Numărul 2 / 2007

 

 

LA DEFENSE DES DROITS DE GROUPE ET DES DROITS COLLECTIFS DANS LA RESPONSABILITE CIVILE DE L'ETAT EN DROIT COLOMBIEN

Juan Carlos HENAO*

 

 

Rezumat : Apărarea drepturilor de grup şi a  drepturilor colective în răspunderea civilă a statului copnform dreptului colombian. Rândurile de mai jos se doresc o prezentare a uneia din contribuţiile majore ale Constituţiei Columbiei din 1991, dezvoltată prin Legea nr. 472/1998, ce a modernizat ansamblul drepturilor colective şî de grup, cu exemple jurisprudenţiale remarcabile în domeniul dreptului comparat şi repercusiuni importante asupra modelului apărării drepturilor în Columbia.

 

 

Le présent écrit[1] entend faire une présentation de l'un des apports majeurs de la Constitution colombienne de 1991, développé par la loi 472 de 1998, qui a servi à rénover le dispositif des droits collectifs et de groupe, avec des exemples jurisprudentiels remarquables dans le domaine du droit comparé et des répercussions importantes sur le modèle de la défense des droits en Colombie.

Présent de longue date en droit comparé[2], ce thème n'a cependant, comme on le verra, été introduit dans la pratique que très récemment dans notre milieu. Peut-être y a-t-il derrière cette réalité un triste reflet de nos cultures: une conception égocentrique a fait que, historiquement, la responsabilité civile a davantage contribué à défendre les patrimoines individuels et égoïstes que les droits appartenant à la collectivité. C'est un autre reflet de notre idiosyncrasie, qui trouve dans la responsabilité civile son propre miroir.

On ne veut pas dire avec ce qui précède que la responsabilité civile doive se désintéresser des actions qui tendent à protéger les patrimoines individuels, ce qui est l'hypothèse classique depuis des siècles et des millénaires. On veut simplement faire remarquer que, malgré le fait qu'il soit égoïste, l'être humain ne peut être seulement cela et que, par conséquent, il ne doit pas être conçu uniquement dans une perspective individualiste. Son aspect social, dont nous portons tous la marque du simple fait de notre existence, doit se refléter dans notre conception du monde, et donc dans la manière dont opèrent le droit et la responsabilité civile. De là l'importance de l'étude de la défense des droits collectifs et de groupe.

Si la responsabilité civile a pour but d'apporter à la victime réparation pour un dommage indemnisable, alors, après avoir précisé l'existence du dommage - tout court - et son imputation à une personne différente de la victime - qui pourra devoir le réparer -, la protection des droits collectifs qui peuvent aussi être enfreints doit rester dans le champ de la réparation, sous son égide. S'il n'en était pas ainsi, la protection juridique de l'être humain serait réduite aux droits "à dominante individuelle" et l'on serait privé de la possibilité de veiller sur les droits de type collectif et de groupe qui lui sont également inhérents.

On part donc du principe que chaque fois qu'une lésion atteint un droit collectif ou de groupe, une action judiciaire doit être engagée. On peut restreindre l'accès à ces droits, mais celui-ci ne peut jamais être refusé, car un tel refus serait inconstitutionnel et supprimerait la possibilité de défendre ces droits. Refuser la participation des citoyens et affirmer que seul l'Etat peut veiller sur ces droits paraît aujourd'hui abusif, car même dans les systèmes où la légitimation est restreinte dans le procès, quelqu'un, association ou non, groupe ou non, Etat ou non, aura le droit - et parfois l'obligation - de faire valoir ces droits collectifs. Le fait qu'il existe ou non une légitimation populaire dans le procès, c'est-à-dire une action (acción) populaire, est le résultat du choix politique d'un système, qui, de toute façon, ne peut permettre que soit établi le principe en vertu duquel un dommage indemnisable ne donne pas le droit d'engager une action civile. L'existence de différents degrés dans les démocraties participatives - la Colombie se trouvant à l'une des extrémités de l'échelle quand elle est définie, à l'article 1 de sa Constitution Politique, comme une république "démocratique, participative et pluraliste" - ne permet pas que soit exclue toute forme de participation des citoyens dans le domaine des droits collectifs. Le degré et la forme de participation démocratique pour la défense des intérêts qui nous concernent tous peuvent changer par des décisions politiques, mais on ne pourra jamais refuser le droit à engager une action. En effet, il serait inconcevable, par exemple, que le législateur affirme que pour la défense de l'environnement, l'action civile de dédommagement est proscrite, car cela violerait le droit d'accès à la justice.

Une fois qu'il est établi qu'en cas de survenance d'un dommage collectif indemnisable la légitimation de la cause doit exister, nous devons aussi préciser dans cette introduction que les limites de l'action propre à sa défense, à savoir l'action populaire, sont fixées par la revendication présentée lors du procès. A la différence du schéma des contentieux administratifs, qui classe les actions selon la source du dommage (acte, omission, fait administratif, voie de fait, etc.), on estime plus approprié de les classer selon ce qui est demandé au procès. En effet, « les actions (sont classées) en fonction du préjudice qu'elles réparent. Si l'action répare un préjudice commun à tous les membres du groupe alors l'action sera collective. Au contraire, si l'action ne répare qu'un préjudice distinct et particulier, elle sera une action personnelle »[3]. Indépendamment de la portée des concepts en jeu dans la citation précédente - groupe, droit collectif, action collective, préjudices particuliers, etc. - qui sera précisée, il vaut la peine de remarquer que, selon le type de dommages et intérêts réclamés, il existe différentes actions. Ce critère est utile pour ce que cet écrit cherche à montrer, car bien qu'il ne disqualifie pas la position d'après laquelle les actions en justice sont classées en fonction de la cause des dommages, il est jugé plus important et plus clair de le faire du point de vue du genre de dommage qui est causé et, par conséquent, du type d'indemnisation qui est demandé. Le problème est donc très simple: si l'on entend protéger un droit de type "individuel", il y a la demande classique, "égoïste" ou "pour soi"; si la demande est faite au nom d'un droit collectif tel que le comprend la loi colombienne - qui sera étudié plus loin -, il y a l'action populaire; si la demande vise la protection d'un groupe, il y a l'action de groupe. On notera que selon cette classification, le droit qui protège la sphère essentiellement individuelle d'une personne physique ou morale est la demande pour soi; au contraire, seront des actions collectives celles qui visent à défendre des droits appartenant au "commun des mortels", à "tout le monde"; enfin, on trouvera les droits de groupe et leur action correspondante à un stade intermédiaire entre les deux précédents.

D'après les critères généraux exposés, nous devons constater que le constitutionnalisme latino-américain est un exemple de l'intérêt qu'il y a à prévoir des mécanismes qui permettent de défendre les droits collectifs et les droits de groupe. La Colombie baigne dans cette "mode" récente du constitutionnalisme latino-américain. Cette "mode" est régie dans certains pays de manière expresse et dans d'autres de manière tacite, comme le montrent les constitutions ou réformes constitutionnelles fréquentes et nouvelles des années 90 en Amérique latine. Ainsi, pour ne prendre qu'un exemple, en ce qui concerne les références expresses, la Colombie, comme on l'expliquera plus en détail, a des normes constitutionnelles spécifiques qui ont été élaborées par la loi. Le Brésil, à l'article 5°-LXII de sa Constitution, autorise expressément l'action populaire « cherchant à annuler un acte préjudiciable au patrimoine public... à l'environnement... »; la constitution argentine permet à "toute personne" d'engager une action de recours « contre toute forme de discrimination et en ce qui concerne les droits protégeant l'environnement, la concurrence, l'usager et le consommateur, ainsi que les droits ayant une incidence collective générale » (art. 43); la Constitution vénézuélienne prévoit à son article 26 que « toute personne a un droit d'accès aux institutions de la justice pour faire valoir ses droits et intérêts, y compris ceux qui sont collectifs ou diffus (...)»[4]. En ce qui concerne les références tacites, la Constitution chilienne, par exemple, stipule dans son l'article 19-8 que toute personne a « le droit de vivre dans un environnement non pollué », et qu'il est du devoir de l'Etat de veiller à ce que ce droit ne soit pas enfreint et d'assurer la préservation de la nature ». Il en va de même pour l'article 86 de la Constitution équatorienne, qui fait en outre expressément référence aux mécanismes de réparation et d'indemnisation des consommateurs (art. 92).

Garantir l'indemnisation de la transgression des droits collectifs et de groupe est inhérent, quand l'infraction provient de l'Etat, à la nécessité pour ce dernier de plaider sa responsabilité civile pour soutenir et défendre l'Etat de droit. Cette position a été fermement réglementée dans tous les pays d'Amérique latine: en Colombie (art. 90 C.P.), au Chili (art. 38 C.P.), en Equateur (art. 20 C.P.), à Cuba (art. 26 C.P.), au Salvador (art. 245 C.P.), au Honduras (art. 324 et 327 de la C.P.), au Paraguay (art. 39 C.P.), en Uruguay (art. 24 C.P.) et au Venezuela (art. 30 et 140 de la C.P.).

Il s'agit donc d'un thème solidement étayé sur le plan constitutionnel. Sans oser nous prononcer sur son développement réel dans chaque pays, nous pouvons par contre estimer qu'il a et aura dans l'avenir proche un champ d'application important, comme le montre l'exemple colombien. En effet, la Colombie est, dans le contexte latino-américain, le pays qui bénéficie du plus grand développement législatif et jurisprudentiel sur ce thème[5]. Tenter de le présenter de manière analytique est donc utile pour l'avenir de ces droits dans le cadre colombien. Dans cette optique, on présentera dans une première partie la défense des droits de groupe (I), ensuite celle des droits collectifs (II), sans négliger de présenter dans une partie introductive la définition du droit collectif en Colombie.

Chapitre préliminaire: le concept de droit collectif et de groupe en Colombie

Les droits collectifs sont énoncés à l'article 88 de la Constitution[6] et développés par l'article 4 de la loi 472 de 1998[7]. On observe donc qu'autant la Constitution que la loi se sont chargées de définir expressément en 14 alinéas un plus grand nombre de droits collectifs, dans la mesure où les alinéas en expriment parfois plus d'un. A cette liste doivent être ajoutés ceux qui sont envisagés comme tels dans d'autres lois et dans les traités internationaux.

Conformément aux normes évoquées, dans laquelle la notion n'est pas définie, la jurisprudence a eu l'occasion d'affirmer que « l'intérêt collectif se constitue... comme un intérêt qui appartient à chacun des membres d'une collectivité déterminée et qui se concrétise à travers leur participation active auprès de l'administration judiciaire, en vue de sa protection »[8]. Le Conseil d'Etat a aussi eu l'occasion d'affirmer que ces droits « doivent avoir intrinsèquement la capacité à engager toute la société dans leur exercice (jugement AP-021 du 16 mars 2000) », parce qu'ils « répondent à l'urgence de satisfaire des besoins collectifs et sociaux, et qu'ils sont exercés par les membres de groupes humains de manière identique, uniforme et partagée (sentence AP-043 du 1er juin 2000) »[9]. Cette conception suppose que la notion de droit collectif va de pair avec la possibilité que son exercice soit présente dans l'esprit de n'importe quel membre de la communauté, et non pas parce que l'individu serait le titulaire direct et exclusif de ce droit mais parce que cet intérêt appartient à et identifie la communauté dont il fait partie. En ce sens, la défense judiciaire d'un droit collectif « ne suppose pas l'existence d'un véritable litis, car son but n'est pas de résoudre une controverse mais d'assurer l'effectivité d'un droit collectif en faisant cesser sa transgression ou la menace dont il est l'objet, ou en faisant en sorte que les choses reviennent à leur état antérieur si c'est possible »[10].

On peut ainsi affirmer qu'en Colombie le droit collectif est celui qui est défini comme tel par la norme juridique, dont l'exercice engage toute la société et dont la défense directe devant le juge est exercée au moyen de l'action populaire. Cette conception suppose que le droit collectif est un droit subjectif[11], en vertu duquel « toute personne du peuple, pour reprendre le langage du Code civil du XIXe siècle, dispose de l'action populaire pour exiger sa protection pour le bien de la communauté. Même si ce droit, répétons-le, n'appartient pas exclusivement à l'individu, il est par contre du pouvoir de ce dernier de veiller sur lui directement et en permanence.

En ce qui concerne les droits de groupe, la jurisprudence a eu l'occasion de préciser que son cadre de protection, bien qu'il puisse enfreindre des droits collectifs, est beaucoup plus large puisqu'il protège aussi des droits individuels classiques. Même si l'on protège des droits individuels ou collectifs dans l'action de groupe, l'important est que « ce n'est pas en fonction de la personne prise individuellement que le mécanisme est conçu, mais en pensant à la personne en tant que membre d'un groupe affecté par un dommage »[12]. C 'est ainsi que nous pouvons avancer que les droits de groupe sont les droits collectifs ou individuels, dont on ne jouit que dans la mesure où l'on appartient à un groupe. Autrement dit, comme l'affirme à juste titre le jugement précité, quand on est dans l'hypothèse d'une action de groupe répondant à une infraction à un droit collectif, ce droit, à la différence de ce qui se passe avec le droit similaire de l'action populaire, est "divisible": « dans le constitutionnalisme colombien, il y a une distinction importante entre intérêts ou droits collectifs et indivisibles, qui sont défendus par les actions populaires, et ceux que l'on pourrait appeler "les droits ou intérêts de groupe dont l'objet est divisible et individualisable", qui sont protégés précisément par les actions de groupe ». Cette dernière caractéristique, pour les affaires d'atteinte aux droits collectifs dans les actions de groupe, n'empêche pas de toute façon d'affirmer que quel que soit le type de droit enfreint, la possibilité qu'il puisse y avoir jouissance de ce dernier de façon isolée, sans que l'individu ait besoin d'appartenir au groupe dans lequel il est inséré, fait disparaître la notion de droits de groupe. On reviendra plus loin sur les éléments de cette définition.

Avant de commencer à développer le plan exposé, nous devons d'abord rappeler que la hiérarchisation des droits par génération opérée par la doctrine et la jurisprudence - hiérarchisation qui a été longuement expliquée au niveau universitaire - permet d'affirmer que « la nature des droits dont la protection est obtenue par le biais des actions consacrées à l'article 88 de la Constitution est celle des droits de troisième génération »[13]. Ceci pourrait être accepté à condition que soit ratifié que chacun des droits mentionnés dans le système normatif colombien est de troisième génération. Mais ce qui ne peut être accepté, c'est qu'en Colombie, même si l'on partage la position des spécialistes français en doctrine qui affirme que les droits mentionnés sont "proclamatoires" (après avoir réfuté avec raison la majeure partie de la doctrine qui ne leur accorde même pas le qualificatif de droit[14]), il soit affirmé que ces droits sont seulement "proclamatoires", car ce pays a déjà parcouru, par une décision politique de la constituante et du législateur, « le chemin qui doit mener aux droits collectifs », comme le souhaite le professeur Rousseau.

Venons-en donc à l'étude de chacune des formes d'expression des droits considérés.

1ère partie - La défense des droits de groupe en droit colombien

La défense de ces droits est garantie par l'exercice de l'action dite de groupe ou de classe, appelée class action dans le système anglo-saxon, dont elle est originaire.

Dans ce système, elle est définie comme « un moyen par lequel, là où il existe un large groupe de personnes impliquées dans une affaire, n'importe laquelle d'entre elles peut engager une procédure en représentant sa classe, sans qu'il soit besoin de réunir tous les membres du groupe. Il y a des conditions générales pour le déroulement de tout procès de classe. Il faut en premier lieu que les personnes qui constituent le groupe soient trop nombreuses pour être conduites au Tribunal, et que le nombre de représentants soit tel qu'il garantisse objectivement la représentation adéquate de l'ensemble de toutes ces personnes. En outre, il doit s'agir d'un groupe identifiable avec un intérêt commun sur les points de droit et de fait débattus, et qui concerne toutes les personnes à représenter"[15].

Aux Etats-Unis d'Amérique, la class action est régie par la Règle 23 de la Federal Rules of Civil Procedure (Fed. R. Civ. P.). Le bien-fondé de l'action exige que « les points communs de droit et de fait du groupe soient prédominants par rapport à ceux qui ne concernent que les membres individuels, et aussi que l'action de classe soit la plus propice à un jugement juste et efficace de la controverse comparé aux autres actions disponibles »[16]. Comme on le remarque, dans ce système, l'action vise non seulement à résoudre des points de droit et de fait communs à plusieurs revendications, mais aussi à l'efficacité de l'administration de la justice, en évitant de soumettre cette dernière à des procès multiples et usants. Les conditions requises, conformément à l'article 23.a de la Federal Rules of Civil Procedure évoquée, sont les suivantes: « (1) la classe doit être si nombreuse qu'il soit matériellement impossible de rassembler tous ses membres, (2) les points de droit et de fait doivent être communs à la classe, (3) les positions des deux parties doivent exprimer celles qui sont typiques de la classe, et (4) les représentants doivent protéger de manière claire et pertinente les intérêts de leur classe"[17].

Ces quatre conditions doivent, au dire des auteurs précités, se cumuler avec au moins un des trois énoncés du même article 23, alinéa b: que l'application de l'inconsistent standards class constate que des arrêts contradictoires seraient préjudiciables aux revendications de la classe, dans la mesure où ils modifieraient inévitablement les droits substantiels de ceux qui auraient les mêmes revendications, car cela pourrait épuiser la capacité à indemniser du responsable, de sorte qu'une décision unitaire est essentielle (23.b.1); que l'agissement ou l'abstention du défendeur soit commun aux revendications contenant des injunctions ou des déclarations pour dommages, sans que les indemnisations monétaires soient privilégiées (23.b.2); et que les déclarations communes en faveur de la classe priment sur les déclarations individuelles et soient meilleures que celles qui pourraient être présentées via d'autres procédures.

En accord avec le spécialiste en doctrine Louis Boré, qui faisait une synthèse de son exposé pour le relier à l'explication qui vient d'être donnée, la règle 23 « distingue en réalité trois class actions différentes »[18]. Dans la première (article 23.b.1), l'action ne peut être exercée que si en faisant droit aux différentes plaintes déposées par ou contre chacun des membres du groupe, on n'engendre pas deux risques. D'un côté, celui de décisions contradictoires ou divergentes à l'endroit des différents membres du groupe, ce qui crée pour la partie adverse des normes de conduite incompatibles. Cette hypothèse est seulement plaidée quand l'action vise à ce que soient déclarées des injunctions - de faire ou de ne pas faire -, qui n'impliquent pas d'indemnisations pécuniaires. De l'autre, des jugements qui auraient en pratique une incidence sur les intérêts d'autres personnes non protégées par la décision, ou qui affecteraient de façon sensible leurs intérêts ou mettraient ces personnes en difficulté pour les faire valoir. Cette dernière situation est plaidée pour les réparations pécuniaires, par exemple lorsque le responsable, ayant payé certains des membres du groupe, se retrouve sans argent pour payer les autres. Dans la seconde forme d'action (23.b.2), très utilisée pour faire déclarer des actions en injonction (injunctions) - comme empêcher des discriminations en matière de libertés publiques, dans la mesure où la partie perdante a agi ou cessé d'agir pour des motifs applicables à l'ensemble du groupe -, l'injunction ou la déclaration pour dommages doit protéger tout le groupe. Dans la troisième forme d'action (23.b.3), les points de droit ou de fait communs aux membres du groupe prédominent sur les aspects individuels, et l'action du groupe doit être meilleure et plus efficace que tout autre type de procédure. En différenciant les trois formes d'action de groupe antérieures, le spécialiste en doctrine soutient que dans les deux premiers types de class actions, qui correspondent pour l'essentiel à des class actions déclaratoires et à des actions en injonction, l'existence de points de droit ou de fait communs aux membres du groupe suffit à rendre l'action recevable. Au contraire, dans le troisième type de class action, « ...le législateur s'est ici montré plus exigeant car cette troisième catégorie a été élaborée lors de la réforme de la règle 23 en 1966, pour accueillir les class actions tendant à l'octroi de dommages-intérêts. Or, il est plus facile d'admettre qu'une seule personne agisse au nom de toutes les victimes d'une pollution pour obtenir la cessation de la source de la pollution, c'est-à-dire une injonction de faire ou ne pas faire, que d'admettre une telle action pour obtenir des indemnités au bénéfice de toutes les victimes (...) La class action en réparation est donc soumise à un régime plus strict que la class action en cessation ».

En droit colombien, l'action de groupe est réglementée par la loi 472 de 1998[19]. Son champ d'application est illimité dans la mesure où on peut plaider à propos de n'importe quelle activité de l'Etat ou même de particuliers. Elle s'exerce là où on plaide la satisfaction des conditions légales requises pour l'existence d'un groupe, comme on le verra plus loin, groupe qui, d'après la loi, doit comprendre au minimum 20 personnes, indépendamment du fait que ce nombre minimum soit protégé ou pas par le jugement[20]. Bien qu'il existe des normes qui réglementent l'action dans des domaines spécifiques[21], la nouvelle loi est d'application générale. Elle est caduque au bout de deux ans à compter de la survenance du dommage (article 47), et le groupe est représenté par le « défendeur (actor) ou toute personne faisant office de plaignant... sans que chacun des intéressés ait besoin d'engager séparément sa propre action ou de donner une procuration » (article 48). Les personnes qui font partie du groupe peuvent s'y joindre dès le dépôt de la plainte, pendant le procès ou même après le jugement. Dans cette dernière hypothèse, « le montant des indemnités ordonnées ne sera pas augmenté » (art. 55)[22].

En dépit de la consécration légale de l'action en droit colombien, la doctrine a critiqué[23] à juste titre ce texte de loi, qui a rendu son application incertaine et n'a pas saisi l'occasion historique de réglementer correctement l'article 88 de la Constitution.

C'est ainsi, par exemple, que la loi a prévu que l'action est exercée « exclusivement pour obtenir la reconnaissance des préjudices et le paiement des indemnités » (art. 3). On a ainsi été amené à se demander si cette action peut s'appliquer aussi, par exemple, dans les affaires où de nombreuses personnes confrontées à une clause abusive recherchent la nullité du contrat, ou même dans les affaires où l'on veut faire en sorte « qu'un nombre pluriel ou un ensemble de personnes puissent rendre effectifs des droits de prestation de service »[24], cas d'exercice qui n'ont pas été admis par la jurisprudence, laquelle interprète de manière erronée à notre avis ce précepte en soi confus. Nous partageons la préoccupation du professeur Tamayo Jaramillo quand il dit que « ce qu'une bonne législation doit exiger, c'est qu'il y ait une revendication commune fondée sur des conditions uniformes, sans qu'il soit nécessaire que vienne s'y mêler une indemnisation des préjudices »[25]. En effet, on estime que la loi a, en ce sens, commis une erreur grossière, provenant de son ignorance des schémas procéduraux étrangers. Mais cette erreur ne peut conduire à considérer, comme le fait le même professeur Tamayo, qu'« il est triste mais nécessaire de conclure que les actions de groupe ne peuvent être exercées que si elles ont pour objet l'indemnisation des préjudices », sauf si dans cette affirmation l'on interprète de manière large, comme on doit le faire, ce que signifie l'indemnisation des préjudices. Bien qu'une interprétation restrictive du texte de loi limiterait fortement l'action, on ne doit pas considérer pour autant, comme l'a fait le Conseil d'Etat colombien dans le jugement mentionné, que l'action n'est recevable que lorsqu'il s'agit d'indemnisations par équivalent monétaire.

On estime, au contraire, que l'indemnisation des dommages ne suppose pas nécessairement ni exclusivement l'indemnisation pécuniaire. Autrement dit, on ne devrait pas admettre, comme c'est le cas dans le jugement précité, que soient exclues du champ de l'action les plaintes qui visent, par exemple, le rétablissement d'un droit, celles qui demandent la nullité d'arrangements juridiques, ou encore celles qui sont déclaratoires d'obligations de faire ou de ne pas faire, car on oublie que toutes supposent d'indemniser la victime. Le problème réside donc dans le fait que l'on a interprété la loi de manière restrictive, en limitant le concept d'"indemnisation des préjudices" aux affaires se prêtant à une indemnisation par équivalent pécuniaire, ce qui est une erreur car l'indemnisation peut être aussi en nature (in natura), c'est-à­dire consister à rétablir le droit, ou encore à établir des obligations de faire qui n'ont pas nécessairement d'équivalent pécuniaire. Par chance, la Cour constitutionnelle a fait place, dans un prononcé récent, à la position défendue ici, en affirmant que « cette nature indemnitaire de l'action de groupe doit être interprétée par les opérateurs juridiques de façon large, à savoir que celle-ci couvre non seulement l'indemnisation par paiement d'un équivalent monétaire mais aussi, comme l'ont indiqué la doctrine et la pratique jurisprudentielle comparée, d'autres formes d'indemnisation, comme le rétablissement d'un droit en nature ou l'imposition d'obligations de faire qui n'ont pas d'équivalent pécuniaire strict mais qui permettent de rétablir et d'indemniser le droit enfreint »[26].

Mais cet aspect n'a pas été le seul à créer de la confusion. En effet, la rédaction de l'article 55, déjà cité, de la loi 472 suggère que la recevabilité de l'action de groupe est subordonnée à la violation d'un droit collectif. Cependant, la Cour constitutionnelle a précisé ce point quand elle a déclaré la constitutionnalité conditionnelle de l'article étudié, affirmant que: « les expressions associées à l'infraction aux droits et intérêts collectifs de l'article 55 de la loi 472 de 1998 ne pourront être comprises que conformément à la Charte Politique, dans la mesure où leur interprétation et application n'excluent pas les autres droits subjectifs d'origine constitutionnelle ou légale, quelle que soit leur nature, en tant que droits également défendables par les actions de classe ou de groupe, condition en vertu de laquelle sera déclarée leur applicabilité (exequibilidad) dans le dispositif de cet arrêt »[27]. Il n'est donc pas besoin de grands efforts d'interprétation pour remédier aux déficiences techniques de la rédaction de la loi et évacuer tout doute quant au fait que l'action de groupe n'est recevable que si un droit collectif a été préalablement enfreint, car cette action est instituée pour la transgression de n'importe quel type de droit susceptible d'être invoquée par le groupe: l'action peut être exercée quand un droit individuel est enfreint, pourvu que l'on jouisse de ce dernier en raison de son appartenance à un groupe. Cette position se fonde aussi sur une lecture mal avisée des articles cités 3 et 6 de la loi 472, qui ne font pas référence à la nécessité d'une violation de droits collectifs, si bien qu'il il faut comprendre que « l'action de groupe peut être intentée indépendamment du fait que le dommage est relié ou non à un droit ou un intérêt collectif »[28].

L'expression légale de "droits collectifs" qui apparaît à l'article 55 de la loi 472 ne signifie pas ce que ce concept exprime en droit colombien, et tout semble indiquer que les rédacteurs du texte ont été influencés par la signification qu'a ce concept en droit européen, et français en particulier, où l'on plaide les droits collectifs pour les associations, les syndicats, etc.[29]. Cet argument est suffisant pour critiquer la solution jurisprudentielle du jugement précité du 28 octobre 1999 du Conseil d'Etat Colombien, qui a exclu l'action de groupe parce que « de telles actions ne peuvent être exercées pour résoudre des conflits dans lesquels on discute de droits liés à des rapports professionnels, ainsi que le visent en l'occurrence les demandeurs qui veulent que soit ordonné d'inclure dans leur allocation de retraite ou leur pension la prime dite d'actualisation ». Cette position a été heureusement abandonnée, ayant été estimé qu'« un droit collectif, ou n'importe quel autre, peut être protégé au moyen de l'action de groupe »[30].

Les actions de groupe sont donc instituées, en droit colombien, pour l'indemnisation - au sens large - des dommages qui, tout en étant individuels, doivent avoir été subis en tant que membre d'un groupe d'au moins 20 personnes.

Néanmoins, il reste à savoir si la légitimation nécessaire pour agir dans le cadre de ce type d'action requiert exclusivement que soit réuni le minimum de vingt personnes exigé par la loi, ou si, au contraire, doivent être remplies des conditions supplémentaires. La jurisprudence colombienne a bâti une position en vertu de laquelle ce n'est pas seulement la pluralité des vingt plaignants qui assure le bien-fondé de l'action de groupe. Il a été déclaré à certaines occasions qu'il ne suffit pas de réunir le nombre de personnes exigé par la loi, mais que, eu égard au fait qu'il s'agit d'une procédure qui a été privilégiée par la constituante et le législateur, on doit avoir affaire à un dommage socialement significatif. C'est la raison pour laquelle, dans l'affaire où les 20 personnes exigées par la loi ont déposé une plainte pour préjudices subis lors d'un attentat terroriste, le Conseil d'Etat a rejeté l'action de groupe, car « pour que l'action soit recevable, il ne suffit pas qu'il y ait une accumulation subjective de revendications avec comme seule exigence que les sinistrés soient au moins 20. L'action de groupe se différencie aussi des autres actions réparatrices par la répercussion sociale du dommage, eu égard au nombre de sinistrés et à l'impact général engendré[31]. Dans d'autres décisions, complémentaires de la précédente, il a été précisé que le groupe doit exister antérieurement au fait qui a été cause du dommage pour que celui-ci puisse bénéficier de cette procédure privilégiée. Il est nécessaire par conséquent que le « groupe de personnes soit dans des conditions uniformes à l'égard de la cause du dommage, celle-ci étant comprise comme la situation commune où ces personnes ont été placées - ce qui permet de les identifier comme groupe avant la survenance du dommage - et à l'occasion de laquelle toutes subissent postérieurement un préjudice »[32]; ou, en d'autres termes, « qu'il doit exister une situation commune dans laquelle ont été placées certaines personnes avant la survenance du dommage »[33], d'où l'on déduit, comme l'affirme ce même jugement, que « ce n'est pas le dommage qui engendre le groupe ». La même argumentation a été utilisée pour rejeter la plainte d'un groupe formé à la suite d'un massacre qui a fait 119 morts et 114 blessés, à cause d'affrontements entre groupes de guérilleros et paramilitaires[34]. Si l'on affirme que cette dernière prise de position n'exclut pas la première, c'est parce qu'il est affirmé dans le jugement précité que c'est aussi l'"entité sociale" qui légitime le groupe, ce qui souligne que le dommage doit avoir un retentissement social dans la mesure où il a été causé à un groupe qui, parce qu'il existe antérieurement au dommage, a le privilège de l'action. Il ne s'agit donc pas simplement d'une accumulation de revendications, car s'il en était ainsi il faudrait traiter comme action de groupe tout processus de réparation directe concernant un minimum de 20 victimes, comme ce serait le cas avec la mort d'une personne causant un préjudice à 20 membres de sa famille.

Cela posé, on remarque que la jurisprudence colombienne cherche avec raison à différencier l'action de groupe de l'accumulation des revendications émanant de 20 personnes au minimum. Nous partageons cette intention, car nous considérons que la simple réunion de 20 personnes ne justifie pas l'action privilégiée de groupe. L'action de groupe n'est pas une action de réparation directe pour des "collectifs". Elle doit être quelque chose de plus que cela pour que le fait d'avoir créé une action spéciale ait un sens. Le dommage infligé à cet ensemble de personnes doit en effet avoir une « portée sociale » (entidad social), en vertu de quoi devront être pris en compte plusieurs facteurs dissemblables, comme l'énonce le jugement précité du 2 février 2001: d'après ce dernier, « la force sémantique du terme "groupe" doit avoir des implications juridiques particulières. Celles-ci ont été suggérées par la Cour Constitutionnelle[35] quand elle a affirmé que la pluralité de personnes affectées par le dommage que l'on entend réparer est une entité telle qu'elle doit être prise en charge de manière rapide et efficace; autrement dit, il doit s'agir d'un groupe qui a son importance dans l'activité sociale, économique, politique, universitaire - entre autres - du pays. De même, lorsque la Cour précise qu'avec l'action de groupe on entend protéger les intérêts de certaines fractions (sectores) de la population, elle indique que toutes les pluralités de personnes ne constituent pas forcément un groupe dont les membres ont légitimité à engager ces actions ».

Mais partir de cette prémisse pour conclure qu'en plus de la « portée sociale » du dommage le groupe doit préexister au dommage nous semble contraire à l'esprit de l'action. En d'autres termes, nous considérons qu'un groupe constituant une "entité sociale" peut se former avant, pendant ou après un dommage. Plusieurs arguments nous conduisent à soutenir cette affirmation.

En premier lieu, il faut relever que l'on ne trouve nulle part dans la loi l'exigence de la préexistence du groupe au dommage, idée qui a été plutôt le fruit des recherches jurisprudentielles pour arriver à définir le cadre de l'action. L'article 46 de la loi 472 se limite à affirmer que « le groupe sera composé d'au moins vingt (20) personnes », chiffre arbitraire qui aurait pu être 10 ou 200, surtout quand en droit comparé on n'exige pas un nombre pluriel déterminé. En second lieu, le fait que le même article exige que les vingt personnes doivent être dans des « conditions uniformes à l'égard d'une même cause à l'origine des préjudices individuels » et « à l'égard des éléments constitutifs de la responsabilité », ne suppose pas non plus la préexistence du groupe au dommage. On ne peut déduire du concept de « conditions uniformes à l'égard d'une même cause », établi par la loi, l'exigence que le groupe doive toujours être antérieur au dommage, sauf si l'on comprend que les « conditions communes » sont latentes avant le dommage et que les individus qui le subissent se regroupent parce qu'il apparaît. Autrement dit, on ne pourrait faire valoir, pour rejeter une action de groupe, le fait que ce dernier s'est constitué postérieurement au dommage, attendu que les conditions qui ont permis que le dommage se produise proviennent précisément de l'existence latente du groupe. Ainsi, par exemple, s'il existe une communauté menacée d'être déplacée en raison du climat de violence, que celle-ci l'est finalement, et que pour cette raison elle se regroupe pour demander une indemnisation au moyen de l'action de groupe, on ne devrait pas lui refuser l'exercice de l'action. Si l'on n'adoptait pas une telle interprétation, on anéantirait le concept d'"entité sociale" d'un groupe, tout dépendant du moment de la création du groupe. Nous partageons donc l'analyse sérieuse que fait le jugement précité de février 2001, au sens où il ne servirait à rien que la loi ait prévu que pour qu'un groupe existe on doive cumuler à la fois les « conditions uniformes à l'égard d'une même cause qui est à l'origine des préjudices individuels » et les « éléments constitutifs de la responsabilité »; mais l'on ne saurait en conclure que le premier aspect - qui, en effet, ne doit pas être la même chose que la notion de "fait dommageable" - doit être antérieur au dommage.

Les "conditions uniformes" ne supposent pas nécessairement l'existence du groupe en tant que tel, mais l'expression d'une vocation à former un groupe qui peut se concrétiser par l'existence du dommage. C'est donc dans cette optique que l'on critique la solution jurisprudentielle colombienne, car si les groupes se constituent et se consolident normalement avant les faits à l'origine des dommages, il peut y avoir des cas où il n'en va pas ainsi. Prenons l'exemple connu du mouvement des Mères de Mai en Argentine, qui se sont regroupées en raison des préjudices causés à leurs fils coupables de « subversion » durant la dictature. Pensons encore à une fraction de la population qui est attaquée inopinément dans son honneur par un fait dommageable, ce qui la fait réagir et se constituer en groupe. Rappelons qu'aux Etats-Unis d'Amérique, l'action a eu beaucoup d'importance face aux discriminations dans l'exercice des libertés publiques. Leur refuserait-on l'action de groupe? Rien ne permet de supposer que l'on en arriverait à une telle extrémité malgré le fait que la constitution du groupe soit postérieure à la mort des enfants des Mères de Mai ou au fait d'avoir subi un outrage, parce que l'on dénaturerait ainsi ce qui est essentiel dans la définition de cette action, à savoir "l'entité sociale" du groupe. Dans cet ordre d'idées, bien que le groupe préexiste normalement au dommage, il peut y avoir des cas où les groupes se constituent comme tels postérieurement à l'événement dommageable, ceux-ci n'existant auparavant qu'à l'état latent.

Cette citation de la doctrine est pertinente: "La notion de groupe latent désigne la situation d'un groupe inorganisé. Le groupe est latent en ce sens qu'il est en suspens. Il est possible d'identifier un ensemble de personnes que l'on peut fédérer sous un intérêt collectif, ce qui permet de parler d'un groupe: mais ce groupe n'est pas organisé, il n'est pas structuré. En particulier, il n'a pas de possibilité d'expression. L'état de groupe latent est préjudiciable aux membres de celui-ci. En effet, ils apparaissent isolés face aux agressions extérieures. L'intérêt qui les rassemble ne reçoit pas la protection qui serait la sienne si le groupe était structuré. Un certain courant doctrinal a ainsi mis en évidence la présence d'intérêts diffus, c'est-à-dire de prérogatives appartenant à un grand nombre d'individus dans la position d'un groupe latent. Leur état d'inorganisation leur interdit d'exercer et de défendre efficacement la plénitude de leurs attributions. Le passage de l'état de groupe latent à l'état de groupe structuré apparaît ainsi, du point de vue des membres du groupe, hautement souhaitable puisqu'il rendra effectives des prérogatives qui ne sont pour l'heure que potentielles. Cependant, paradoxalement, ce processus ne se fait pas spontanément. L'analyse sociologique des phénomènes collectifs a ainsi montré comment la latence est la situation normale des groupes (...) La structuration du groupe est la mobilisation et l'organisation des personnes que l'organisateur du groupe estime devoir appartenir à celui-ci. Ce travail commence tout d'abord par un effort de délimitation du groupe. Il faut ainsi identifier clairement ce qui fédère le groupe, c'est-à-dire faire connaître l'intérêt collectif du groupe. Dans le cas d'une association défendant une grande cause, c'est justement la cause dont il faut assurer la promotion. Mais ensuite, et c'est là le point qui nous intéresse le plus, il faut développer chez les personnes que l'on cherche à recruter, le sentiment qu'elles partagent l'intérêt du groupe, autrement dit qu'elles appartiennent au groupe. La structuration apparaît ainsi comme un processus de maturation psychologique, d'une forme de conscience identitaire. Pour reprendre une terminologie marxiste, il faut développer la conscience de classe. Ce travail est là aussi semé d'embûches »[36].

En s'appuyant sur la citation doctrinale précédente, la position jurisprudentielle colombienne qui fait de la constitution du groupe antérieure au dommage un élément essentiel à la définition de l'action, doit être dépassée. Il peut bien arriver que le groupe soit latent au moment où survient le dommage, et que lorsque ce dernier se présente il passe à l'état structuré. Dans cette hypothèse, l'action doit aussi être engagée, dans la mesure où les groupes peuvent apparaître spontanément selon que se présentent ou non les éléments fédérant les intérêts des individus. Dans ce contexte, l'élément central pour la définition du groupe résidera dans le fait que des individus ont des droits communs qui ont été enfreints et non pas seulement dans la somme des infractions aux droits individuels. C'est le cas de l'action de groupe d'une communauté menacée qui a été finalement massacrée: ce n'est pas la mort de chaque individu qui engendre l'action de groupe, mais l'état des intérêts communs en tant que communauté qui permet de plaider sa constitution comme groupe, raison pour laquelle nous sommes en désaccord avec le jugement du Conseil d'Etat précité. Avec ce critère, on rejette donc l'action de groupe intentée, par exemple, par 20 membres de la famille d'un mort, dans la mesure où les droits des 20 individus sont des droits qui ne sont pas associés à un groupe; et il en va de même pour le cas précité de la bombe terroriste. Par conséquent, l'action du groupe est, comme on l'a dit, intermédiaire entre l'action individuelle et l'action populaire. La position jurisprudentielle étudiée ne peut donc aller jusqu'à refuser qu'il puisse y avoir constitution de groupes du fait précisément de la violation faite aux droits communs aux individus qui forment le groupe et qui se réunissent postérieurement aux dommages.

La position défendue dans ce texte a été adoptée par une importante décision de la Cour constitutionnelle colombienne[37]. En effet, face à l'interprétation proposée par le Conseil d'Etat, consistant à exiger la préexistence du groupe au dommage, un citoyen a attaqué cette interprétation en invoquant son inconstitutionnalité. La Cour constitutionnelle, après avoir admis que l'interprétation de la juridiction des contentieux administratifs était plausible, dans la mesure où la loi 472 de 1998 lui faisait droit, décide de déclarer inapplicable (inexequible) une partie de la loi, pour arriver ainsi à la position en vertu de laquelle il n'est pas nécessaire que le groupe existe avant le dommage pour que l'action puisse être engagée.

La clarté de cette dernière position jurisprudentielle permettra donc une renaissance de l'action de groupe en Colombie, celle-ci pouvant être exercée tant pour les cas de groupes "fermés" que pour ceux de groupes "ouverts". La première hypothèse se présente dans les affaires où l'on connaît dès le début de la procédure les membres du groupe. Cette hypothèse est actuellement la plus utilisée en Colombie. La seconde hypothèse suppose que l'on ne peut connaître dès le début de la procédure le nombre des membres du groupe, même si on dispose des paramètres pour le déterminer[38], étant entendu que l'absence des éléments suffisants à cet égard entraîne le rejet de la plainte[39]. Il est à noter que ce qui a déjà été affirmé au sujet des groupes latents et des groupes structurés peut également être utile au propos ici développé, étant donné que les groupes structurés sont normalement fermés, à la différence des groupes latents. Quoique la délimitation du groupe soit exigée dans un cas comme dans l'autre, l'important est de souligner que dans les affaires impliquant des groupes "ouverts", la notification permettra à ceux qui le désirent d'être présents et, plus encore, que des jugements puissent être rendus alors que des membres du groupe n'ont même pas été informés de l'existence du procès. C'est pour cette raison qu'aux Etats-Unis d'Amérique « il existe deux modes différents de définition du groupe. Dans le système de l'"opt in", seules les personnes qui ont expressément manifesté leur volonté d'adhérer au groupe sont liées par le jugement rendu sur l'action du groupe. Dans ce cas, il n'existe aucune atteinte au droit d'agir en justice puisque chaque membre du groupe a exprimé sa volonté d'être partie au litige. Dans le système de l'"opt out", au contraire, seules les personnes qui ont expressément refusé d'être incluses dans le groupe défini par le tribunal ne seront pas liées par le jugement. On peut alors perdre son droit d'agir en justice pour protéger un droit sans même être au courant de l'existence d'un jugement statuant sur celui-ci"[40]. Cette distinction n'est pas envisagée en tant que telle par la loi colombienne, qui se limite à affirmer qu'en toute circonstance la notification prend effet « à travers un moyen de communication ou tout mécanisme efficace » (article 53). Cela n'empêche pas d'affirmer que pour les affaires de groupes "fermés" on doit rechercher une notification personnelle, tandis que pour celles de groupes "ouverts" on peut avoir recours aux mass media de la manière la plus efficace possible. Rappelons que « la règle générale est étant que puisque le plaignant représente tous les membres du groupe, ceux-ci ont, en principe, la qualité de parties et sont représentés par le demandeur, et ce qui sera décidé au procès aura des effets à l'égard de tous »[41]. On peut ainsi arriver à des hypothèses où le membre du groupe n'est même pas informé de l'existence du procès ou du jugement et peut néanmoins être lésé dans son droit. Cette situation a suscité des critiques à l'encontre du système de l'"opt out", dans la mesure où le principe de contradiction est violé du fait que le titulaire du droit n'aura pas la possibilité de se présenter au procès[42]. Autrement dit, avec l'action de groupe, on risque d'affaiblir le dispositif individuel des droits, et c'est pourquoi on estime qu'il est salutaire d'essayer par tous les moyens procéduraux de faire en sorte qu'il n'en soit pas ainsi, pour ne pas tomber dans l'hypothèse de l'exception de la chose jugée dans le cas où « il y aurait eu de graves erreurs dans la notification » (article 56 de la loi 472, alinéa b). En outre, dans cette interprétation, la logique des articles 55 et 56 de la loi 472 est respectée avec plus de difficulté.

Il est clair que l'un des éléments essentiels de l'action de groupe est que le jugement lie tous ses membres, à moins que ceux-ci ne se soient expressément exclus (art. 56). S'ils ne l'ont pas fait, le jugement liera tous ceux qui constituent le groupe (art. 55), de sorte que celui qui ne s'est pas rendu au procès verra son droit éteint (fenecido), parce que le jugement produit la chose jugée en ce qui concerne le défendeur, avec la circonstance aggravante que s'il se présente après le jugement, « il ne pourra pas invoquer des dommages extraordinaires ou exceptionnels pour obtenir une indemnisation plus importante, et il ne bénéficiera pas non plus de la condamnation aux dépens » (art. 55). Ce n'est pas qu'il soit considéré que le système de l'"opt out" engendre une violation des droits, entre autres parce que le principe de contradiction, quand il ne s'agit pas d'une affaire pénale, peut faire l'objet d'une limitation légale pour les plaignants, mais il y a indiscutablement le risque que la personne qui n'est pas informée des effets d'un jugement qui la protège soit lésée.

La logique de l'action de groupes "ouverts" est intéressante aussi dans une autre perspective: elle brise le tabou du caractère personnel du dommage comme condition de celui-ci parce qu'elle suppose que sont indemnisés des dommages dont on ne sait pas exactement quelles sont les personnes qui les ont subis individuellement. En effet, dans l'hypothèse où l'action de groupe est fondée pour des groupes ouverts et indéterminés, il peut bien arriver que certaines personnes qui bénéficient de l'indemnisation n'aient pas subi de préjudice. Prenons à titre d'illustration trois exemples tirés du droit comparé. Le premier, situé au Québec, est raconté dans les termes suivants par le spécialiste en doctrine Louis Boré: Dans l'arrêt "Viau c. Syndicat canadien de la fonction publique", le plaignant demandait 20 dollars de dommages et intérêts par usager, pour réparer le préjudice qui leur avait été causé par une grève des transports en commun, intervenue après quinze heures. Le tribunal a calculé qu'en moyenne, 52 310 passagers avaient emprunté ces transports après 15 heures pendant le mois de la grève. Il a multiplié 20 $ par 50 000 et a condamné le syndicat responsable de la grève illégale à un million de dollars de dommages-intérêts (...) Si le juge choisit la distribution collective, il peut ordonner l'exécution de toute mesure réparatrice de son choix, comme l'octroi de bons de rabais aux victimes, la réduction temporaire des prix du défendeur, la diminution du montant du prochain abonnement des membres du groupe, l'octroi du montant des indemnités à un organisme qui pourra en faire bénéficier les victimes. Ainsi, dans l'arrêt "Viau", le tribunal a ordonné au syndicat responsable de verser le million de dollars auquel il a été condamné à la société de transport en commun afin qu'en contrepartie, elle accorde un certain nombre de voyages gratuits à ses usagers »[43]. Le second cas, connu sous le nom d'affaire des Yellow Cabs à Los Angeles, est raconté comme suit par l'auteur dans un autre écrit: « dans l'affaire des taxis jaunes de Los Angeles qui avaient pratiqué une hausse illicite des tarifs, le juge a ordonné une baisse de prix équivalente à la hausse illégale, pendant la même période de temps. Cette solution se fondait sur le coût exorbitant qu'aurait demandé la recherche de l'identité de toutes les personnes qui avaient pris un de ces taxis pendant la période de la hausse illicite et l'impossibilité pour la plupart d'entre elles de prouver le montant du prix illicite qu'elles avaient dû payer, et sur l'idée que la plupart des clients de ces taxis étant des clients réguliers, ce seraient eux qui bénéficieraient de la baisse imposée"[44]. La troisième affaire, même si elle n'a pas donné lieu à une condamnation en faveur d'un groupe, étant donné qu'elle s'est déroulée sur le territoire français où ce genre d'action est quasi inexistant[45], permet néanmoins d'illustrer ce que nous cherchons à montrer ici: « Dans l'arrêt des vins "margnat", des bouteilles portant la mention de 150 centilitres contenaient en réalité 148, 6 centilitres. La quantité manquante représentait une valeur de 7 centimes et le producteur avait vendu 200 millions de bouteilles pendant quatre ans. Il avait donc réalisé un bénéfice illicite de 14 millions de francs »[46].

Il est à noter que dans ces affaires, les bénéficiaires de l'indemnisation ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux qui ont subi le dommage, car il peut bien arriver qu'un touriste récemment arrivé en ville profite de la déclaration de responsabilité, voyage à meilleur coût et consomme davantage de vin. Il apparaît donc un décalage entre celui qui subit le préjudice et celui qui bénéficie de son indemnisation, ce qui attente directement au caractère personnel du dommage. Ce genre d'affaires se présente avec ce que l'on appelle les "dommages minimaux" et qui donnent lieu à ce que l'on dénomme justement des "réparations fluides". Cependant, cette hypothèse dans laquelle l'indemnisation peut bénéficier à celui qui n'a pas subi le dommage a une portée spécifique qui ne doit pas susciter d'alarme vis-à-vis de la théorie générale du dommage: son champ d'action est seulement celui de l'action de classe, et à l'intérieur de cette dernière celui des actions dans lesquelles le groupe est "ouvert" ou "indéterminé". Cela signifie que c'est le groupe qui est titulaire du droit enfreint, groupe formé d'individus potentiels et variables et qui sera le bénéficiaire réel de l'indemnisation. De plus, il doit être tenu compte du fait que le droit de réclamation est utilisé par un individu qui, parce qu'il fait partie du groupe, peut le représenter, de sorte que le dommage continue d'avoir un caractère personnel, quoique, il faut le reconnaître, avec une autre forme d'expression. Le fait que l'indemnisation ne bénéficie pas individuellement à chaque personne ayant pris un taxi, emprunté les transports publics ou acheté une bouteille de vin provient de qu'il n'a pas été possible, en pratique, de faire bénéficier toutes les personnes de l'indemnisation, ce qui n'empêche pas que l'on puisse y parvenir, en théorie au moins.

Pour en finir avec les commentaires sur cette action en droit colombien, on doit remarquer qu'elle a également été admise pour la prévention des dommages éventuels, et pas seulement pour l'indemnisation des préjudices causés ou effectifs. Son domaine d'application a ainsi été élargi dans la mesure où on donne à la responsabilité civile une fonction plus complète, qui lui permet de réparer des dommages non encore réalisés mais qui sont en voie de l'être. C'est ainsi que dans le jugement du 24 août 2000, il a été accordé réparation aux propriétaires d'habitations mal construites, ce qui revient à adopter la position traditionnelle consistant à réparer les dommages réalisés; mais en même temps il a été ordonné de « prendre les mesures nécessaires et d'effectuer les travaux correctifs de drainage et de rétention suffisants pour arrêter les poussées du terrain liées au glissement qui se produit dans les quartiers »[47] contigus, ce qui assure une protection vis-à-vis d'un dommage imminent. Il faut insister sur le fait que cette fonction "préventive" concerne aussi la responsabilité civile, car face à la réduction des biens qui se produit du seul fait de la menace dont ils font l'objet et de sa répercussion sur la valeur des habitations, on empêche que cette dévalorisation s'aggrave.

Il faut donc rappeler que cette action est conçue pour des dommages qui, étant individuels et divisibles, doivent appartenir à un groupe pour pouvoir être indemnisés selon cette procédure. Comme on le verra dans ce qui suit, cette hypothèse est différente de celle de l'atteinte aux droits collectifs indivisibles.

2ème partie - La défense des droits collectifs en droit colombien

Comme on l'a déjà fait remarquer, il existe en Colombie des normes qui régissent sur un plan général la question des droits collectifs et de l'action populaire: l'article 88 de la Constitution Politique de 1991 et la loi 472 de 1998, qui l'a réglementée. Ces normes font de la Colombie un pays à la fois difficile à présenter et privilégié dans ce domaine, parce qu'il dispose de mécanismes légaux situés au-dessus de toute contestation pour ce qui est de la protection des droits collectifs et de la portée de la légitimation nécessaire pour agir en vue de les défendre. Tant la notion de droit collectif que celle d'action populaire sont manifestement ancrées dans ce système.

Pour arriver à bien comprendre le fonctionnement actuel des droits collectifs en Colombie, nous étudierons dans un premier temps la définition et l'objet de l'action populaire (2.A); on donnera ensuite quelques exemples de droits collectifs protégés (2.B), avant de terminer par l'analyse de la discussion relative à la préséance du droit collectif sur le droit individuel (2.C).

2.A. Définition et objet de l'action populaire

Les actions populaires sont définies par la loi comme les « moyens procéduraux destinés à protéger les droits et intérêts individuels », lesquels sont énumérés dans son article 4 cité plus haut. Elles peuvent être exercées par « toute personne physique ou juridique » - article 12 - sans qu'il existe de délai de caducité pour les engager[48], et elles le sont pour éviter les dommages éventuels (contingente), faire cesser le danger, la menace, la violation ou la transgression des droits ou intérêts collectifs, ou pour remettre les choses dans leur état antérieur quand c'est possible » (art. 2).

Du point de vue de la mise en œuvre de la loi, il a été retranché à cet important article une finalité supplémentaire pour laquelle était envisagée l'action populaire: celle d'« obtenir une indemnisation en faveur de l'Etat ». L'histoire est la suivante: le président de la République s'est opposé à ce projet de loi en invoquant son inconstitutionnalité, ce qui a déclenché la procédure prévue pour ce type de situation, procédure qui suppose que pour que la Cour constitutionnelle examine l'objection, il est nécessaire que les deux chambres du Congrès appuient celle-ci. Comme il n'en a pas été ainsi, seul le Sénat - et non la Chambre des représentants - ayant appuyé l'objection, la phrase citée a disparu du texte de loi[49]. Nous mentionnons ce fait parce qu'il illustre clairement l'idée que la notion de droit collectif est conçue de manière à favoriser des biens publics non pas parce qu'il s'agit de biens dont l'Etat est propriétaire mais dans la mesure où ceux-ci permettent aux citoyens de jouir de droits collectifs, même si ces deux réalités peuvent coïncider à un moment donné.

Cela posé, on peut affirmer à partir du texte en vigueur que l'action populaire a plusieurs buts, selon l'hypothèse normative utilisée: celle d'éviter, celle de faire cesser ou celle de remettre en l'état. Quand la norme use du terme « éviter », elle l'emploie seulement en ce qui concerne le « dommage éventuel », ce qui indique, attendu que pour ce dommage il y a seulement menace (article 2359 du Code civil), qu'« éviter le dommage éventuel » équivaut à « faire cesser le danger (ou) la menace »[50] pesant sur un droit collectif, mais n'équivaut pas à « faire cesser (sa) violation ou la transgression de ce dernier ». Quand on fait cesser une menace et que cet objectif est réalisé, c'est qu'il n'y a pas eu de violation ou de transgression. Le dommage n'a été qu'éventuel. Au contraire, quand on met fin à une violation ou à une atteinte il y a dommage tout court, et il s'agit d'arrêter la propagation de ses effets néfastes et/ou de restaurer ce qui correspond au dommage partiel qui s'est déjà réalisé. Si nous étions placés dans une spirale dont la dernière étape serait celle du dommage réalisé, ce qui serait l'hypothèse où l'on doit « restaurer » le droit collectif transgressé, nous devrions mettre en premier l'étape consistant à « éviter », et comme phase intermédiaire celle de « faire cesser ». C'est pourquoi on peut affirmer que l'action populaire a un aspect tant préventif que restitutoire[51].

Illustrons ces différentes hypothèses à l'aide de la jurisprudence.

La première hypothèse, de nature essentiellement préventive, se présente quand l'infraction au droit collectif ne s'est pas encore produite et n'est qu'éventuelle. Le juge devra constater qu'il y a une menace imminente pour le droit, en raison de faits ou d'actes de l'administration. Il doit établir que les faits dommageables imputés violeront à coup sûr le droit collectif et prendre les mesures appropriées pour que la violation ne se produise pas.

Cette situation se présente, par exemple, dans certaines affaires où sont en jeu le patrimoine public et la morale administrative. Pour cette hypothèse, la jurisprudence a précisé que « en ce qui concerne les atteintes au patrimoine public, le juge a des facultés de prévention et peut par conséquent adopter des mesures de protection transitoires ou définitives, qui ne peuvent être évaluées qu'en se référant au cas concret »[52]. C'est ce qui est arrivé avec le jugement précité, dans lequel, face à la plainte populaire mettant en cause un processus d'appel d'offres qui allait être lancé pour la privatisation des services publics d'une commune (municipio), et qui avait déjà été organisé par l'entremise d'une agence de conseil, le Conseil d'Etat a ordonné à la mairie et à l'entreprise publique de « suspendre immédiatement le processus de concession engagé par l'entreprise poursuivie, jusqu'à ce que soient adoptées les mesures permettant de prendre en compte les bilans et les comptes reflétant la situation financière réelle de l'entreprise et que soient ensuite définies, à partir de ces mêmes documents, les conditions d'une gestion d'entreprise garante d'une prestation efficace du service public d'adduction d'eau et des égouts ». Dans ces affaires, le juge considère que le droit collectif est ad portas ("au seuil") d'être enfreint et empêche son infraction imminente en ordonnant que soient prises les mesures appropriées pour que cesse la menace. Mais, répétons-le, le dommage ne va pas jusqu'à se produire, parce que le droit collectif n'est pas enfreint, ce qui implique que l'on ait affaire exclusivement à l'aspect préventif de l'action.

Avec la seconde hypothèse, dans laquelle on cherche à « faire cesser », le but est d'empêcher l'aggravation du dommage, sans que l'on exclue de remettre en l'état ce qui correspond à la partie du dommage qui est déjà réalisée. Dans ce cas, par définition, la violation du droit doit déjà avoir commencé. Dans cette hypothèse, il y a, comme on l'a dit, une fonction tant préventive que restitutoire. La première vise à empêcher l'aggravation du dommage, tandis que la seconde a pour but la restauration du droit collectif enfreint quand c'est possible. Dans le cas d'un jugement où, une fois qu'il a été établi que l'eau fournie était impropre à la consommation humaine et donc que le droit collectif avait été violé, le Conseil d'Etat a ordonné d'assurer à l'avenir l'entretien hebdomadaire du système de filtrage des eaux et d'informer tous les deux mois le tribunal sur le caractère potable de l'eau[53], faisant ainsi cesser la violation. De même, dans l'affaire où il a été constaté une infraction aux droits relatifs au patrimoine et à la sécurité publics, la construction d'un stade de football commandé par une municipalité a été suspendue, et il a été ordonné que le terrain et la partie déjà construits soient utilisés à d'autres fins[54]. Ou encore, il peut arriver que l'on ordonne de « suspendre d'exécution d'un contrat de commercialisation de spiritueux » conclu entre une personne publique et un consortium privé jusqu'à ce que l'action de nullité du contrat engagée par la personne publique trouve une solution, parce que les conditions fixées par l'administration pour conclure le contrat (la quantité minimale que l'entrepreneur devait acquérir et la capacité installée de l'usine qui cessait d'être utilisée), ajoutées aux conditions économiques (prix et octroi de remises), porteraient préjudice au patrimoine de l'entreprise si l'on permettait que son exécution se poursuive»[55]. Dans ces hypothèses, on empêche clairement l'aggravation de l'infraction au droit collectif, dont la violation avait déjà commencé. L'hypothèse ne suppose pas nécessairement la restauration de ce qui correspond à la partie du dommage collectif qui a été causé, car il se peut bien qu'il soit impossible de décréter celle-ci. C'est ce qui arrive dans la première affaire, où le droit à la santé publique ne peut être rétabli sous peine de dévier vers une action individuelle ou de groupe étrangère à l'action populaire, et c'est encore ce qui arrive dans les affaires du stade et des contrats sur les spiritueux; dans ces différentes affaires, on devra déterminer le dommage causé et l'imputation du dommage.

Dans la troisième hypothèse, qui a rapport à la fonction restitutoire, il s'agit de « faire revenir les choses à leur état antérieur quand c'est possible ». Quoique la loi ne mentionne pas ce qui arrive quand il n'est pas possible de remettre les choses en l'état, on doit conclure qu'en plus de l'indemnisation en nature, est également permise l'indemnisation par équivalent pécuniaire, comme dans toute forme de responsabilité civile[56]. Plus encore, l'action populaire peut rechercher à titre principal ou exclusif une indemnisation pécuniaire pour le droit collectif enfreint[57].

Cette présentation coïncide avec ce qui est dit à l'article 34 de la loi 472, quand celui­ci précise que le jugement « pourra comporter un ordre de faire ou de ne pas faire, condamner au versement de dommages et intérêts en faveur de l'organisme public non coupable lorsque est enfreint un droit ou un intérêt collectif dont ledit organisme a la responsabilité., et exiger la mise en œuvre des comportements nécessaires pour faire revenir les choses dans l'état antérieur à l'infraction au droit ou à l'intérêt collectif, quand cela est physiquement possible »[58]. L'hypothèse normale sera que la plainte cherche à faire revenir à l'état antérieur le droit collectif enfreint, mais il peut bien arriver que si l'infraction au droit a déjà été commise et que la possibilité de le restaurer en nature n'existe pas, seule l'indemnisation pécuniaire puisse être appliquée. Théoriquement, il peut même arriver que l'indemnisation en nature n'exclue pas l'indemnisation pécuniaire, comme ce serait le cas si le juge estimait qu'ordonner l'exécution de ces deux obligations est nécessaire pour arriver à l'indemnisation intégrale du dommage causé, sans violer naturellement le principe interdisant la double indemnisation.

L'hypothèse étudiée - « faire revenir les choses à leur état antérieur » - peut être illustrée par le jugement du 9 novembre 2001, qui constate le sacrifice irrationnel de 10 000 animaux sauvages (Hydrochaeris Hydrochaeris, espèce connue en Colombie sous le nom de chiguiro (capybara)), dont la viande a été exportée grâce à un permis environnemental et d'exportation délivré par les autorités sans les précautions qui s'imposaient. Face à cette situation, le Conseil d'Etat ordonne aux « organismes responsables de prendre les mesures nécessaires pour reconstituer la population des animaux sacrifiés, ce qui implique d'affecter les ressources économiques suffisantes pour faire aboutir les programmes élaborés en ce sens »[59], garantissant ainsi un retour à la situation antérieure à la transgression du droit collectif. Le principe est le même quand on constate l'état d'abandon où se trouve une église coloniale nuit au patrimoine culturel de la nation et que l'on ordonne la restauration de celle-ci[60]. Il est à noter que dans ces affaires, l'Etat, en dépit du fait qu'il doive distribuer des aides pour reconstituer l'espèce ou préserver le patrimoine culturel, ne paie pas par équivalent pécuniaire mais par l'exécution d'obligations de faire qu'il devra honorer au moyen d'une enveloppe budgétaire. On observe une logique similaire avec les jugements prononcés en vue de défendre la jouissance de l'espace public: dans ces jugements, une fois constatée la violation du droit, le juge ordonne que les autorités adoptent « dans les quinze (15) jours suivant le moment où cette ordonnance devient exécutoire, et au plus tard dans les trois (3) mois, les mesures permettant de rétablir l'intégrité de l'espace public »[61]. De même, face au dommage consistant en un paiement excessif au détriment du Trésor public qu'un ministère a fait à un particulier conformément à un contrat de transaction, alors que ce dernier a été laissé sans effet par une action populaire, il est ordonné à la personne privée de rembourser la somme dûment actualisée[62]. Ne serait-ce que pour insister sur l'importance et le potentiel de cette action populaire, citons encore le récent jugement du 15 avril 2004[63], où un demandeur populaire contestait les règlements d'impôts effectués par les plus grandes sociétés financières, plainte qui a été rejetée faute de preuves mais qui laisse la possibilité que ce type de plainte puisse aboutir à l'avenir. Dans ce genre d'affaires, la réparation du dommage collectif causé est garantie dans la mesure où il est permis de revenir au status quo ante.

2.B - Droits collectifs protégés par l'action populaire

Des textes déjà cités de l'article 88 de la Constitution et de l'article 4 de la loi 472 de 1998, sont tirés les droits collectifs qui font l'objet d'une protection au moyen de l'action populaire. Puisqu'il s'agit d'une énumération exhaustive et généreuse, les cas concrets qui sont présentés devant la juridiction impliquent, dans la majorité des décisions, plusieurs droits collectifs.

Voyons quelques exemples.

En ce qui concerne la santé publique, le juge, après avoir constaté que l'eau dont dispose une municipalité est impropre à la consommation humaine, ordonne au maire d'effectuer un entretien hebdomadaire des filtres de l'usine locale de traitement FIME ainsi qu'un contrôle semestriel de la graduation des sables de tous les filtres de l'usine afin d'optimiser son fonctionnement », et il l'oblige à remettre des rapports prouvant que l'eau est apte à la consommation humaine[64]. Mais ce droit est protégé non seulement quand il y a déficience du service mais aussi quand ce dernier est inexistant, puisqu'il doit être relié au droit d'accès à un ensemble de services garantissant la santé publique, ainsi qu'au droit d'accès aux services publics en général et à leur prestation efficace et opportune. C'est ainsi que faute de traitement des eaux usées on oblige un maire à mettre en œuvre un mécanisme de traitement[65], ou bien on lui ordonne, en cas de concession de services publics, « de définir un modèle de gestion de l'entreprise assurant la prestation efficace du service public d'adduction d'eau et des égouts pour tous les habitants »[66]; ou encore, il est ordonné aux autorités d'adopter au plus tard dans les deux mois suivant le moment où cet arrêt devient exécutoire, un plan d'action avec son chronogramme pour faire aboutir les études au cours de l'exercice fiscal actuel et arrêter officiellement les projets d'égouts dans les quartiers »[67], en précisant toutefois que conformément aux normes en la matière, dans le cas des quartiers construits illégalement et légalisés a posteriori, ce sont les usagers du service qui devront supporter le coût des travaux[68].

Pour ce qui est du droit collectif à la défense du patrimoine public, fréquemment lié à celui de la moralité administrative, on trouve des antécédents, déjà examinés, dans lesquels il est ordonné que soient restituées les sommes que l'Etat s'était procurées grâce à un contrat de transaction conclu avec des particuliers à la suite de l'achèvement d'un contrat d'Etat[69], ou bien que soit immédiatement suspendu le processus de concession engagé par l'entreprise poursuivie, « jusqu'à ce que soient adoptées les mesures nécessaires pour prendre en considération les bilans et les comptes reflétant la réalité financière de l'entreprise »[70]. De même, il y a l'affaire où est suspendue l'exécution d'un contrat de vente de spiritueux tant que n'est pas tranchée la question de la légalité de celui-ci, contestée dans le cadre d'un autre procès[71]. Etant donné qu'est « considéré comme immoral tout agissement ne répondant pas à l'intérêt de la collectivité, et plus particulièrement à la poursuite des fins recherchées avec les facultés accordées au fonctionnaire responsable »[72], l'action populaire ne peut être utilisée quand l'acte ou l'omission censé enfreindre ou menacer le droit collectif ne peut être qualifié d'illégal[73]. C'est le cas, par exemple, quand le demandeur n'a pas allégué ni démontré que dans l'agissement qu'il met en cause il existe une intention dévoyée des administrateurs qui vise à obtenir des bénéfices et des profits indus, en plus du fait que l'examen du dossier ne permet pas non plus de mettre en évidence de comportement malhonnête, corrompu ou contraire à l'éthique impliquant une violation de la probité administrative »74; et c'est aussi le [74]cas quand un permis environnemental pour exploiter les eaux souterraines en vue d'extraire du pétrole remplit les conditions requises par la loi[75].

En ce qui concerne la sécurité publique, il y a plusieurs types de cas pour lesquels le droit a été protégé. Premier exemple: il a été demandé au juge d'ordonner la récupération d'un espace public occupé par des personnes déplacées vers une ville en raison du climat de violence, ville qui était devenue un foyer d'insécurité. Le juge s'y est refusé parce qu'il considérait qu'il n'était pas légal d'ordonner l'expulsion des vendeurs ambulants. La sécurité publique a cependant été protégée avec l'ordre donné aux autorités de garantir de manière permanente les opérations policières dans cette zone, afin de contrecarrer l'action des délinquants, combattre la vente de stupéfiants et garantir aux habitants des communes (Comunas) 1 et 3 de Villavicencio les droits à la sécurité et à la tranquillité »[76]. Ce droit est aussi protégé avec l'ordre donné à l'administration de mettre en œuvre « de manière permanente une opération de la police de la route visant à organiser et réguler la circulation des piétons et des véhicules », dans un endroit fréquenté et dangereux[77]. Dans ces affaires, on protège la sécurité du public conformément au droit à la sécurité et à la prévention des catastrophes techniquement prévisibles. Il en est de même, par exemple, pour le cas où il est ordonné à l'autorité administrative « d'adopter de manière permanente un plan de prévention du risque auquel se trouvent exposés les habitants du quartier El Bohío, en raison de l'éventualité d'une montée des eaux du torrent mentionné »[78].

Concernant l'accès aux services publics à domicile et à leur prestation opportune, outre les exemples déjà vus où l'on estime que ce droit est enfreint en même temps que d'autres droits, on peut ajouter que face à la plainte des usagers d'une commune à propos d'une erreur de facturation du service de téléphone et à l'inexistence de bureaux des réclamations dans la commune - à quoi il faut adjoindre le devoir de payer avant le dépôt de la réclamation et le fait d'être confronté à des tarifs discriminatoires de la part de l'entreprise -, le juge protège le droit et ordonne à l'entreprise prestataire « de fixer et d'appliquer pour les usagers de la commune de Tenjo les mêmes tarifs » que dans les autres communes, de corriger, apurer et compenser les comptes d'encaissement et de faire le nécessaire pour que soit installé un bureau des réclamations[79].

Comme on l'observe dans les exemples cités, qui ne constituent qu'un bref parcours parmi les nombreuses décisions existantes, le juge colombien protège directement et efficacement les différents droits collectifs ayant été largement consacrés. Ce qui précède ne signifie pas que le juge néglige les réalités historiques, économiques et sociales du pays. Le juge colombien a en effet eu l'occasion de rappeler qu'« à l'impossible nul n'est tenu »80, car à [80]l'instar de ce qui se passe pour la responsabilité civile dans son ensemble, le juge devra examiner au cas par cas les limites des obligations à la charge de l'Etat[81]. Autrement dit, le thème du « caractère relatif de la défaillance du service », si valorisé en la matière, est appliqué aux actions populaires, qui sont aussi des actions de responsabilité civile. La discussion portera sur la question de savoir jusqu'où l'on peut aller pour exempter l'Etat de son devoir de faire respecter les droits collectifs.

2.C Droits individuels contre droits collectifs

Quelques-uns des exemples cités font apparaître le besoin de déterminer la manière dont est géré le rapport entre droits individuels et droits collectifs. Comme on peut le déduire de ces exemples, la défense des droits collectifs suppose la possibilité de contester au moyen de l'action populaire la validité des actes administratifs unilatéraux ou même contractuels. Se pose alors ici le problème de savoir si l'action populaire et les droits qu'elle défend ont ou n'ont pas la possibilité de faire cesser dans leurs effets les droits de nature variée susceptibles d'être accordés par d'autres actes de l'administration. L'exemple précité du stade de football est significatif: face à l'ordre de suspendre le contrat administratif en cours d'exécution, les droits contractuels qu'exerçait l'entrepreneur perdent leur effet. Autrement dit, en défendant les droits collectifs, on arrive à la suspension du contrat et des travaux qui avaient été engagés. Il en va de même dans les affaires citées où l'on annule les permis environnementaux, ainsi que dans les cas d'annulation d'un contrat de transaction, où l'on pourra faire annuler une déclaration individuelle d'impôts, etc.

Quelle position adopter à cet égard?

Dans un écrit pertinent, le Conseiller d'Etat Alier E. Hernández Enríquez[82] prend conscience du problème et cite deux thèses principales concevables face à cette situation.

La première, appelée négative, suppose l'impossibilité d'annuler des actes administratifs au moyen de l'action populaire, eu égard au fait que de tels actes jouissent d'une présomption de légalité et qu'il existe d'autres types d'action pour les annuler. Le Conseil d'Etat colombien l'a appliqué à l'occasion, en affirmant par exemple que l'on ne peut annuler un permis environnemental qui est censé avoir enfreint un droit collectif, étant donné que « cet acte administratif est présumé légal tant qu'il n'y a pas de décision judiciaire le suspendant ou l'annulant, résolution qui devra être adoptée par une autre voie que l'action populaire et dans le cadre d'un procès engagé par ceux qui ont légitimité pour le faire »[83]. De même, il a déclaré que « bien qu'il soit vrai que le concept de probité administrative est trop large et se trouve de ce fait impliqué dans n'importe quel contrat conclu par l'administration... cela ne peut servir de fondement pour que, dans l'hypothèse où auraient été commises des irrégularités lors de sa conclusion ou de son exécution, ce soit l'action populaire qui ait vocation à s'appliquer pour déclarer l'illégalité ou la caducité de la transaction, à la place des démarches appropriées indiquées par l'ordre juridique »[84].

La seconde, dénommée positive, suppose que les actes et/ou les contrats administratifs perdent leur effet lorsque l'action populaire est exercée, parce que cette dernière est considérée comme une action autonome et non subsidiaire et que sa finalité est de protéger des droits collectifs, qui sont d'une nature supérieure et particulière. Selon les mots de la Cour constitutionnelle, ces droits « portent sur des questions d'une telle importance que leur violation met en péril ou attaque des biens aussi précieux pour la société que la vie, la santé, l'environnement sain, l'équilibre écologique, la sécurité, le patrimoine et la probité publique, non pas d'une personne mais de toute une société »[85]. Grâce à cette position théorique, il a pu être prononcé des sentences comme celles déjà citées relatives au stade de football, à la suspension d'un processus de concession engagé par une entreprise et à un contrat de vente de spiritueux dans un département, etc., ce qui montre une intromission réelle dans les contrats administratifs[86]. Il en est de même pour les actes administratifs unilatéraux, qui, même s'ils ne sont pas annulés formellement[87], n'ont plus d'effet, car on considère, par exemple, qu'en accomplissant l'acte administratif sans la prudence qui s'impose et sans qu'ait été exigé le respect de toutes les conditions indiquées par la loi », le droit collectif a été enfreint[88].

Cette conséquence du modèle colombien est inquiétante, car elle engendre une insécurité juridique et une tendance exacerbée au collectivisme. En effet, tout acte, administratif ou non, sera en permanence menacé tant que la situation juridique créée perdurera, puisque, rappelons-le, l'action populaire n'a pas de délai de caducité. Ce n'est pas là une conséquence propre à rassurer sur les situations juridiques individuelles, et l'on doit faire extrêmement attention de ne pas encourager un faux populisme.

En effet, radicalisée, la position antérieure peut engendrer des problèmes considérables. Comme l'affirme Melleray, « coexistent ainsi dans tout ordre juridique étatique, certes dans des proportions variables suivant les pays et les moments, des normes d'inspiration holiste et d'autres d'inspiration individualiste (...) Il ne faut d'ailleurs pas craindre de se féliciter du principe même de ce pluralisme. En effet, une société où l'"opinion politique dominante" est animée par des valeurs exclusivement holistes et où les normes juridiques les plus élevées, qui reflètent très largement cette idéologie, sont de la même veine ne peut être que totalitaire. A cet égard, le régime nazi en est l'illustration la plus effroyable et, sur le plan de l'élaboration d'une doctrine et d'une technique juridiques niant les éléments d'inspiration individualiste, constitue la construction juridique holiste la plus achevée. A l'opposé, une société où les "décideurs" seraient animés par des valeurs exclusivement individualistes ne pourrait selon toute vraisemblance qu'aboutir à l'anarchie »[89]. On ne peut oublier que le même problème se présentait même dans le droit antique. En effet, la tentative de Périclès de créer un tribunal démocratique dans lequel les citoyens pouvaient porter des accusations moyennant une récompense monétaire en raison du recours à l'action populaire, donna naissance à l'institution dite des "sycophantes". Ces derniers étaient chargés d'accuser pénalement leurs adversaires, de sorte qu'une partie de l'argent des amendes et des biens éventuellement confisqués leur étaient remis en cas de condamnation. Comme il a été écrit très justement, « si cette motivation pécuniaire aboutissait à condamner de véritables coupables, on ne pouvait rien reprocher au système. Mais la véritable déviation vint de dénonciateurs professionnels qui poursuivaient les riches citoyens sans que ceux-ci aient commis la moindre infraction. Les sycophantes parvenaient cependant à les faire condamner en excitant le ressentiment des jurés populaires envers les riches »[90]. On raconte que les excès ont été tels - bien qu'il ait été envisagé, à titre de mesure correctrice du système, d'infliger des amendes à ceux qui renonceraient à cette action ou ne parviendraient pas à obtenir un cinquième des voix des jurés - qu'en réaction, il a été parfois mis fin à certains dispositifs démocratiques.

L'évolution du droit colombien face à ce problème n'est pas encore arrêtée et l'on ne dispose pas, à ma connaissance, de jugements permettant d'expliquer comment a été résolue, pour l'individu, la perte de ses droits qui se trouvent supplantés par les droits collectifs. Si la loi 472 de 1998 était réformée, il serait utile d'inclure un article qui désamorce la tension inévitable entre droit collectif et droit individuel, par exemple en précisant les conditions de garantie des droits acquis et/ou les indemnités perçues par les personnes de bonne foi qui voient leur situation individuelle modifiée. Mais cet aspect du problème n'empêche pas d'affirmer qu'en droit colombien le dommage collectif est un dommage de plus grande envergure que le dommage individuel, raison pour laquelle même dans les cas où la réparation du dommage collectif entraîne la suppression des droits individuels, ceux-ci doivent céder devant les droits collectifs[91]. De toute façon, la jurisprudence a déjà signalé certains éléments allant dans le bon sens pour résoudre ce problème, en affirmant que « face à l'acte administratif (les particuliers) sont protégés par la confiance légitime et par la présomption de légalité, laquelle peut être dénaturée, entre autres causes, quand il est évident que l'acte a été accompli par des moyens illégaux »[92]. Il faudra être attentif à la manière dont seront traitées les "causes" dont parle le jugement précédent, en remarquant que toute restriction de l'interprétation doit jouer en faveur du particulier, que l'on prive de son "droit". Et bien que, répétons-le, cette position puisse engendrer des incertitudes et des contrariétés juridiques, nous pensons qu'il n'y a pas d'autre issue eu égard au choix fait par la constituante et le législateur, dans notre système juridique, en matière de hiérarchie des droits. Ce choix signifie que l'on ne peut jouir des droits individuels que dans la mesure où ceux-ci n'attentent pas aux droits collectifs.

Tout sera donc une question de pondération de la part du juge des contentieux administratifs, mais on ne peut accepter que la crainte suscitée par cet élément juridique mette fin ou ampute l'action populaire. Ces craintes se sont aussi manifestées, et de façon importante, lors de l'avènement de l'action de tutelle, qui est sans aucun doute l'un des plus grands acquis juridiques de l'histoire de la Colombie[93]. Historiquement, ces craintes ont été exprimées de façon injustifiée par des personnes redoutant une "démocratisation excessive" de la justice, face à quoi l'on doit rappeler que la Colombie est un Etat Social de droit et que, dans cette mesure, les conflits juridiques provoqués par les abus de pouvoir sont clairement réglementés par la Constitution.

On souligne ici une évidence parfois oubliée de ceux qui réclament la réduction et l'amputation des actions judiciaires, afin d'empêcher les abus commis par des "minorités" qui, sans soutien politique suffisant, se servent du juge pour obtenir par son intermédiaire ce qu'elles n'obtiennent pas par la voie électorale: « n'oublions pas enfin que, depuis Montesquieu, on sait que le pouvoir absolu corrompt et qu'il est bon que le pouvoir arrête le pouvoir. Les magistrats ne doivent pas avoir peur d'utiliser leur pouvoir créateur de normes; de toute façon, le législateur peut toujours, s'il n'est pas d'accord avec la jurisprudence, briser celle-ci en votant une loi contraire »[94]. La célèbre affaire Perruche en droit français l'a récemment confirmé. Il s'agissait de la loi 2002-303 du 4 mars 2002, dont l'article 1 affirmait que « personne ne peut invoquer un dommage du fait de sa naissance ». Cette disposition a conduit à abandonner la position jurisprudentielle en vertu de laquelle on avait indemnisé un enfant né dans un état anormal, à la suite d'une erreur médicale qui n'a pas permis d'avertir sa mère d'une rubéole et donc empêché celle-ci de décider d'un avortement[95]. Un débat était né dans la société française après l'arrêt de la Cour de Cassation, contraire à la position du Conseil d'Etat[96]. Dans ce débat, où se sont exprimés les points de vue philosophiques et éthiques les plus divers, la position du Législateur a fini par s'imposer, selon la logique du jeu des pouvoirs, face à la position judiciaire de la Cour. On ne doit pas non plus oublier le concept de Loi validant des actes administratifs, en vertu duquel le législateur peut, sous certaines conditions, faire passer des lois reprenant des normes annulées antérieurement par le juge des contentieux administratifs[97]. C'est par conséquent un problème de jeu de pouvoirs, et chaque système juridique a sa façon de le résoudre.

D'après le principe précédent - à savoir que l'on ne peut jouir des droits individuels que dans la mesure où ceux-ci n'attentent pas aux droits collectifs, car le dommage collectif est de plus grande ampleur que le dommage individuel -, on doit déduire que face à des dommages enfreignant en même temps un droit collectif et un droit individuel, et dont la réparation ne peut être sollicitée par celui dont le droit enfreint est prioritaire, on doit prévoir la possibilité d'une réparation du dommage collectif, même si celle-ci affecte la décision personnelle de celui qui subit le dommage individuel[98]. Aussi surprenante qu'elle paraisse, cette logique est justifiée à partir du moment où, comme on l'a vu, on considère que les droits collectifs sont des droits subjectifs en faveur de "toute personne du peuple", ce qui atténue la nature égocentrique de l'être humain telle que la conçoivent les normes classiques du Droit Civil.

 

Conclusion

 

Des pages précédentes on peut déduire des caractéristiques importantes du système colombien quant à la défense des droits de groupe et des droits collectifs.

En ce qui concerne les plaintes en faveur des droits de groupe, le droit colombien est efficace et conforme à la tendance générale que l'on a pu constater en droit comparé, car il dispose d'une action par laquelle un groupe peut être indemnisé pour les préjudices subis par les individus qui le composent, sans qu'il soit besoin que la totalité de ceux-ci accordent une procuration. Le système peut ainsi facilement traiter des plaintes qui, déposées au titre d'autres actions, pourraient conduire à méconnaître ces droits. Il permet aussi que les dégâts dits minimaux - ceux pour lesquels il serait trop onéreux de déposer une plainte individuelle - soient réparés, donnant une arme importante aux masses d'usagers des sociétés industrialisées.

En ce qui concerne les droits collectifs, on peut conclure que le choix politique d'autoriser l'action populaire ouvre la voie à une plus grande participation des citoyens dans le devenir des droits collectifs. Bien qu'il soit vrai que l'action populaire engendre le risque que la jouissance d'un droit individuel soit subordonnée au respect des droits collectifs, ce risque est indissociable du choix fait par le système, car l'action populaire est une procédure qui peut faire cesser les effets des droits individuels. Ce risque ne doit pas empêcher de faire remarquer que l'action populaire en Colombie a une manière différente d'envisager l'application du principe démocratique de la séparation des pouvoirs et permet de plaider des affaires dans lesquelles on peut parler de "juge-administrateur". Cette caractéristique peut susciter une certaine perplexité chez un juriste étranger, qui pourra bien estimer que le juge se substitue à l'administration et qu'il finit par dépasser les limites du jeu normal des pouvoirs dans une démocratie. On estime toutefois que puisque le juge agit en vertu de pouvoirs qui lui sont conférés par des normes juridiques édictées démocratiquement, et puisque la branche législative garde le pouvoir de fixer une limite à cette substitution, la séparation des pouvoirs n'est pas attaquée, et l'on considère au contraire que sa portée est renforcée par le principe de la collaboration harmonieuse entre pouvoirs. Indépendamment de ce que l'on peut penser de la portée réelle du principe de séparation des pouvoirs, il est certain qu'en Colombie un droit subjectif est accordé à toute personne pour la défense des droits collectifs. Dès lors, on dépasse la discussion relative au caractère "proclamatoire" ou non de ces droits et on les intègre à un système de protection complète, comme il peut en exister avec d'autres générations de droits. Il s'agit alors de surveiller l'évolution réelle de la protection des droits collectifs, en vue de déterminer si les prononcés judiciaires pourront répondre ou non aux multiples besoins qui naissent dans un pays comme la Colombie, où toute décision concernant ces droits peut arriver à compenser leur absence pendant des années, mais qui, un jour, se heurtera à la froide réalité financière, déjà étudiée quand le Conseil d'Etat a rappelé le principe général, aussi applicable à ces actions, selon lequel "à l'impossible nul n'est tenu".

 

 

* Professeur titulaire Université Externado de Colombia, jchenao@wanadoo.fr.

[1] Le présent essai reprend les éléments essentiels, circonscrits à la Colombie, de l'écrit « la defensa de los derechos colectivos y de los de grupos en la responsabilidad civil del Estado en derecho colombiano y francés », publié dans le livre El derecho público a comienzos del siglo XXI. Estudios en homenaje al profesor Allan R. Brewer-Carías, tomo III, Civitas Ediciones, Madrid, 2003, pp. 2745-2790.

[2] Philippe Didier, De la représentation en droit privé, L.G.D.J., Paris, 2000, p. 264: « L'un des premiers exemples de ces actions dont on ait gardé trace opposa au XIe siècle un curé à ses paroissiens, le premier reprochant aux seconds de ne pas lui verser les émoluments auxquels il estimait avoir droit. L'action du curé ne fut pas engagée contre chacun de ses paroissiens pris individuellement mais contre leur ensemble. L'histoire de la Common Law médiévale nous offre un nombre important d'exemples de litiges mettant en scène des collectivités diverses. Il n'y a là cependant rien d'étonnant. Le monde du Moyen-Age est un monde formé de collectivités multiples, imbriquées les unes dans les autres. L'individu isolé a peu de chances de survivre longtemps s'il ne peut pas se rattacher à tel ou tel groupe ».

[3] Philippe Didier, De la répresentation en droit privé, L.G.D.J., Paris, 2000, p. 391.

[4] Voir, comme récente prise de position jurisprudentielle au Vénézuela, et même si l'on n'est pas d'accord avec la portée qui est donnée aux concepts de droits collectifs, diffus, etc., le jugement: Cour Suprême de Justice, Salle constitutionnelle, 30 juin 2000, Magistrat rapporteur: Jesús Cabrera Romero, Médiateur contre la Commission Législative Nationale.

[5] Voir les prononcés doctrinaux suivants: Felipe González Morales (direction), dans l'introduction du livre Las acciones de interés público. Argentina, Chile, Colombia y Perú, Escuela de Derecho Universidad Diego Portales, Santiago de Chile, 1997, p. 32: "La Colombie semble être le (pays) qui a le plus avancé dans le développement de mécanismes légaux permettant un travail par des actions d'intérêt public". Voir, plus récemment, le spécialiste en doctrine mexicain Ovalle Favella, pour qui "le pays dans lequel les actions ont été développées dans un cadre systématique est, sans aucun doute, la Colombie", in Acciones populares y acciones para la tutela de los intereses colectivos, lecture donnée au VII Seminario Internazionali su Formazione e Caratteri del Sistema Guiridico Latinoamericano e Problemi del Processo Civile, organisé par le Centro di Studi Giuridici Latinoamericani del Consiglio Nazionale delle Ricerche, la Università Tor Vergata de Roma, the Instituto Italo-Latinoamericano and the Instituto Iberoamericano de Derecho Procesal, à Rome, du 16 au 18 mai 2002, qui peut être trouvé à l'adresse internet suivante: http://www. juridicas.unam.mx/publica/rev/boletin/cont/107/art/art6.htm#N*.

[6] Selon l'article mentionné: « La loi régira les actions populaires pour la protection des droits et intérêts collectifs, en relation avec le patrimoine, l'espace, la sécurité et la salubrité publique, la morale administrative, l'environnement, la libre concurrence économique et d'autres de même nature qui seraient définies par celle-là. Elle régira aussi les actions populaires suscitées par les dommages occasionnés à un nombre pluriel de personnes, sans que cela porte atteinte aux actions particulières correspondantes. De même, elle définira les cas de responsabilité civile objective pour atteinte portée aux droits et intérêts collectifs ».

[7] Selon l'article 4 de la loi 472 de 1998: « Droits et intérêts collectifs. Constituent des droits et intérêts collectifs, entre autres, ceux qui touchent à: a) la mise à disposition d'un environnement sain, conformément à la Constitution, la loi et les règlements; b) la probité administrative; c) l'existence d'un équilibre écologique et l'exploitation effective et rationnelle des ressources naturelles pour garantir son développement durable, sa conservation, sa restauration ou son remplacement. La conservation des espèces animales et végétales, la protection des espaces ayant une importance écologique particulière, des écosystèmes situés dans les zones frontalières, tout comme les autres intérêts de la collectivité relatifs à la préservation et à la restauration de l'environnement; d) l'accès aux espaces publics ainsi que l'utilisation et protection des biens d'usage public; e) la défense du patrimoine public; f) la défense du patrimoine national; g) la sécurité et la salubrité publiques; h) l'accès à une infrastructure de services garantissant la salubrité publique; i) la libre concurrence; j) le libre accès aux services publics et leur effectivité: k) l'interdiction de la fabrication, de l'importation, de la détention ou de l'usage d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires, ainsi que l'introduction sur le territoire national de déchets nucléaires ou toxiques; l) le droit à la sécurité et à la prévention des risques majeurs techniquement prévisibles; m) la réalisation de constructions, d'équipements et d'aménagements urbains conformes aux textes en vigueur, exécutés de façon rationnelle et en privilégiant la qualité de la vie des habitants; n) les droits des consommateurs et des usagers. Constituent également des droits et intérêts collectifs ceux définis comme tels par la Constitution, les lois ordinaires et les traités internationaux ratifiés par la Colombie. Les droits et intérêts énoncés dans le présent article seront définis et organisés par les règles en vigueur ou celles à venir ».

[8] Cour constitutionnelle colombienne, Salle Plénière, 14 avril 1999, rapporteur: Martha Victoria Sáchica de Moncaleano, plaignant: Andrés De Zubiría Samper et autres, affaires cumulées D-2176, D­2178 et D-2196.

[9] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 6 décembre 2001, rapporteur: Alier Hernández Enríquez, demandeur: Nestor Gregory Díaz, affaire AP-221.

[10] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 11 mars 2003, rapporteur: Hoyos Duque, demandeur: Contrôleur (Contraloría) Général de la République, affaire AP-110010315000020021011-01.

[11] On part du principe que le droit subjectif est la possibilité d'exiger une prestation consistant à donner, faire ou ne pas faire. Voir en ce sens: Fernando Hinestrosa, Tratado de las obligaciones. Concepto. Estructura. Vicisitudes, I, Editorial de la Universidad Externado de Colombia, Bogota D.C., 2002, p. 301: « ... le droit subjectif implique, au sens large, une prérogative que la norme accorde à quelqu'un face à d'autres personnes, pour la satisfaction de ses intérêts, du fait qu'il se trouve dans une situation qui justifie cette protection au sein de modèles éthico-sociaux, et qui lui permet d'espérer avec des garanties le respect et la coopération d'autrui et de les exiger de manière coercitive si nécessaire, à des fins de prévention, de restitution et de compensation, selon les circonstances et sa volonté"; voir également: Norbert Foulquier, Les droits publics subjectifs des administrés. Émergence d'un concept en droit administratif français du XIXe au XXe siècle, Dalloz, Paris, 2003, p. 405: « Un administré est titulaire d'un droit subjectif quand il remplit les conditions lui permettant d'être considéré comme bénéficiaire du pouvoir d'exiger - reconnu par une norme générale ou individuelle, ce sans être obligé d'utiliser ce pouvoir, dans un but personnel socialement légitime -, un certain comportement de la part des personnes publiques - ce qui constitue l'objet de leur obligation -, afin de se procurer un certain avantage moral ou matériel que l'ordre juridique a, expressément ou implicitement, considéré comme licite".

[12] Cour constitutionnelle colombienne, Salle Plénière, 8 juin 2004, rapporteur: Uprimny Yepez, affaire D-4939.

[13] Daniel Suárez Hernández et Ruth Stella Correa Palacio, Acciones populares y de grupo. Ley 472 de 1998, essai inclus dans le livre XX Congreso Colombiano de Derecho Procesal, Instituto Colombiano de Derecho Procesal, Ed. U. Externado de Colombia, 1999, p. 534. Voir dans le même sens à propos des trois catégories de droits: Cour constitutionnelle colombienne, jugement T-008/92, rapporteur: Morón Díaz, demandeur: Matilde Bohorquez, affaire T-399.

[14] Dominique Rousseau, "Les droits de l'homme de la troisième génération", Revue Interdisciplinaire d'Etudes Juridiques (RIEJ), 1987.19, p. 31. Voir également: Norbert Foulquier, Les droits publics subjectifsdes administrés. Émergence d'un concept en droit administratif français du XIXe au XXe siècle, Dalloz, Paris, 2003, p. 542 y ss.

[15] Black's Law Dictionary, with pronunciations, Sixth Edition, Centennial Edition (1891-1991), Publisher's Editorial Staff, St. Paul, Minn., 1990.

[16] Gerald W. Boston et M. Stuart Madden, Law of environmental and toxic torts, cases, materials, andproblems, Second Edition, American Casebook Series, West Group, St. Paul, Minnesota, 2001, p. 929.

[17] David G. Owen, M. Stuart Madden et Mary J. Davis, Madden & Owen on Products Liabilitity, Volume2, Troisième édition, Ed. West-Group, U.S.A., 2000, p. 739.

[18] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives etjudiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 362 et ss.

[19] Aux termes de l'article 3 de la loi 446 de 1998: « Actions de groupe. Ce sont les actions engagées par plusieurs personnes ou un groupe de personnes qui justifient d'une même cause juridique quant à l'origine des préjudices individuels qu'elles ont subis. L'exigence d'identité se retrouve pour ce qui est de tous les éléments qui permettent d'établir la responsabilité. L'action de groupe pourra uniquement être exercée pour obtenir la reconnaissance du dommage et sa réparation ». L'article 46 de la même loi précise: « Exercice des actions de groupe. Les actions de groupe sont celles engagées par plusieurs personnes ou un groupe de personnes qui justifient d'une même cause juridique quant à l'origine des préjudices individuels qu'elles ont subis. L'action de groupe pourra uniquement être exercée pour obtenir la reconnaissance du dommage et sa réparation. Pour que soit reconnu un groupe, un minimun de vingt (20) personnes est requis ».

[20] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 25 avril 2002, rapporteur: Alier Eduardo Hernández Enríquez, demandeur: Rosa Yamile Jaramillo Chanci et autres, affaire AG 0500 1233 10002000030 01.

[21] Voir: décret 3466 de 1982, connu sous le nom de Statut du Consommateur; loi 45 de 1990 relative au domaine de la concurrence déloyale et du délit d'initié sur le marché des valeurs, remplacée par les articles 1.2.3.1 et 1.2.3.2 du décret 653 de 1993.

[22] En application de l'article 55 de la loi, les personnes ayant subi un dommage pourront intervenir à l'instance dans n'importe quelle phase du procès, y compris après le jugement lui-même, dans cedernier cas, la seule réserve étant que le montant des indemnités ordonnées ne saurait être augmenté.

[23] voir, à titre d'exemple: Javier Tamayo Jaramillo, Las acciones populares y de grupo en la responsabilidad civil, Raisbeck, Lara, Rodríguez & Rueda (Baker & McKensie) Editores, Medellin, 2001, p. 27; RamiroBejarano Guzmán, Procesos Declarativos. Civiles, agrarios, de familia, arbitramento. Acciones populares y degrupo. Nueva ley de conciliación, seconde édition, Editorial Temis, Bogota D.C., 2001, p. 168.

[24] Conseil d'Etat colombien, 28 octobre 1999, Affaire AP-003, demandeur: Juan José Neira Gómez, rapporteur: Javier Díaz Bueno.

[25] Javier Tamayo Jaramillo, Las acciones populares y de grupo en la responsabilidad civil, Raisbeck, Lara, Rodríguez & Rueda (Baker & McKensie) Editores, Medellin, 2001, p. 203.

[26] Cour constitutionnelle colombienne, Salle Plénière, 8 juin 2004, rapporteur: Uprimny Yepez, affaire D-4939.

[27] Cour constitutionnelle colombienne, 16 août 2000, Affaire D-2770, demandeur: Nestor Raul Correa Henao, rapporteur: Alvaro Tafur Galvis.

[28] Ramiro Bejarano Guzmán, Procesos Declarativos. Civiles, agrarios, de familia, arbitramento. Acciones populares y de grupo. Nueva ley de conciliación, Seconde édition, Editorial Temis, Bogota D.C., 2001, p. 188.

[29] Jean-Claude Venezia, Intérêt pour agir, Répertoire de Contentieux Administratif, tome II, Dalloz, Paris, 1985, n. 23: l'intérêt collectif est "celui d'une association ou d'un syndicat qui agit en vue de la défense des intérêts pour la prise en charge desquels ces groupements sont constitués".

[30] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 2 février 2001, rapporteur: Alier Eduardo HernándezEnríquez, demandeur: Actionnaires de la Société d'épargne et de logement, affaire AG 017.

[31] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 18 octobre 2001, rapporteur: Ricardo Hoyos Duque, demandeur: José del Carmen Vega Sepúlveda et autres, affaire n° AG-250000-23-27-000-0023-01.

[32] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 25 avril 2002, rapporteur: Alier Eduardo Hernández Enríquez, demandeur: Rosa Yamile Jaramillo Chanci et autres, affaire n° AG0500 1233 10002000030 01.

[33] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 2 février 2001, rapporteur: Alier Eduardo HernándezEnríquez, demandeur: Actionnaires de la Société d'épargne et de logement, affaire AG 017.

[34] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 28 août 2003, rapporteur: Rodríguez Villamizar, demandeur: Médiateur régional du Chocó, affaire AG n° 27001-23-31-000-2002-01463-01.

[35] Cour constitutionnelle colombienne, Arrêt C-215 de 1999.

[36] Philippe Didier, De la représentation en droit privé, L.G.D.J., Paris, 2000, p. 360.

[37] Cour constitutionnelle colombienne, 8 juin 2004, magistrat rapporteur: Rodrigo Uprimny Yepez, affaire D-4939.

[38] En ce sens, il est affirmé au paragraphe 4 de l'article 52 de la loi 472 relative aux conditions de laplainte: « 4. S'il n'est pas possible de fournir le nom de tous les individus d'un même groupe, d'énoncer les critères servant à les identifier et à définir le groupe ».

[39] Conseil d'Etat colombien, Section Troisième, 1er juin 2000, rapporteur: Ricardo Hoyos Duque, demandeur: Kilian Joaquín Avila Gutierrez et alii, affaire: AG-001.

[40] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives etjudiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 414.

[41] Ramiro Bejarano Guzmán, De las acciones populares y de grupo, en la obra colectiva Reformas a lalegislación comercial, Colegio de Abogados de Medellín et Editorial Dike, Bogota D.C., 1999, p. 195.

[42] Voir M.A. Frison-Roche, Généralités sur le principe du contradictoire, Thèse soutenue à Paris II, 1988, n 85.

[43] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives etjudiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 392.

[44] Louis Boré, L'action des syndicats et des associations dans la responsabilité administrative, RFDA, 1996, p. 547.

[45] Il existe cependant un exemple important dans le domaine des produits défectueux. En effet, l'article 8-1 de la loi du 18 janvier 1992, qui a complété la loi du 5 janvier 1988, a prévu qu'uneassociation peut agir « lorsque plusieurs consommateurs, personnes physiques identifiés ont subi des préjudices individuels qui ont été causés par le fait d'un même professionnel, et qui ont une origine commune (...) si elle a été mandatée par au moins deux des consommateurs concernés ». Toutefois, étant donné qu'il est toujours exigé qu'une procuration soit accordée aux individus, cette loi "constituait une façon élégante d'enterrer les projets d'action de groupe », conformément à ce que relate la doctrine autorisée (Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives et judiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 413).

[46] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives et judiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 405.

[47] Tribunal Administratif de Cundinamarca, 24 août 2000, affaire AG 99-001, Marcos Yesid Garcia vs.Mairie de Bogota.

[48] Cour constitutionnelle colombienne, 14 avril 1999, C-215: dans ce jugement, la Cour a déclaréinconstitutionnel le texte de la loi qui prévoyait un délai de caducité de cinq ans dans l'éventualité où l'action serait exercée pour « faire revenir les choses à leur état antérieur ».

[49] Cour constitutionnelle colombienne, Salle Plénière, 19 février 1998, rapporteur: Eduardo Cifuentes, affaire O.P.021.

[50] Javier Tamayo Jaramillo, Las acciones populares y de grupo en la responsabilidad civil, Raisbeck, Lara, Rodríguez & Rueda (Baker & McKensie) Editores, Medellin, 2001, p. 57.

[51] Voir en ce sens: Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 9 novembre 2001, rapporteur:Quiñonez Pinilla, affaire AP-194, demandeur: Rodolfo Puentes Suárez et autres; Courconstitutionnelle colombienne, 14 avril 1999, rapporteur: Martha Victoria Sáchica de Maldonado, affaire D-2176, D-2184 D-2196 (cumulées).

[52] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 24 octobre 2001, rapporteur: Quiñonez Pinilla, affaire AP-194, demandeur: Procureur (Procurador) Provincial d'Ibagué.

[53] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 6 décembre 2001, rapporteur: Hernández Henríquez, demandeur: Nestor Gregory Díaz, affaire AP-221.

[54] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 7 juin 2001, affaire AP-166, demandeur: Manuel Jesús Bravo et autres, rapporteur: Alier Hernández Henríquez.

[55] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 31 octobre 2002, rapporteur: Hoyos Duque, demandeur: Jesús Orlando Mejía, affaire AP-520001233100020001059-01.

[56] Voir en ce sens Fernando Hinestrosa, « La responsabilidad civil » (version écrite d'une d'une conférence donné à Medellin en 1980), inclus dans le livre Escritos varios, éd. Universidad Externado de Colombia, Bogota D.C., 1983, p. 690.

[57] Nous sommes d'accord avec la conclusion à laquelle arrive sur ce point le professeur Tamayo Jaramillo à la page 170 de son livre déjà cité: « En conclusion, nous croyons qu'une action populaire est aussi parfaitement possible même s'il s'agit exclusivement de toucher des indemnités pour un dommage collectif déjà causé ».

[58] Nous considérons comme malencontreux qu'il soit exigé que la condamnation au paiement de dommages et intérêts ait lieu « en faveur de l'organisme public non coupable », car nous estimons que cette exigence confond l'observance et l'administration que peut assurer la personne publique d'un droit qui, parce qu'il est collectif, appartient précisément à "tout un chacun", avec la qualification que l'on peut donner à l'agissement ou à l'omission de cette entité publique, chose qui n'a aucune incidence sur la nécessité de réparer le droit. Dans l'éventualité où la personne coupable est la même que celle qui a la responsabilité du droit collectif, ce qui est une situation fréquente, le juge devra faire preuve de créativité pour garantir l'indemnisation du dommage tantôt en faveur d'une autre personne publique concernée par le droit collectif enfreint, et avec l'indication expresse de la finalité de l'indemnisation, tantôt en faveur de la même entité, à la réserve près qu'il devra appliquer l'exception d'inconstitutionnalité, en faisant valoir que la préséance du droit substantiel suppose que l'on ne peut omettre d'indemniser un droit collectif qui, d'un point de vue légal et constitutionnel, doit être réparé.

[59] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 9 novembre 2001, rapporteur: Quiñones Pinilla, demandeur: Rodolfo Puentes et autres, affaire AP 194, .

[60] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 20 septembre 2001, affaire AP-125, demandeur: jaime Umaña Díaz, rapporteur: María Helena Giraldo.

[61] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 8 novembre 2002, rapporteur: Quiñones Pinilla, affaire AP-125, demandeur: Ismael Forero Mongui, affaire: AP-25000-23-24-000-2001-0495-01.

[62] Conseil d'Etat colombien, 31 mai 2002, affaire AP-300, demandeur: Contrôleur (Contraloría) généralde la République et autres, rapporteur: Ligia López Díaz.

[63] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 15 avril 2004, rapporteur: Giraldo Gómez, demandeur: Fondation FICDISJ, affaire AP-2136.

[64] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 6 décembre 2001, rapporteur: Hernández Enríquez, affaire AP-221, demandeur: Nestor Gregory Díaz. Voir dans le même sens: Quatrième Section, 14 septembre 2001, rapporteur: Palacio hincapié, demandeur: Médiateur du Peuple (Defensoría delPueblo), affaire AP-162.

[65] Conseil d'Etat colombien, Quatrième Section, 24 août 2001, rapporteur: Quiñones Pinilla, affaire AP-162, demandeur: Médiateur du Peuple (Defensoría del Pueblo).

[66] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 14 septembre 2001, rapporteur: Palacio Hincapié, affaire AP-100, demandeur: Procureur (Procurador) provincial d'Ibagué.

[67] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 31 janvier 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, affaire 18001-23-31-000-2000-0343-01, demandeur: Sandra Milena Rivera.

[68] Conseil d'Etat colombien, Deuxième Section, 22 novembre 2001, rapporteur: Cáceres Toro, affaireAP-274, demandeur: Assemblée d'Action Communale du quartier Mirador du centre de Bogota.

[69] Conseil d'Etat colombien, 31 mai 2002, affaire AP-300, demandeur: Contrôleur (Contraloría) généralde la République et autres, rapporteur: Ligia López Díaz.

[70] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 14 septembre 2001, rapporteur: Palacio Hincapié, affaire AP-100, demandeur: Procureur (Procurador) provincial d'Ibagué.

[71] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 31 octobre 2002, rapporteur: Hoyos Duque, affaire AP­059-01, demandeur: Jesús Orlando Mejía Yepez.

[72] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 31 octobre 2002, rapporteur: Hoyos Duque, affaire AP­059-01, demandeur: Jesús Orlando Mejía Yepez.

[73] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 16 février 2001, rapporteur: Hernández Enríquez, affaire AP-170, demandeur: Espaminonda Morena Parrado et autres. Voir dans le même sens: Conseil d'Etat colombien Première Section, 30 avril 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, affaire AP­00654-01, demandeur: Melly Rocío Mojica Castro.

[74] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 24 avril 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, affaire AP-8122-01, demandeur: Fernando Alberto García Forero.

[75] Conseil d'Etat colombien, Deuxième Section, rapporteur: Lemos Bustamante, affaire AP-212, demandeur: Rodolfo Puentes Suárez. Voir également: Première Section, 9 novembre 2000, affaire AP119. Voir dans le même sens au sujet d'une licence environnementale pour l'aviculture: TroisièmeSection, 15 novembre 2001, rapporteur: Giraldo Gómez, demandeur: Assemblée d'Action Comunalede la Arrobleda (Cauca), affaire AP-230.

[76] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 20 mars 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, affaireAP-0059, demandeur: Luis Gustavo Guzmán Leira et autres.

[77] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 24 octobre 2002, rapporteur: Arciniegas Andrade, demandeur: Lenis Francisco Saavedra et Sara Isabel Ríos, affaire cumulée AP-117: 25000-23-26-000­2001-9404-01 t 01-547.

[78] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 31 janvier 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, demandeur: Sandra Milena Rivera, affaire 18001-23-31-000-2000-0343-01. Voir également: Première Section, 27 février 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, demandeur: José del Carmén Espinoza, affaire AP-3448.

[79] Conseil d'Etat colombien, Deuxième Section, 28 septembre 2000, rapporteur: Orjuela Góngora, affaire AP-117, demandeur: Judith Correa Luque.

[80] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 20 mars 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, affaire AP-0059, demandeur: Luis Gustavo Guzmán Neira et autres.

[81] Comme exemples de jugements ayant trait à ce sujet, voir: Conseil d'Etat colombien, Première Section, 27 février 2003, rapporteur: Arciniegas Andrade, demandeur: José del Carmen Espinoza, affaire AP-3488; Première Section, 25 octobre 2001, rapporteur: Mendoza Martelo, demandeur: Adalberto Castro Mendez, affaire AP-0303; Première Section, 24 octobre 2002, rapporteur: Arciniegas Andrade, demandeur: Lenis Francisco Saavedra et Sara Isabel Ríos, affaire cumulée 25000-23-26-000- 2001-9404-01 y 01-547.

[82] « La presunción de legalidad de los actos administrativos y de validez de los contratos estatales en las acciones populares", publié dans la revue Responsabilidad Civil y del Estado del Instituto Antioqueño de Responsabilidad Civil y del Estado, année 2002.

[83] Conseil d'Etat colombien, Troisième Section, 18 mai 2000, affaire AP-038. Voir dans le même sens Deuxième Section, 23 mai 2000, affaire AP-125; Quatrième Section, 31 mai 2000, affaire AP-005.

[84] Conseil d'Etat colombien, Deuxième Section, Sous-section A, 5 juillet 2001, rapporteur: Nicolás Pájaro Peñaranda, demandeur: Sintrareginal, défendeur: Registre National de l'Etat Civil et autre, affaire AP-068-01.

[85] Cour Constitutionnelle colombienne, 14 avril 1999, affaire C-215.

[86] Conseil d'Etat colombien, Première Section, 24 mai 2001, rapporteur: Olga Inés Navarrete Barrero, demandeur: Personnel municipal de Sopó, affaire AP-076. Dans ce dossier, contrairement à ce qu'avait décrété le tribunal d'instance, le Conseil d'Etat a autorisé une plainte qui contestait un contrat de vente déjà exécuté.

[87] On notera à ce propos la phrase suivante du jugement du 28 septembre 2000 de la deuxième section du Conseil d'Etat, dans l'affaire AP-117, demandeur: Judith Correa Luque: « On dira que dans la présente affaire, la société fait un procès concernant la légalité de certains actes, qui pourrait en fin de compte changer la nature des actions populaires. Malgré tout, il faudrait répliquer en affirmant que puisqu'il s'agit d'une violation de droits, la seule manière d'établir la véracité des accusations du plaignant réside dans l'examen des faits, omissions et actes administratifs à la lumière des normes directrices, ce qui implique nécessairement un travail d'interprétation de la part du juge. Sans oublier de signaler que par la voie de la présente action, on ne pourrait jamais déclarer la nullité des actes examinés, alors qu'on pourrait le faire de la violation des droits et intérêts collectifs qui défendent et protègent les actions populaires ».

[88] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 9 novembre 2001, rapporteur: Quiñonez Pinilla, AP­194, demandeur: Rodolfo Puentes Suárez et autres.

[89] Fabrice Melleray, Essai sur la structure du contentieux administratif français. Pour un renouvellement de la classification des principales voies de droit ouvertes devant les juridictions à compétence générale, Editions L.G.D.J., Paris, 2001, p. 278.

[90] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives et judiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 136.

[91] Nous partageons entièrement l'affirmation de Luis Felipe Botero, qui donne un autre argument important pour soutenir la position défendue ici. Il formule cette dernière dans l'un de ses multiplescommentaires du livre déjà cité du professeur Tamayo Jaramillo, p. 178, avec l'idée qu'en droit colombien un des motifs de révocation des actes administratifs est précisément le fait que « ceux-ci nesont pas conformes à l'intérêt général ou social, ou attentent à celui-ci ».

[92] Conseil d'Etat colombien, Cinquième Section, 9 novembre 2001, rapporteur: Quiñonez Pinilla, affaire AP-194, demandeur: Rodolfo Puentes Suárez et autres.

[93] Voir notre essai "La acción de tutela y la responsabilidad extracontractual del Estado", article inclusdans Homenaje a Fernando Hinestrosa. Treinta años de Rectorado. Liber Amicorum. Estudios y Temas, Editions de la Universidad Externado de Colombia, 1993, 50 pages.

[94] Louis Boré, La défense des intérêts collectifs par les associations devant les juridictions administratives etjudiciaires, L.G.D.J., Paris, 1997, p. 125.

[95] Cour de Cassation française, Section Civile, 26 mars 1996, Perruche c/ Ponnoussany: Bull. Civ. 1, n° 156.

[96] Conseil d'Etat français, Ass., 2 juillet 1982, Rec., p. 266; AJDA, 1983, note JC, p. 206; RTDSS, 1993, 1983, 96, conclusions Pinot; Gaz. Pal. I, p. 193, note Moderne. Voir en sens contraire: Tribunaladministratif de Strasbourg, 21 avril 1994, Mme M... vs. Hospices Civils de Colmar, AJDA, 1994, p. 1837, conclusions de M. Martinez: cas d'une naissance malgré la stérilisation sollicitée par la mère, où l'on ne déclare pas de responsabilité.

[97] Voir en ce sens: Dominique Rousseau, Droit du contentieux constitutionnel, 6ème édition, Montchrestien, Paris, 2001, p. 256 et suivantes.

[98] Voir en ce sens notre travail "la responsabilidad del Estado colombiano por daño ambiental", article inclus dans le livre Responsabilidad por Daños al Medio Ambiente, Editions de la Universidad Externado de Colombia, Bogota D.C., 2000, pp. 127-199.

 


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