'idée de désaffectation). [23] Pour des détails sur l'inconstitutionnalité de l'art. 2 de la loi, quant à l'impossibilité d'exproprier le domaine public de l'État, voir Ov. Podaru, Dreptuladministrativalbunurilor,op.cit.,nr. 153. [24] Le Moniteur Officiel nº 487 du 31 mai 2004. [25] Le Moniteur Officiel nº 740 du 31 octobre 2008. [26] Le Moniteur Officiel nº 853 du 20 décembre 2010. [27] Ov. Podaru, Dreptuladministrativalbunurilor,op.cit., nr. 167-174. [28] Ainsi, d'une part, la valeur pourrait augmenter justement à cause des travaux d'utilité publique; d'autre part, l'expertise judiciaire pourrait être administrée/ readministrée en appel, ou lors du second cycle processuel (après une possible cassation), de sorte qu'il se pourrait que plusieurs années passent entre les deux évaluations, ce qui ferait que la seconde diffère évidemment beaucoup de la première. [29] De toute façon, dans de tels cas, vu la situation actuelle de notre infrastructure routière et féroviaire, on ne pourrait nier l'utilité publique de tels travaux. [30] Ainsi, l'expropriation pour cause d'utilité publique d'une part crée une plus-value pour le propriétaire, et d'autre part, elle le prive de son droit de propriété. Or, dans ces conditions, il est normal que le particulier obtienne seulement ce qu'il a perdu en faveur de l'expropriateur, mais pas le plus que ce dernier lui a créé.
[31] Pour des détails, voir aussi Ov. Podaru, Noţiuneadeoperaţiune administrativă complexă,Notăla dec. civ. nr. 420/2010 a Curţii de Apel Cluj s.c.c.a.f., în CJ nr. 6/2011, p. 326-330. [32] La Cour d'Appel de Cluj, s.com.c.a.f., déc. civ. nr. 420/2010 (precitată), respectivement déc. civ. nr. 1583/2010 (non publiée). [33] Il s'agit de la décision du Conseil Européen des Droits de l'Homme PădurarucontrelaRomânia(le Moniteur Officiel nº 514 du 14 juin 2006), par. 92. Cependant, on trouve une idée semblable aussi dans une décision antérieure de la Cour, BroniowskicontrelaPologne (par. 151).
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