Numărul 2 / 2008

 

 

CODIFICATION ET RECODIFICATION

Idées, tendances, modèles et résultats contemporains

 

 

Csaba Varga*

 

 

 

I. Codification : le présent (1. Ses donnés / 2. Avec un éthos changé / 3. Avec une espérance tremblée / 4. Avec systémicité dans le centre) ; II. Codification : le futur (5. Défi par l’Union Européenne / 6. L’énigme de la convergence) ; III. Codification : le passé (7. Les origines reconsidérées / 8. La modernité reconsidérée / 9. La fonction du code transubstantiée)IV. Codification : en face d’un nouvel âge (10. Une conclusion méthodologique / 11. Avec des questions perpétuelles)

 

RésuméLa suprématie de la loi, avec sa prétention d’incarner de manière exhaustive le droit, montre les signes du déclin. L’exigence développée il y a un demi-siècle en tant que perfection logique de l’idéal européen de la codification, c’est-à-dire le remaniement récurrent et périodique des codes pour accorder la définition codifiée du droit aux conditions du moment, s’affaiblit. Dans l’abandon de la codification (en vue d’arriver à l’état de décodification), l’accent se déplace du code lui-même à la fonction que le code peut remplir. Le code en tant qu’une forme systémique de l’objectivation juridique susceptible de donner une réponse sans lacune à toute question inscrite à l’intérieur de son cadre de régulation, est finalement remplacé par l’actualité de toute réponse canalisée par le code, peut-être en ne proposant rien d’autre qu’un topos systémique, auquel conceptuellement ou institutionnellement cette réponse librement contextualisée peut renvoyer. En même temps, le noyau de la codification demeure l’idée de système telle qu’elle se manifeste dans sa composition et sa structure, mais aussi dans la réflexion doctrinale et les constructions conceptuelles qui l’entourent, y compris la jurisprudence.

 

 

 

 

 

Mots clés: codification, Europe, théorie de la codification

 

I. Codification : le présent

 

 

(1. Ses donnés)Que s’est-il passé sur le terrain de la codification pendant ce dernier quart de siècle ? [1] La pratique juridique semble suivre un sentier battu sans trop de soucis, mu par une dynamique interne. En revanche, la doctrine — posant de nouvelles cibles en réactivant des rêves européens millénaires et en reprenant des images partagées afin de répondre aux politiques actuelles de l’Union Européenne — semble prête à réviser, voir même à renverser des perspectives conventionnelles antérieures que l’on croyait fermement établies, espérant ainsi frayer de nouveaux chemins. La contestation en termes politiques et méthodologiques de la codification est redevenue très à la mode : elle est au cœur de la controverse, ses dilemmes apparaissent comme vitaux et déterminant en ce qui concerne la prise de décision ayant trait à notre avenir.

En considérant les épisodes distincts du passé récent comme des indications pures, on peut constater que plus d’une cinquantaine de codes a été promulguée à partir de la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. Durant une période relativement courte, nous avons assisté à la refonte complète des codes civils classiques au Portugal (1967), aux Pays-Bas (1992)[2], au Québec (1994)[3], à la réélaboration complète du code pénal en Espagne (1995)[4] et aussi en France qu’en Belgique, aussi bien qu’à la récodification du droit civil en Louisiane, en Allemagne (le droit des contrats) mais également en Europe Centrale et Orientale, notamment en Russie, en Pologne et en Hongrie (auxquelles nous pouvons ajouter la décision de refondre du code pénal en Hongrie)[5].

 

 

(2. Avec un éthos changé)Tout d’abord et de manière générale on peut formuler une observation plutôt choquante. Alors que la fin du second millénaire approchait, la codification elle-même perdait graduellement de sa pureté et de sa consistance par rapport aux idéaux classiques qui naguère formaient un système rigoureux et cohérent. Ceci se vérifie à plusieurs égards. D’un côté la suprématie de la loi, avec sa prétention d’incarner de manière exhaustive le droit, montre les signes du déclin[6]. D’un autre côté (et par suite du constat précédent) l’exigence développée, il y a un demi-siècle en tant que perfection logique de l’idéal européen de la codification, c’est-à-dire le remaniement récurrent et périodique des codes pour accorder la définition codifiée du droit aux conditions historiques, économiques et sociales du moment, s’affaiblit. Comme il est connu, s’étant fixé comme objectif l’incarnation du droit dans un code, la codification socialiste réalisa cette exigence de la manière la plus doctrinale, la plus pure et la plus conséquente. Par ailleurs, elle est devenue un schème qui — sous la pression de la modernisation — s’est transformé en modèle suivi avec enthousiasme par les pays en voie de développement d’Afrique et d’Asie.

Pour des considérations pratiques, nous pouvons comparer ce basculement dans l’extrême opposé à un mouvement de pendule. Dorénavant, il ne sera plus question de récodification, mais de la négation complète de la codification même (c’est-à-dire l’abandon de la codification en vue d’arriver à l’état de « décodification ») qui avance au premier plan de manière de plus en plus marquée pour constituer un nouveau point de repère[7]. Plus précisément, l’accent se déplace de manière progressive du code lui-même à la fonction que le code remplit. Autrement dit, le code en tant qu’une forme systémique de l’objectivation juridique susceptible de donner une réponse sans lacune à toute question inscrite à l’intérieur de son cadre de régulation, est finalement remplacé par l’actualité de toute réponse canalisée par le code, peut-être en ne proposant rien d’autre qu’un topos systémique, auquel conceptuellement ou institutionnellement cette réponse librement contextualisée peut renvoyer[8].

Selon l’opinion la plus répandue actuellement, celle que les idéologies postmodernes considèrent comme seule justifiable, le soi-disant « autoritarisme de la codification » du passé devrait céder la place (à la fois comme idéal et comme technique de la régulation pratique) à une sorte d’« ouverture démocratique », poursuivant certaines typologies du développement[9] dont les racines se prolongent surtout dans l’expérience américaine généralisée de manière à comprendre également la pratique européenne[10].

Comme conséquence logique, les législateurs d’aujourd’hui ont tendance à abandonner toute tentative de pureté et de cohérence systémique (comme si cela relevait d’une sorte d’atavisme doctrinaire), laissant la voie ouverte aux emprunts pragmatiques de n’importe où, ce qui revient à admettre le caractère partiel et fragmenté du résultat[11]. A cela s’ajoutent de nouvelles sortes de localisme, de transitionalisme et de pragmatisme qui font leurs chemins sous l’égide postmoderne de la mondialisation et qui expliquent la tentative d’absolutiser les efforts persistants actuels y compris le souhait de réécrire le passé (ce qui ne semble pas inédit, une telle pratique n’étant pas totalement inconnue anciennement en France). Il s’agit d’un tournant paradigmatique, d’une tendance qui semble se généraliser : cela est symptomatique, notamment dans le pays natal de la codification classique, le code amené par Napoléon, tout splendide et pérenne en tant que type (dans ses caractéristiques structurales), semble courir le risque d’effacement de la mémoire collective pour ne demeurer qu’un événement historique exceptionnel. La notion même de « codification » donc se relativise (ainsi que l’idée et la réalisation historique qu’elle accomplit) par l’assimilation réductrice de sa signification à la rationalisation d’un aspect du management de masse qu’implique l’administration publique de nos jours, c’est-à-dire de la consolidation ininterrompue du droit en vigueur (des lois aux actes de l’exécutif, y compris les règles administratives)[12]. Cette analyse à court terme, cette simplification extrême (qui rejoint la prédiction de « la fin de l’histoire » avec toutes les représentations conceptuelles erronées et a-historique inhérentes à l’utopisme contemporain de Francis fukuyama) — à quoi s’ajoute la nature controversée de la « codification » comprise comme une consolidation véritable qui doit d’abord « transcrire », ensuite « transgresser » la matière juridique positivée qu’elle traite en son sein, arrachant la matière juridique à son contexte originaire et la plaçant dans un autre contexte, pour ainsi passer à la « transdiction »[13] — constitue non seulement un « abus conceptuel » total, mais un signe évident de déclin[14]. Tout cela contribue progressivement à caractériser notre temps jusqu’au point où certains commentateurs croient déceler des tendances inverses, opposant celles des États-Unis à celles de l’Union Européenne. En somme, ils tendent à découvrir que si là-bas on observe une réaffirmation voire même le lancement de la codification, ici, sur notre continent, la décodification est à l’ordre du jour[15].

Une sorte de scepticisme domine donc aujourd’hui, d’abord sous la forme de la désillusion, ensuite comme un réveil général provoqué par la disparition des mythes entourant l’idéal européen de codification. S’étendant aussi au passé, ce scepticisme s’est transformé lentement mais sûrement en une perte de confiance dans la force régulatrice du droit et de sa prévoyance normative et a abouti à une déception générale quant à la codification elle-même[16]. Certaines analyses contemporaines tempérées la ramènent aux attentes exaltées et donc propres aux puristes (et à cet égard également doctrinaires), excessives en tout (et par conséquent non pratiques : elles se trouveront nécessairement inadaptées lorsqu’elles seront mises à l’épreuve du temps) fixées à l’époque des Lumières, au commencement de la période de la codification classique[17]. De cette reconnaissance, on n’hésite pas à tirer une conclusion immédiate : seule la codification envers laquelle ses créateurs se sont montrés les moins enthousiastes, les moins ambitieux, peut espérer un succès et une applicabilité durables[18].

 

 

(3. Avec une espérence tremblée)Mais justement, à quoi ressemble la codification à l’aube du nouveau millénaire et vers où se dirige-t-elle? La plupart des réponses semblent confirmer la position théorétique que j’ai tenue ailleurs[19]. Quelques rêveurs qui se penchent sur notre avenir la jugent comme une chose désespérément encastrée dans (en tant qu’elle est constituée par) nos idéaux du passé, et par conséquent la qualifient détatiste et dautoritaire puisqu’elle proclame ce qu’est le droit — en bref, ma position serait empreinte d’atavisme et, en tant que telle, devrait être dépassée. Par contraste, on pourrait lui opposer de manière justifiée l’image d’un code élastique, investi de beaucoup d’espoir projeté dans un futur code civil européen esquissé de manière vague, avec l’incertitude liée aux phases exploratoires et encore flou à beaucoup égards.

 

 

(4. Avec systémicité dans le centre)Selon la littérature théorétique sur la matière (sans tenir compte pour le moment des reconstructions déconstructives de demain), le noyau de la codification demeure l’idée de système[20] telle qu’elle se manifeste dans sa composition et sa structure, mais aussi dans la réflexion doctrinale et les constructions conceptuelles qui l’entourent, y compris la jurisprudence qui se réfère aux définitions codifiées des institutions, à des construits et à des dispositions juridiques :

 

« C’est en finir avec le flou, le vague, les frontières mal tracées et les divisions approximatives en produisant des classes claires, en opérant des coupures nettes en établissant des frontières tranchées » [21].

 

D’ailleurs, la codification comme système apparaît invariablement comme (1) un corps exclusif du droit qui met en oeuvre (2) lunité dans son terrain régulateur (3) avec cohérence logique et de manière conséquente[22]; ou, possédant des caractères de (1) complétude, (2) d’absence de contradictions et (3) d’économie régulatrice[23]; ou, en outre, comme un (1) énoncé du législateur (2) compréhensif et (3) systématique, (4) promulgué sous la forme d’un code[24]. En ce qui concerne donc cette question, l’attitude théorétique reste conservatrice : lorsque d’une part la voie de la collection pure et de l’incarnation textuelle du droit — que j’ai eu l’occasion de qualifier de quantitative — et d’autre part celle du remodelage systémique du droit selon un idéal logique — que je distingue sous le terme de qualitative— divergent en tant que types de codifications, les notions comprises sous les appellations de ‘code’ et de ‘codification’ se rapprochent à tel point que le deuxième terme finit par englober le premier, soit le type qualitatif, portant ainsi comme élément conceptuel sine qua non du droit traité dans sa systémicité.

En fait, c’est précisément cette distinction qui semble en voie de disparition, telle une réalisation du passé maintenant dépassée, selon les visions postmodernes et le volontarisme politique de l’Union Européenne qui n’est pas encore dotée d’une quelconque expérience pratique encourageant une régulation codificatrice et toute compréhensive.

 

 

 

II. Codification : le futur[25]

 

 

(5. Défi par l’Union Européenne)Le premier cobaye dans l’expérimentation que représente cette immense tâche actuellement en cours est l’effort d’élaboration d’une codification européenne du droit privé, quelle que soit la manière dont on s’y prend. En ce qui concerne les contours de cette codification, nous savons ce qui suit :

·elle n’aspire ni à la clarté conceptuelle, ni à la consistance, ni à la poursuite exclusive d’un modèle concret (existant) ou idéal[26] : néanmoins, on suppose qu’elle devra représenter l’héritage européen entier, voire même l’héritage atlantique, dans la tradition des valeurs et techniques envisagées comme un tout pratique (peut-être à la manière d’une mosaïque) dans une nouvelle qualité. En même temps,

·elle ne peut tendre ni à la perfection ni prétendre à une quelconque complétude exclusive[27]. En raison de la nouvelle définition du droit, il faut que cette codification accepte ouvertement — dans un contexte particulier de variation constante des intérêts et de dépendance par rapport aux mouvements institutionnels qui peuvent survenir à tout moment — le caractère transitoire et médiateur de sa tâche. Par conséquent, ayant tiré un enseignement des fiascos que la codification a rencontrés jusqu’à présent,

·elle ne peut avancer que de manière « rampante »[28]. Dès lors que cette expression métaphorique opère un consensus parmi les théoriciens qui participent au débat (révélant aussi le poète, le rêveur, l’innovateur ou le révolutionnaire social caché en chacun de nous, en dépit de son refoulement par notre formation académique), le raisonnement doctrinal (peut-être sec mais systématique) que nous trouvons dans les traités de théorie juridique, a cédé la place (de manière jusque ici inconnue dans la littérature juridique) à une sorte de subjectivisme rhapsodique qui comprend une multitude de rêves et le caractère illimité (qui rappelle à bien des égards l’extase de la soi-disant « lune de miel » des révolutions), voire même effréné et aléatoire, du credo suivant : « Tout est possible, car en vertu du pouvoir d’un club aussi grand, nous sommes en position d’atteindre nos objectifs, quels qu’ils soient ». D’un côté, d’aucuns continuent à rêver les yeux ouverts, espérant aboutir de manière ou d’une autre et sous une forme ou une autre au résultat final escompté : ils considèrent que ce résultat sera atteint suivant le modèle et avec l’automatisme du Volksgeist cher à la pensée de Savigny, grâce à la clarification émergente de principes à travers leur mise à l’épreuve par lapratique juridique, leur continuel remaniement, leur inlassable réajustement par la combinaison du travail de la communauté scientifique et de la doctrine avec celui de la force de socialisation de la jurisprudence vivante et les efforts dans l’enseignement disponible par le biais de formations générales et spécifiques[29]. D’un autre côté, des opinions divergentes croient que l’unité souhaitée de l’Union Européenne se réalisera à travers l’accumulation laborieuse de principes (qui devront par la suite être remodelés, réaffirmés et représentés par une véritable profession juridique transnationale européenne qui puisse s’élever au-dessus de la fragmentation nationale). Cette accumulation verra le jour au sein d’un enseignement professionnel et d’une pratique commerciale proprement européens, avec comme arrière plan une science juridique et une doctrine unificatrice. Par conséquent, c’est àla praticabilité que le nouveau credo européen appelle et non au scientisme pur ou à la complaisance égoïste et satisfaite de l’auteur, puisque ceci conduit inéluctablement à l’égocentrisme, n’entraînant qu’une plus grande complexité et des contradictions superflues, c’est-à-dire un conceptualisme abstrait et doctrinaire semblable à ces fruits desséchés et inertes, incapables de répondre véritablement aux défis actuels et pratiques. En revanche, nous avons besoin de nouveaux Portalis, car seule l’humilité de la tradition peut proposer les fondements d’une codification au niveau des principes fondamentaux[30]. Et enfin, certains auteurs — et ils sont exceptionnels si nous prenons en considération également les convictions personnelles — soulignent qu’il est un peu audacieux de rêver au-delà — et évoquent l’exemple du American Restatement of the Law et de la législation uniforme — d’une préparation expérimentale de projets tels que celui des Principes du droit européen des contrats ou celui des Principes de procédure civile européenne, afin qu’on arrive à décider, après avoir appris grâce à l’expérience pratique nouvelle, comment continuer (à condition d’avoir décidé d’aller plus en avant)[31]. En même temps et en liaison étroite avec ce constat,

·la question de la dualité et/ou de la convergence de la common law (anglaise) et du droit civil (continental) est posée comme un sujet vital toujours d’actualité[32]. Ce vieux-nouveau dilemme (auparavant la friandise préférée des seuls comparatistes, source de jouissances purement intellectuelles) est désormais une condition nécessaire d’une décision politique et de la possibilité de sa réalisation future, alors qu’il ne représentait hier qu’un vague pressentiment des conséquences présumables d’une telle décision. Dans cette optique, l’administration européenne commune de la justice telle qu’elle fonctionne à Luxembourg, à Strasbourg, etc., depuis quelques décennies ne requiert qu’un résultat partagé, commun à tous, sans mettre l’accent sur la manière par laquelle on est arrivé à ce résultat. Les modalités, la procédure et les sources de références qui ont servi durant ce processus ne sont pas jugées pertinentes. Néanmoins, une codification commune européenne, aujourd’hui envisagée, pénètre déjà au cœur du droit. Elle présuppose l’unification des esprits, des approches sous-jacentes, de la réflexion conceptuelle, subordonnés aux formes logiques et systémiques — c’est-à-dire la sensibilité, le talent et le style — qui à leur tour et tout au long des siècles passés ont non seulement offert à notre continent toute une palette des positivations du droit qui diverge en nature par rapport à celles qui sont développées sur les îles britanniques, mais par ailleurs, incarnent une voie et une direction diamétralement opposées aux attentes placées dans la future convergence européenne, tant dans l’expérience historique que dans la reconstruction théorétique, dans les cadres de la pensée politique et constitutionnelle, dans l’enjeu et la nature de la réflexion philosophique, soit, en somme, faisant un choix entre la dépendance pragmatique à l’expérience humaine et sociale ou la poursuite de la logique aride des schèmes conceptuels préconçus, et par conséquent dans les réalisations de la révolution accomplie de la pensée scientifique naturelle[33].

En résumé et pour simplifier tout en demeurant précis : il y a parmi nous, d’un côté, ceux qui, prêts à agir, attendent les ordres pour s’exécuter et ceux qui s’occupent les uns des autres en espérant que la diligence et la minutie qu’ils apportent à leur travail — invisible de l’extérieur — et leur sens des responsabilités produiront un jour le résultat longtemps espéré. Tous peuvent au meilleur des cas être des spécialistes du droit comparé qui se retranchent obstinément derrière les textes juridiques : mais aucunement des théoriciens, par ailleurs, sensibles aux approches historiques et anthropologiques qui tiennent également compte des fondements des cultures juridiques comparées[34].Ces derniers sont ceux qui savent déjà — ou au moins ceux qui prévoient au niveau de leurs hypothèses pour soutenir leurs démarches et leurs explorations — que le droit est loin d’être un mécanisme, construit par des éléments interchangeables selon un étalon fabriqué et fonctionnant comme une machine. Il est en revanche un aspect de la culture humaine vivante, de manière relative et à des fins professionnelles des autres facteurs et porteur de l’ordre en création de la communauté, seulement pour — ayant tiré de la circulation journalière des intérêts — être capable, avec une sécurité prévisible, de diriger, d’influencer et de contrôler la pratique de la résolution des conflits en accord avec des modèles préconstitués, et par là, rendant cet exercice impersonnel, dans l’esprit de l’ethos de l’ordre lui-même, c’est-à-dire, d’un Ordre extérieur qui est nécessairement dépersonnalisé, semblable à l’image du voile de la Justitia.

 

 

(6. L’énigme de la convergence)Un examen hâtif de la littérature abondante sur ce sujet suffit pour relever l’existence de recherches ardues et détaillées sur d’une part « l’européanisation » [35]intensive de la théorie juridique britannique et sur d’autre part tous ces « mythes de la codification » — à propos desquels, nous nous contenterons de citer un seul exemple:

 

« I. La codification peut proposer une formulation accessible et complète du droit, et peut faciliter le développement du droit de manière ordonnée. II. Les régimes juridiques codifiés sont rigides, et non susceptibles d’adaptation. III. L’accent que la common law met sur les techniques de case law la rend admirablement adaptable aux circonstances nouvelles »[36]

 

qui, bien entendu, pareilles aux chimères et aux attentes utopiques, ne peuvent être justifiés ni sur le terrain du droit civil ni sur celui de la common law.

Ce type d’avis se présente le plus souvent mêlé d’arguments qui relèvent de la croyance euphorique en une Europe Commune[37] ou au contraire d’arguments extrêmes qui rejettent cette thèse[38]. Les analyses des signes, des étapes et des événements du rapprochement éventuel du droit civil et de la common law (ou, au moins d’une interaction effective et d’une influence réciproque) sont relativement sporadiques. Certaines analyses prétendent par exemple qu’en Allemagne, la jurisprudence du Bürgerliches Gesetzbuch est passée de l’exégèse abordée anciennement comme « jeu d’échec juridique » à une approche en termes de « révolution de case-law »[39], alors qu’en même temps, « l’auto-affirmation d’une sorte de doctrinarisme s’accentue » dans la pensée juridique britannique (cela indique que « ces particularités et les aspérités de leurs contours sont en train de disparaître des deux côtés de la Manche »[40]). Toutefois, ce qui se révèle nécessaire est une voix calme qui désillusionne : sans applaudir ni s’opposer, elle devrait nous rappeler que, comparé à l’écoulement du second millénaire de l’histoire européenne, ce qui s’est passé jusqu’à présent n’est pas beaucoup ni nécessairement nouveau. Par conséquent, on peut constater que,

 

« conclure sur cette base que la common law est en voie “d’européanisation” est sans doute aussi imprudent que d’envisager qu’elle était isolée pour commencer »[41].

 

Et en effet, nous ne pouvons nous permettre d’oublier qu’il y a quelques décennies, l’idée même d’appliquer n’importe quelle formulation abstraite universelle, comme par exemple dans l’hypothèse de l’application directe et uniforme par un tribunal d’une charte des droits de l’homme, aurait paralysé d’effroi la Chambre des Lords. De manière semblable, les juristes britanniques ont prouvé leur incapacité ou leur opposition à proposer (peut-être par prétention) un moyen pour la division interne du droit anglais, plus convenable et plus pratique que la classification factuelle (c’est-à-dire la disposition ordonnancée des faits à partir des initiales de leur dénomination anglaise)[42] — convenant avec complaisance que la pensée humaine n’a jamais produit et ne produira probablement jamais quelque chose de plus adéquat que ce « chaos avec un index »[43]purement alphabétique qui identifie le topos et les contextes juridiques.

 

 

 

III. Codification : le passé

 

 

(7. Les origines reconsidérées)Maintenant, à l’aide d’un regard jeté sur le passé, à partir des problèmes d’aujourd’hui et de demain, nous pouvons nous demander comment la codification des différentes époques historiques est représentée dans la littérature récente à ce sujet.

En ce qui concerne ses plus anciennes manifestations, celles antérieures aux formes grecques et romaines, il est certain qu’elles ne constituaient, pour la plupart, pas des sources normatives du droit[44], mais des « vœux pieux et des résolutions morales plutôt que du droit effectif »[45], voire parfois, de simples et traditionnels manuels littéraires servant à la formation du personnel juridique[46].

En fait, surtout dans le cas des grandes œuvres qui ont marqué l’émergence de la codification de type classique(comme par exemple l’Allgemeines Landrecht[47] et le Code civil), et en dépit de l’origine autoritaire du premier et révolutionnaire du second, leur enchâssement dans la tradition[48] est de plus en plus redécouvert et accentué — particulièrement à la lumière des défis intellectuels et institutionnels actuels qui se réfèrent plus à Savigny qu’à Thibaut[49], en raison d’un « intérêt européen » commun ou, plus précisément, sous la pression du temps et faute de pouvoir faire autrement.

 

 

(8. La modernité reconsidérée)Partant, ce n’est pas par hasard qu’aujourd’hui la contribution personnelle de Portalis à la rédaction du Code civil est sous le feu de la rampe — ce qui contraste avec le ton dépréciatif utilisé antérieurement lorsqu’on la mentionnait[50] — et fait l’effet d’une révélation (révoquant son traité acrimonieux et désillusionné à l’aide d’une description de son époque sortant des sentiers battus, ce que jadis lui valait l’oubli). Ensuite, il n’est en rien étonnant qu’à travers l’interprétation du Code Napoléon en tant que phénomène sociologique nous commencions aujourd’hui à collecter les faits suivant sur J. E. M. Portalis (1746–1807) comme autant d’éléments qui nous renseignent sur sa personnalité : il s’était réfugié dans la partie septentrionale de l’Allemagne pendant la Révolution où il a établi des relations avec les Piétistes; son intérêt pour les œuvres de Pascal et de Montesquieu s’y était approfondi; enfin, c’était aussi durant cette période qu’il s’était mis à critiquer sévèrement la misère passée de son pays natal dans un essai publié après sa mort. Car en Allemagne, il avait, de son propre aveu, vu une excellente matérialisation de ce que l’on appelle lesprit philosophique : des petites universités, des cercles intellectuels fermés dépourvus de toute irradiation sociale ou politique significative où les idées n’étaient pas mues par la possibilité de leur réalisation, mais de ce fait ne pouvaient devenir véritablement dangereuses. La Révolution Française de son côté trouvait ses racines dans les salons parisiens, tels qu’ils avaient été lancés par les sophistes. Toute l’atmosphère des Lumières en France avec la diffusion directe d’idées, la mobilisation de son élite politique, la focalisation sur l’idée de système conceptuel conçu mentalement par anticipation et animé d’une pulsion d’application systémique, était susceptible d’attirer, à la fois, l’irresponsabilité et l’extrême cohérence. Imposée à la Nation en tant que pratique vivante, elle pouvait provoquer l’éventuelle (in)fortune d’une nation entière. Enfin, ce cri[51] qui se dégage des plaintes de Portalis pourrait rappeler au lecteur les critiques contemporaines concernant l’entière inutilité et l’intellectualisme aride qui marque notre modernité[52]. Ainsi, Portalis semble-t-il arrivait à

 

« une conviction philosophique ; c’était l’empiricisme mis en philosophie. Pas de système, mais une adaptation, une adaptabilité de la pensée aux différents besoins du moment. »[53]

 

Reconnaître à nouveau le moment de la tradition, incarné entre autres par la percée révolutionnaire française en matière de codification, mais aussi par le moment de lexpérience indispensable, même à côté de la raison et de la logique, ou réexaminer les controverses qui entourent la codification et qui ont donné naissance en Allemagne à l’École historique du droit à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle — eh bien, tout cela ne peut être aujourd’hui considéré comme relevant de manière exclusive de l’intérêt de l’histoire des idées. Après tout, nous devons chercher des points fixes qui nous aident à identifier les voies, les directions, qui seront empruntées à l’avenir. Plus précisément, nous réaliserons que la voie que nous emprunterons en tant qu’européens dans un avenir proche et dont nous pouvons déjà affirmer avec certitude son caractère unique et sans précédent, n’est en fait que l’extension au niveau européen — et avec une complexité tout européenne — de la décision aussi difficile que risquée à laquelle l’Allemagne du XIXème siècle était confrontée au niveau national, et donc du dilemme intellectuel que l’exemple de l’école historique allemande illustre le mieux[54].

 

 

(9. La fonction du code transubstantiée)En tout cas, la reconstruction historique de la genèse de l’Allgemeines Bürgerliches Gesetzbuch en Autriche reflète bien l’idée selon laquelle l’époque de la codification étatique était limitée au sens non seulement social mais également politique par le fait qu’elle incarnait et accentuait un niveau supérieur du développement universel. D’après son interprète contemporain,

 

« la codification du droit civil correspond à une tentative de réconciliation de la notion moderne de l’Etat en tant qu’autorité publique suprême exerçant un monopole de gouvernement, avec l’idée de l’Etat de droit en tant que catégorie objective et, en effet, absolue de la cohésion sociale, et en tant que telle autonome par rapport à la volonté suprême de l’autorité publique [...]. En Europe continentale, le droit civil codifié a assuré le fondement juridique d’un modèle social et politique durant le XIXème et la première moitié du XXème siècle : celui de l’Etat absolument souverain qui n’en était pas moins un Rechtsstaat. »[55]

 

A cette époque et dans ces circonstances la fonction qu’avait accomplie le code a été analysée par moi dans un travail antérieur, d’un côté comme la fonction socio-juridique principale de la codification nationale du droit et de l’autre comme la fonction non seulement strictement juridique et technique de la domination (étatique et centralisée) par le droit mais également par la déterminante de la vie « quotidienne » du droit, et par conséquent produisant des effets sociaux[56].

Une approche rétrospective adoptée par la critique actuelle nous permet d’observer jusqu’à quel point ces attentes majeures, cette pluralité de vocation, se sont réalisées.

 

« Evidemment, un certain nombre d’espoirs et d’attentes entretenus à l’époque des Lumières ne s’est pas réalisé ; les codifications n’ont ni rendu superfétatoires les travaux des juristes qualifiés ni conduit à une consolidation durable (ou à une fossilisation, dans sa version négative) du droit civil. Pourtant, ces codifications ont contribué à la fragmentation nationale de la tradition juridique européenne. »[57]

 

En fait, le commentaire ci-dessus illustre parfaitement comment certaines évaluations peuvent se révéler fausses et diamétralement opposées au résultat produit en raison de l’évolution historique et des développements concrets. En effet, à la lumière du processus international d’unification qui s’effectue au niveau européen, ce qui représentait (il y a juste un siècle ou deux) le symbole et le jalon de l’unification européenne est aujourd’hui (et non sans fondement) réinterprété comme une fragmentation nationale. L’affirmation suivante émise par l’historien du droit européen précédemment cité (qui se trouve bien versé en droit anglais) est tout aussi paradoxale :

 

« ce que les Allemands avaient réalisé par les armes sur les champs de bataille en France — l’unité politique — s’est maintenant accompli de manière pacifique en matière de droit civil: “Un Peuple. Un Empire. Un Droit.” »[58].

 

En effet, l’exigence de la connaissance populaire générale de la loi, de même que sa plénitude ne figurent plus parmi les rêves classiques et les aspirations placées dans la codification — tout au moins au sens où elle est accessible, connaissable et gérable[59]. Ce vœu rêveur de son caractère systémique parfait[60] et de son absence de lacunes[61] qui conduit à la notion d’exhaustivité régulatrice des principes (de leur caractère compréhensif), s’est révélé également vain. La tentative de son application concrète par l’interdiction de la jurisprudence (la négation du pouvoir d’interprétation du juge)[62] s’est révélée encore plus dérisoire.

Toutes ces nouvelles manifestations avaient d’une part certainement pour but le déplacement de la confiance du législateur à ceux qui administraient la justice[63] et subséquemment de rappeler le principe de la « construction en escalier » de l’ordre juridique. Elles empruntent au principe de la division du travail, couvrant toutes les étapes du processus de la formation du droit, les ramenant conceptuellement au « processus de la création du droit en deux étapes » (pour utiliser une expression kelsenienne qui figure dans son second grand ouvrage de 1922)[64]. D’autre part, elles continuent d’affirmer une des fonctions du code, celle que nous avons eu l’occasion de caractériser — à propos de la présentation de l’évolution qu’ont connu le Code civil et les autres codes classiques depuis la Seconde Guerre Mondiale — comme la fourniture de topoi systémiques à travers la construction de la jurisprudence qui se réfère au texte du code dans le développement pratique du droit, et qui devient au plus une sorte de guide régulateur sans exclure toutefois la pluralité d’alternatives[65].

 

 

 

IV. Codification : en face d’un nouvel âge

 

 

(10. Une conclusion méthodologique)Voilà, avec tout cela, nous retournons à notre problématique originaire, aux aspirations en vue d’une codification européenne commune en matière de droit privé, à la méthodologie de sa réalisation vraisemblable, à la formulation de sa fonction principale. Par suite,

 

« la codification […] assure un système dans lequel tous ceux qui appliquent et interprètent la loi peuvent découvrir une “varietat[es]inter se connexa[e][66], apprécier et faire attention au contexte normatif dans lequel une décision spécifique doit être vue, pour éviter toute inconsistance et arriver à des solutions qui en plus d’être justes et équitables en tant que telles, s’intègrent pleinement aux solutions trouvées à d’autres problèmes. […] Elle assure un foyer qui lui permet de relier entre eux des problèmes apparemment disparates et d’incorporer de nouveaux pans de pensée de manière harmonieuse »[67].

 

Ce faisant, nous avons également formulé le nouveau credo de la profession judiciaire à la lumière des conditions nouvelles et actuelles de la codification. Car,

 

« des problèmes difficiles peuvent tout simplement être analysés de manière erronée parce que, sans discipline conceptuelle, il est impossible de s’assurer que les procès antérieurs ressemblent vraiment à celui présent devant la cour. Le principe élémentaire de justice formelle, que des procès semblables reçoivent la même solution, n’est pas donc respecté non plus. Par conséquent, des domaines entiers du droit peuvent être négligés si, en l’absence d’une carte, soit d’une manière justifiée soit sans raisons suffisantes, personne ne peut les visiter. […] Il existe aussi un genre de risque d’un niveau plus abstrait : qu’en l’absence d’une structure conceptuelle commune, des juristes cessent de croire au caractère rationnel de leurs entreprises. […] C’est sans doute le point le plus important qu’il faille garder en mémoire : un code doit être ramené à la vie, et adapté, accordé au changement des demandes de l’époque à l’aide d’une jurisprudence et d’une élaboration doctrinale active et imaginative. Ceci demande que le législateur exerce sur lui-même une retenue considérable »[68].

 

 

 

(11. Avec des question perpétuelles)La leçon que nous pouvons tirer en toute sécurité en dépit de la poursuite des pratiques nationales, est que nous nous rapprochons de l’abord d’une croisée des chemins. La perspective d’une codification commune en droit privé à l’intérieur de l’Union Européenne ramène (à travers les murs de silence de plusieurs siècles) des souvenirs de réalisations et d’attentes d’un passé long de mille ans à l’intérieur duquel la validité universelle avait une dimension continentale comme expérience effective. Mais en même temps cela nous renvoie à ces points et moments (que pendant des siècles l’on estimait enterrés dans un passé à jamais révolu) à partir desquels les voies du droit civil et de la common law ont divergé partant d’un héritage gréco-romain acquis en commun et partagé, et de ses réadaptations séparées (mais en quelque sorte unifiées). Au fur et à mesure que l’unification européenne progressera, l’évaluation de la codification européenne s’inversera, revenant à des tendances, des valeurs et des techniques de régulation anciennes. Ainsi, suggère-t-on aujourd’hui de plus en plus que sur le continent, nous sommes moins devenus des unités étatiques unifiées par une séquence de droits nationaux, que des unités isolées les unes des autres et donc plutôt fragmentées, ayant été trop orgueilleux de notre héritage collectif prometteur durant la période transitoire d’un désordre infantile. Le sens véhiculé par notre passé et les chemins parcourus prêtent désormais à équivoque en raison de la multitude de versions alternatives proposées.

Le problème de la codification en Europe avait semblé plus ou moins résolu pour toujours il y a quelques décennies. Aujourd’hui, à la lumière des nouveaux défis qui proviennent des effets de la convergence européenne, nous devons non seulement reprendre nos investigations passées, mais en même temps réexaminer les fondements et les présuppositions derrière notre pensée, sans doute pas pour la dernière fois dans notre monde en perpétuel changement.


* Professeur et directeur de l’Institute de Philosophie du Droit à l’Université Catholique de Pázmány Péter de Hongrie [H–1428 Budapest 8, B.P. 6 : varga@jak.ppke.hu ] et conseiller scientifique à l’Institut des Sciences juridiques de l’Académie des Sciences de Hongrie [H–1250 Budapest, B.P. 25 : varga@jog.mta.hu ] WEB-page : http://varga.jak.ppke.hu.

[1] Comme antécédents, cf. Csaba Varga, Codification as a Socio-historical Phenomenon [1979] (Budapest : Akadémiai Kiadó 1991) viii + 391 pp. {sommaire : ‘La codification en tant que phénomène historico-sociale’ Acta Juridica Academiae Scientiarum Hungaricae 23 (1983) 1–2, pp. 219–224 et reprint en Csaba Varga, Études en philosophie du droit / Estudios en filosofia del derecho (Budapest: ELTE “Comparative Legal Cultures” Project 1994), pp. 294–299 [Philosophiae Iuris], et, plus récemment, un court article, « Codification », in The Philosophy of Law, an Encyclopedia, ed. Christopher Berry Gray (New York & London : Garland 1999), pp. 120–122 [Garland Reference Library of the Humanities, vol. 1743]. Comme compte-rendus de cette monographie ou de ses pré-publications, voir Gérard Conac in Revue internationale de Droit comparé 29 (1977) 4, pp. 861–862, Braun-Otto Bryde in Rabels Zeitschrift für ausländisches Privatrecht 42 (1978) 3, pp. 587–588, Karl-Eckhart Heinz in Archiv für Rechts- und Sozialphilosophie LXV (1979) 1, pp. 146–148, María del Refugio González in Boletino Mexicano de Derecho Comparado XII (1979), No. 34, pp. 300–302, Fausto E. Rodríguez in Boletino Mexicano de Derecho Comparado XII (1979), No. 35, pp. 672–673, Jörgen Dalberg-Larsen in Retfaerd [København] (1978), No. 8, pp. 86–93, F[erenc] Majoros in Revue internationale de Droit comparé 32 (1980) 4, pp. 873–876, J[ózsef] Szabó in Österreichische Zeitschrift für öffentliches Recht 32 (1981) 1, pp. 123–128, Stefan Šipoš in Universitate Babeş–Bolyai – Iurisprudentia 26 (1981) l, 76–78, L[eonard] Bianchi in Právny Obzor 64 (1981) 1, pp. 60–63, Рефeративный Журналь за Pубежём 4: Государство и Право [Moscow] 1981/4, pp. 26–29, Vera Bolgár in The American Journal of Comparative Law 30 (1982) 4, pp. 698–703, Georg Brunner in Rabels Zeitschrift für ausländisches Privatrecht 46 (1982) 3, pp. 579–580, Denis Tallon in Revue internationale de Droit comparé 44 (1992) 3, pp. 740–741, Paolo Cappellini in Quaderni Fiorentini per la Storia del Pensiero Giuridico Moderno XXI (1992), pp. 595–599, N. S. Marsh in International and Comparative Law Quarterly 42 (July 1993) 3, pp. 747–748, Pierre Legrand, « Strange Power of Words : Codification Situated », Tulane European & Civil Law Forum 9 (1994), pp. 1–33 et Paolo di Lucia in Sociologia del Diritto 21 (1994) 1, pp. 201–203.

[2] Cf. Arthur Hartkampf, « Statutory Lawmaking : The New Civil Code of The Netherlands », De Lege 1995, pp. 151–176.

[3] A cet égard, par exemple, voir Pierre Legrand, « De la profonde incivilité du Code Civil de Québec », pp. 1–13 et Sylvie Parent, « Le Code civil de Québec : Incivilité ou opportunité », pp. 15–25, les deux publiés dans Revue interdisciplinaire d’Études juridiques (1996), No. 36. Le fait que l’étude savante du code civil, avec une précision exemplaire, ait été achevée presque au dernier moment avant que le nouvel code n’entre en vigueur — Quebec Civil Law, An Introduction to Quebec Private Law, ed. John E. C. Brierley & Roderick A. Macdonald (Toronto : Edmond Montgomery Publications Ltd. 1993) lviii + 728 pp. —, pour être remplacé par un concept parfaitement nouveau et sa réalisation par le code, montre bien l’impuissance de la théorie juridique.

[4] Voir à cet égard Marta Gracia Blanco, « Codification et droit de la postmodernité : La création du nouveau Code pénal espagnol de 1995 », Droit et Société (1998), No. 40, pp. 509–534.

[5] Voir par exemple Renaissance der Idee der Kodifikation, Das neue niederländische Bürgerliche Gesetzbuch 1992, hrsg. Franz Bydlinski, Theo Mayer-Maly, Johannes W. Pichler(Wien, Köln, Weimar : Böhlau 1992), pp. 157 [Schriften zur Rechtspolitik 5]; Rodolfo Sacco, « Codificare : mode suprato di legifare? », Rivista di diritto civile XXIX (1983) 1, pp. 117 et s., et particulièrement p. 120; Konrad Zweigert & Hans-Jürgen Puttfarken, « Allgemeines und besonderes zur Kodifikation », in Festschrift für Imre Zajtay (Berlin : Duncker & Humblot 1982), pp. 569 et s. ; Ildikó Basa « Re-codification of the Civil Code ? Conception for Drafting the New Civil Code », Acta Juridica Hungarica (2005) 1–2, pp. 73–93 et István Sándor « Certain Issues of the Codification of the New Hungarian Civil Code » Studia Iuridica Caroliensa (2007), pp. 179–190.

[6] F. Kübler, « Kodifikation und Demokratie », Juristenzeitung (1969), pp. 645 et s., surtout la page 651. D’après lui, la crise du droit en général « n’est qu’un phénomène ordinaire dans une société démocratique industrielle [où] le caractère fragmentaire et périodique de la loi est dans l’ordre des choses ». On peut trouver une opinion similaire chez, par exemple, Josef Esser, « Gesetzesrationalität im Kodifikationszeitalter und heute », in Hans-Jochen Vogel& Josef Esser, 100 Jahre oberste deutsche Justizbehörde, Vom Reichjustizamt zum Bundesministerium der Justiz (Tübingen : Mohr 1977), pp. 13 et s. [Recht und Staat in Geschichte und Gegenwart 470].

[7] Natalino Irti, L’età della decodificazione 3ème éd. (Milano : Giuffrè 1989) 195 pp.

[8] Selon l’expression de Sacco, p. 125, ce n’est plus le code-forme qui est supérieur mais l’idée de sa capacité à fournir une solution : « Le code n’est pas dépassé. C’est l’idée qu’un code puisse être sans lacune qui est dépassée, et que ses paroles seules puissent résoudre tous les cas possibles de l’avenir. [Il codice non è {...} superato. È superata l’idea che un codice possa nascere privo di lacune, e che la sua sola lettera possa offrire una buona soluzione per tutti i possibili casi del futuro.] »

[9] Voir la première formulation de cette idée que j’ai proposé dans le même esprit — principalement inspirée par Richard A. Wasserstrom, The Judicial Decision, Toward a Theory of Legal Justification (Stanford : Stanford University Press 1961), pp. 122 et s.; Per Olof Bolding, « Reliance on Authorities or Open Debate? Two Models of Legal Argumentation », Scandinavian Studies in Law 13 (Stockholm : Almqvist & Wiksell 1969), pp. 65 et s.; Roberto Mangabeira Unger, Law in Modern Society, Toward a Criticism of Social Theory (New York & London : The Free Press 1976), ch. II; et particulièrement Philippe Nonet & Philip Selznick, Law and Society in Transition, Toward Responsive Law (New York : Harper & Row 1978) — dans mon « Átalakulóban a jog? » [Le droit en transformation?], Állam- és Jogtudomány XXIII (1980) 4, pp. 670–680 et « Logic of Law and Judicial Activity : A Gap between Ideals, Reality, and Future Perspectives », in Legal Development and Comparative Law, ed. Zoltán Péteri & Vanda Lamm (Budapest : Akadémiai Kiadó 1981), pp. 45–76, spécialement para. 5.

[10] Selon Kübler, p. 651, « l’Etat-codificateur autoritaire se transforme en un système qui aspire à l’ouverture démocratique où la législation devient un instrument politique qui requiert un ajustement permanent ». Selon Valérie Lasserre-Kiesow — « La codification allemande au XVIIIe siècle : Réflexions sur la codification d’hier et d’aujourd’hui », Archives de Philosophie du Droit 42 (1998), pp. 215–231, citation dans les pp. 223 et 231 — « l’avenir ne se trouve pas dans le passé [...]. [L]a codification fondée sur les paradigmes de l’étatisme et de perfection formelle et matérielle [est] très certainement sans avenir ».

[11] Selon Jean-Louis Bergel, « Les méthodes de codification dans les pays de droit mixte », in La formation du droit national dans les pays de droit mixte (Aix-Marseille : Presses Universitaires d’Aix-Marseille 1989), pp. 21–34, « il n’y a plus désormais que des droits mixtes » (p. 34), car « la mixité se répand et devient la règle générale » (p. 35).

[12] Par Guy Braibant, le président adjoint de la Commission supérieur de la codification — « Codification », in Encyclopaedia Universalis 6 (Paris : Encyclopaedia Universalis 1995), pp. 39–42 —, rêvant la pratique juridique actuelle (mue par l’hygiène journalière et dépourvue de toute armature conceptuelle), déclarait que la codification est un accomplissement magnifique et universel de l’humanité. Car, même si « la codification est une vieille ambition de l’humanité » (p. 39), ses manifestations « n’ont pas d’autre valeur que celle des textes que [elles] reprennent ou que [elles] édictent ». Il ajoute que « Quant à la codification, elle n’est rien d’autre qu’une opération ou une politique de fabrication de codes par regroupement de normes anciennes ou création de normes nouvelles » (p. 39). Par conséquent, le terme de « codification » lui-même possède une signification double. Même s’il existait une « grande oeuvre codificatrice », le Code civil, seuls les « codes systématiques » nous sont aujourd’hui disponibles. Etant donné, ajoute-il, que « la renaissance [de la codification] vient d’après la guerre » (p. 40).

[13] Gérard Timsit, « La codification : transcription ou transgression de la loi? », in Gérard Timsit, Archipel de la norme (Paris : Presses Universitaires de France 1997), ch. V, pp. 145–159, cf. à cet égard les pp. 151, 155 et 159 — citant la codification, néanmoins comme preuve de l’actualisation inhibitive, il parle de la consolidation sans arrêt [on retrouver cela chez Elisabeth Catta dans sa « Codification et la loi fétiche », in Interpréter le droit : Le sens, l’interprète, la machine, sous la dir. Claude Thomasset & Danièle Bourcier (Bruxelles : Bruylant 1997), pp. 63–69, mais aussi chez Denys deBéchillon, « L’imaginaire d’un code », Droits (1998), No. 27 : La codification 3, pp. 173–184] — et il réprouve la consolidation en raison du « dépassement des limites de la loi » (p. 151) et de la « momification de la loi » (p. 159) qu’elle opère. C’est-à-dire, il critique cette fausse codification car tout en fonctionnant avec la source originaire du droit, elle la falsifie de manière tacite, parce qu’elle la reformule par un autre moyen.

[14] Par exemple, cette extension conceptuelle est explicitement considérée comme un abus conceptuel par Dominique Gaurieu, « La rédaction des normes juridiques, source de la métamorphose du droit? Quelques repères historiques pour une réflexion contemporaine », Revue générale de droit [Ottawa] 31 (2001) 1, pp. 1–85.

[15] Shael Herman, « The Fate and the Future of Codification in America », in Essays on European Law and Israel, ed. Alfred Mordechai Rabello (Jerusalem : The Harry and Michael Sacher Institute for Legislative Research and Comparative Law [Hebrew University] 1996), pp. 89–129, surtout p. 124.

[16] Par exemple André-Jean Arnaud, Pour une pensée juridique européenne (Paris : Presses Universitaires de France 1991), p. 294 [Les voies du droit], parle des « mythes lénifiants et sécurisants de la simplicité, de la permanence et du caractère abstrait du droit ».

[17] Par exemple Karsten Schmidt, Die Zukunft der Kodifikationsidee : Rechtsprechung, Wissenschaft und Gesetzgebung vor den Gesetzeswerken des geltenden Rechts (Heidelberg : Müller 1992).

[18] « La raison pour laquelle les pays possédant de vieux codes civils sont encore capables de trouver leur chemin est liée au fait que leurs législateurs n’en ont pas trop fait. » Werner Lorenz, « On the “Calling” of Our Time for Civil Legislation », in Questions of Civil Law Codification, ed. Attila Harmathy & Agnes Németh (Budapest : Institute for Legal and Administrative Sciences of the Hungarian Academy of Sciences 1990), p. 128.

[19] Cf. Varga, Codification ..., op. cit.

[20] A l’égard du développement historique des concepts de ‘système’ et du ‘système juridique’, voir par exemple René Sève, « Introduction », pp. 1–10, et concernant leur analyse à travers l’exemple du Code civil,voir son « Système et code », pp. 22–86, les deux publiés dans Archives de Philosophie du Droit 31 : Le système juridique (1986).

[21] Pierre Bourdieu, « Habitus, code et codification », Actes de la recherche en sciences sociales (1986), No. 64, pp. 4–44, citation p. 42. « Le système [...] participant à la fois de la logique positive de la science et de la logique normative de la morale, donc capable de s’imposer universellement à la reconnaissance par une nécessité inséparablement logique et éthique. » (p. 4.)

[22] Michel Humbert, « Les XII Tables, une codification? », Droits (1998), No. 27 : La codification 3, pp. 87–112, relève la présence collective de ces caractères dans la lex duodecim tabularum afin de la qualifier de code (pp. 110–111).

[23] François Ost, « Le code et le dictionnaire : Acceptabilité linguistique et validité juridique », Sociologie et sociétés XVIII (avril 1986) 1, pp. 59–75.

[24] Reinhard Zimmermann, « Codification : History and Present Signification of an Idea », European Review of Private Law 8 (1995) 1, pp. 95–120, surtout les pp. 96–97.

[25] Pour un traitement monographique tout récent, voir Csaba Varga, Jogrendszerek, jogi gondolkodásmódok az európai egységesülés perspektívájában (Magyar körkép – európai uniós összefüggésben) [Systèmes juridiques et mentalités juridiques dans la perspective de l’unification européenne : Un panorama hongrois dans un contexte européen] (Budapest : Szent István Társulat 2008), ch. V : Közös jog : harmonizálás és kodifikáció [Droit commun : harmonisation et codification] et ch. III : Konvergencia ? A kontinentális és az angolszász mentalitás sorsa [Convergence ? Le destin des mentalités du continent et du common law] {sous presse} [Az uniós tagság következményei a magyar jogrendszerre és a közigazgatásra {Les conséquences de l’adhérence à l’Union sur le système juridique et l’administration publique hongrois}].

[26] Jürgen Basedow, « Codification of Private Law in the European Union : The Making of a Hybrid », European Review of Private Law 9 (2001) 1, pp. 35–49.

[27] D’après Lasserre-Kiesow, ce que durant la période de la codification classiques incarnait « la totalisation des connaissances » (p. 221) n’est rien d’autre qu’une « exaltation juridique patriotique et habituelle [...], un obstacle à l’idéal d’une Europe juridique » (p. 223). Pour un sens proche, voir également Wolfgang Wiegand, « Back to the Future? », Rechtshistorisches Journal (1993), Nr. 12, p. 283.

[28] Le terme ‘ramper’ renvoi au terme anglais ‘to creep’ qui signifie« to develop slowly and steadily [...] in the hope of advancement » (se développer de manière lente mais régulière dans l’espoir d’avancer). Le terme anglais a été utilisé au premier fois par Klaus Peter Berger, The Creeping Codification of the Lex Mercatoria (The Hague : Kluwer Law International 1999).

[29] Klaus Peter Berger, « The Principles of European Contract Law and the Concept of ‘Creeping Codification’ of Law », European Review of Private Law 9 (2001) 1, pp. 21–34.

[30] Ole Lando, « Some Features of the Law of Contract in the Third Millennium », Scandinavian Studies in Law 40 (Stockholm : Almqvist & Wiksell 2000), pp. 343–402, spécialement les pp. 361–363.

[31] Ewond Hondius, « Towards a European Civil Code », in Towards a European Civil Code, ed. Arthur Hartkamp, 2nd ed. (Nijmegen : Ars Aequi Libri & The Hague, Boston : Kluwer 1998) xiii + 652 pp., pp. 3–19.

[32] Cf. The Clifford Chance Millennium Lectures, The Coming together of the Common Law and the Civil Law, ed. Basil S. Markesinis (Oxford & Portland, Oregon : Hart 2000) vii + 255 pp., puis spécialement l’article suivant dans le même ouvrage : Basil S. Markesinis, « Our Debt to Europe : Past, Present, and Future», pp. 37–66; Vivian Crosswald Curran, « Romantic Common Law, Enlightened Civil Law : Legal Uniformity and the Homogenization of the European Union », The Columbia Journal of European Law 7 (2001) 1, pp. 63–126. Un des contributeurs — R. H. Helmholtz, « Continental Law and Common Law : Historical Strangers or Companions ? », Duke Law Journal 1990/6, pp. 1207–1228 — remarque en concluant que « les juristes de common law ont toujours préféré éviter certains aspects du droit continental, cependant ils le considèrent habituellement comme une ressource ou une référence à laquelle on peut faire appel au besoin, pas comme un étranger » (p. 1228).

[33] Pour les opinions divergentes voir Csaba Varga,Lectures on the Paradigms of Legal Thinking (Budapest : Akadémiai Kiadó 1999) vii + 279 o. [Philosophiae Iuris]. Pour ses applications voir aussi Csaba Varga, Theory of the Judicial Process : The Establishment of Facts (Budapest : Akadémiai Kiadó 1995) vii + 249 pp., avec l’aperçu critique par Massimo Vogliotti in Revue interdisciplinaire d’Etudes juridiques (1997), No. 38, pp. 235–237.

[34] Pour les distinctions conceptuelles et disciplinaires, et les exigences des approches nouvelles, cf. Csaba Varga,« Comparative Legal Cultures : Attempts at Conceptualization », Acta Juridica Hungarica 38 (1997) 1–2, pp. 53–63 et « Comparative Legal Cultures? Renewal by Transforming into a Genuine Discipline », Acta Juridica Hungarica 48 (2007) 2, pp. 95–113. Ces deux articles traitent de la thématique développée dans Comparative Legal Cultures, ed. & introd. Csaba Varga (Aldershot, Hong Kong, Singapore, Sydney : Dartmouth & New York : The New York University Press 1992) xxiv + 614 pp. [The International Library of Essays in Law & Legal Theory, Legal Cultures 1] et European Legal Cultures, ed. Volkmar Gessner, Armin Hoeland, Csaba Varga (Aldershot, Brookfield USA, Singapore, Sydney : Dartmouth 1996) xviii + 567 pp. [Tempus Textbook Series on European Law and European Legal Cultures I].

[35] Par exemple, Reinhard Zimmermann, « Der europäische Charakter des englischen Rechts : Historische Verbindungen zwischen civil law and common law », Zeitschrift für Europäisches Recht I (1993), pp. 4 et s.; J. Levitsky, « The Europeanization of the British Legal Style », The American Journal of Comparative Law 42 (1994), pp. 347 et s.

[36] Basil A. Markesinis, « The Destructive and Constructive Role of the Comparative Lawyer », [originellement paru dans Rabels Zeitschrift (1993), pp. 438–448], in Basil A. Markesinis, Foreign Law and Comparative Methodology, A Subject and a Thesis (Oxford : Hart 1997), pp. 36–46, citation aux pp. 37–38.

[37] Basil Markesinis, The Gradual Convergence : Foreign Ideas, Foreign Influences and English Law on the Eve of the 21st Century (Oxford : Clarendon Press 1994); James Gordley, « “Common Law and Civil Law” : Eine überholte Unterscheidung », Zeitschrift für Europäische Privatrecht I (1993), pp. 498 et s.

[38] Cf., par exemple, Pierre Legrand, « Legal Tradition in Western Europe : The Limits of Commonality », in Transfrontier Mobility of Law, ed. Robert Jagtenberg, Esin Örücü, Annie de Roo (The Hague, London, Boston : Kluwer 1995), pp. 63–84 et « How to Compare Now », Legal Studies 16 (1996), pp. 232 et s. Par exemple Luigi Mengoni, L’Europa dei codici o un codice per l’Europa ? [L’Europe des codes, ou un code pour l’Europe ?] (Roma : Centro di studi e ricerche di diritto comparato e straniero 1993), p. 3 [Saggi, conferenze e seminari 7], exclue du cercle des alternatives possibles l’unification par voie de codification : « reconnaître qu’un code pour l’Europe n’est pas une alternative réelle ».Pierre Legrand, « Brèves réflexions sur l’utopie unitaire en droit », Revue de la common law 3 (2000) 1–2, pp. 111–125 cite de l’œuvre de P. d’Oribane, Cultures et mondialisation (Paris : Seuil 1998), pp. 324–325, selon lequel « la raison, dont les Français ont le goût est plus noble, plus vouée à la beauté de la théorie, plus attachée à ce qui est pur et gratuit, plus éprise de systèmes généraux et d’idées, plus brillante, plus féconde en démonstrations élégantes, plus vouée à la grandeur que la raison que cultive les [Anglais] ».

[39] Josef Partsch, Vom Beruf des römischen Rechts in der heutigen Universität (Bonn : Cohen 1920), p. 39, et John P. Dawson, The Oracles of the Law (Ann Arbor : University of Michigan Law School 1968), p. 432, cités parmi d’autres par Reinhard Zimmermann, Roman Law, Contemporary Law, European Law : The Civilian Tradition Today (Oxford : Oxford University Press 2001) xx + 197 pp. [Clarendon Law : Lectures].

[40] Reinhard Zimmermann, « Savigny’s Legacy : Legal History, Comparative Law, and the Emergence of a European Legal Science », The Law Quarterly Review 112 (October 1996), pp. 576–605, surtout p. 590. La citation se trouve à la page 589.

[41] Xavier Lewis, « The Europeanisation of the Common Law », in Transfrontier Mobility of Law, pp. 47–61., citation p. 61.

[42] Le but de The Division and Classification of the Law, ed. J. A. Jolowicz (London : Butterworths 1970) vi + 90 pp. est de l’aveu général rien d’autre qu’un « plaidoyer en faveur d’une classification factuelle du droit […] une division factuelle du contenu du droit » (p. 7).

[43] Cette expression de Sir Thomas Holland est citée par N. Marsh, in International & Comparative Law Quarterly 30 (1981), p. 488.

[44] « Les codes juridiques n’ordonnent nulle part, ni dans leur prologue, ni dans leur post-face, à quiconque d’obéir à leurs dispositions. Les jugements de procès ne prêtent nullement attention aux codes juridiques. » A. Walther, Das altbabylonische Gerichtswesen (Leipzig : Hinrichs 1917), p. 227.

[45] J. J. Finkelstein, « Ammisaduqa’s Edict and the Babylonian “Law Codes” », Journal of Cuneiform Studies 15 (1961), pp. 91–104, citation en p. 102. : « leurs objectifs primaires étaient de démontrer au public, aux générations et rois futurs et en premier lieu, aux dieux, la preuve de l’exécution par le roi du mandat qu’il a reçu des dieux » (p. 103). — Autrement dit, « Le code d’Hammurabi […] — similairement à l’ensemble des codifications Acadiennes et Sumériennes antérieures — n’avait rien à voir avec la pratique juridique de son temps. Dont le contenu peut être interprété à partir de plusieurs points de vue principaux, comme la formulation littérale et traditionnelle des obligations sociales du Roi et comme la traduction de la conscience du Roi dans la différence entre la situation existante et la situation souhaitée ». A. Leo Oppenheim, Ancient Mesopotamia :Portrait of a Dead Civilization, rev. ed. (1977). (Je note que cette œuvre comprend une remarque qui nous amène à réfléchir et à mieux comprendre le développement européen : l’approche fatale qui consiste à tenter de faire correspondre la réalité au texte était inconnue en Mésopotamie et probablement ailleurs au Proche-Orient antique. Cette approche, fruit d’un changement de grille comportemental, n’est apparue qu’ultérieurement et dans un développement certainement périphérique, précisément dans le judaïsme qui désirait produire des rapports sociaux spécifiques pour des motivations idéologiques précises.)

[46] A. Leo Oppenheim, Ancient Mesopotamia (Chicago : University of Chicago Press 1964), pp. 14–21. En ce qui concerne toutes ces formes primitives, voir Raphael Sealey, The Justice of the Greeks (Ann Arbor : The University of Michigan Press 1994) xiii + 164 pp.

[47] Selon Peter Stein, Roman Law in European History (Cambridge : Cambridge University Press 1999) pp. x et 137, à la page 112, le rédacteur principal de l’Allgemeines Landrecht était Carl Gottlieb Suarez, qui partageait les idées de Christian Wolff selon lesquelles l’empereur doit guider ses sujets pour qu’ils mènent une vie parfaitement raisonnable. Par conséquent, le Code prussien devait avoir un objectif éducatif et s’adresser au citoyen ordinaire, il devait être compréhensible, clair et résolu.

[48] James Gordley, « Myths of the French Civil Code », The American Journal of Comparative Law 42 (1994), pp. 459 et s.

[49] Anton Friedrich Justus Thibaut, Über die Nothwendigkeit eines allgemeinen bürgerlichen Rechts in Deutschland (Heidelberg 1814) et Friedrich Carl von Savigny Von Beruf unserer Zeit für Gesetzgebung und Rechtswissenschaft (Heidelberg 1814), tous les deux parus dans Thibaut und Savigny : Ihre programmatische Schriften, hrsg. Hans Hattenhauer (München : Vahlen 1973) 298 pp., pp. 61 et s., pp. 95 et s. En ce qui concerne le mouvement qu’ils représentent et leur débat, voir Hans Wrobel, Die Kontroverse Thibaut–Savigny im Jahre 1814 und ihre Deutung in der Gegenwart [Diss.] (Bremen 1975) v + 307 pp.

[50] Par exemple, Marcel Planiol Traité élémentaire de droit civil I (Paris : Pichon & Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence 1900), 80. § : « n’a point dépassé la médiocrité ».

[51] « Quel bien n’eut-on pas continué [3e éd., p. 301] de faire, si l’esprit de système n’eut pas jeté des erreurs dangereuses au milieu des vérités les plus utiles et si les théories exagérées et absurdes n’eussent pas étouffé les sages leçons de l’expérience? ». « Ce ne sont pas des sophistes, mais des hommes de génie, des hommes à grand caractère et à vues profondes, qui ont fondé les sociétés, bâti les villes et institué les peuples. Les sophistes ne viennent jamais qu’à la suite de la corruption; ils en naissent; ils sont peu propres à la corriger, sous leur triste influence, les esprits se dégradant autant que les cœurs. Dès qu’on a rédigé une [3e éd., p. 403] idée, on croit avoir fait un établissement. Mais comme les idées que l’on rédige n’ont aucune prise sur les hommes, elles ne peuvent prendre aucune racine sur le sol où on les sème. On est forcé de multiplier les lois, on avilit la législation. En attendant, tout se perd car le faux esprit philosophique est une lime sourde qui use tout ». J. E. M. Portalis (1746–1807), De l’usage et de l’abus de l’esprit philosophique durant le XVIIIe siècle (Paris 1820, 3e éd. 1834), dans une réédition de textes assemblés, J. E. M. Portalis, Écrits et discours juridique et politique (Aix-Marseille : Presses Universitaires d’Aix-Marseille 1988), pp. 398–399.

[52] Concernant les positions actuelles à propos de l’intellectualisme, cf. spécialement Jeane J. Kirckpatrick, « Introduction », in Jean J. Kirckpatrick, Dictatorship and Double Standards : Rationalism and Reason in Politics (New York : Simon and Schuster 1982), pp. 1–18. Concernant ma position, voir « A racionális jogszemlélet eredendő ambivalenciája : Emberi teljességünk széttörése a fejlődés áraként ? » [L’ambivalence inhérente à l’approche juridique rationaliste : Un développement au prix de la fragmentation de notre intégrité humaine ?], in A jogtudomány és a büntetőjog dogmatikája, filozófiája : Tanulmánykönyv Békés Imre születésének 70. évfordulójára [Philosophie du droit et droit pénal : Mélange offert au professeur Imre Békés], sous la dir. de Béla Busch, Ervin Belovics, Dóra Tóth (Budapest : [Osiris] 2000), pp. 270–277 [A Pázmány Péter Katolikus Egyetem Jog- és Államtudományi Karának könyvei], également Csaba Varga « Önmagát felemelő ember ? Korunk racionalizmusának dilemmái » [L’homme qui s’élevait lui-même ? Les Dilemmes de rationalisme à notre époque], in Sodródó emberiség [La dérive de l’espèce humaine : autour de l’œuvre de Nándor Várkonyi Le cinquième homme] sous la dir. Katalin Mezey (Budapest : Széphalom 2000), pp. 61–93. Pour la significance théorique de la transition, cf. Csaba Varga, Transition to Rule of Law : On the Democratic Transformation in Hungary (Budapest : ELTE “Comparative Legal Cultures” Project 1995) 190 pp. [Philosophiae Iuris] et Transition? To Rule of Law? Constitutionalism and Transitional Justice Challenged in Central & Eastern Europe (Pomáz: Kráter 2008) 292 pp. [PoLíSz series 7].

[53] Jean Carbonnier, « Le Code Napoléon en tant que phénomène sociologique », Revue de la Recherche juridique : Droit prospectif 1981/3, p. 335.

[54] Particuliérement cf. Zimmermann, Roman Law ...,op.cit., pp. 14–17.

[55] Henry E. Strakosch, State Absolutism and the Rule of Law : The Struggle for the Codification of Civil Law in Austria, 1753–1811 (Sydney : Sydney University Press 1967) vii + 267 pp., citation dans l’épilogue p. 219.

[56] Voir Varga, Codification ... , op. cit.

[57] Zimmermann, Roman Law ... , op. cit., p. 1.

[58] Ibid., p. 53, citant ErnstZittelmann, « Zur Begründung des neuen Gesetzbuches », Deutsche Juristenzeitung (1900), p. 2. De plus chez Windscheid dans « Das römische Recht in Deutschland », in BernhardWindscheid, Gesammelte Reden und Abhandlungen sous la dir. de PaulOertmann (Leipzig : Duncker & Humblot 1904), p. 48. on trouve le même souhait : donner un « droit allemand à la nation allemande » en édifiant « une cathédrale de splendeur national ». Cela peut sembler ironique, mais trouve sans doute son explication dans le contexte historique des critiques : le premier projet du Bürgerliches Gesetzbuch (1888) allemand « avait été condamné pour son caractère trop abstrait et pédant, il était dénoncé comme un manuel pandectiste coulé dans un moule légaliste et par conséquent comme non-germanique; on l’accusait d’être trop loin des réalités de la vie et de manquer totalement de considérations sociales. » Cf. aussi Varga, Codification…, op.cit., p. 135, note 84.

[59] « Aujourd'hui, on n’espère plus qu’un citoyen ordinaire saisisse le droit. [...] Un code peut être souhaitable ou pas : qu’il échoue à promouvoir une connaissance générale du droit ne peut en aucune manière être considéré comme un argument décisif dans cette controverse ». Zimmermann, « Codification…», op. cit., p. 108.

[60] « En lisant les travaux préparatoires, on s’amusera à constater que le débat le plus virulent était celui qui entourait deux simples mots, ‘petits lièvres’, dans une section relative aux dommages causés par les animaux sauvages : des mots durs étaient échangés, et à un moment donné, l’ensemble de ce projet grandiose risquait d’être emporté par un conflit d’intérêts concernant le sport et l’agriculture. C’est la touche d’humour qui vise à soulager de tant de vertu civique. » — note Frederic William Maitland« The Making of the German Civil Code », in Frederic William Maitland, The Collected Papers ed. H. A. L. Fisher, vol. III (Cambridge : University Press 1911), p. 482 — qui par la suite déclare qu’en dépit de cela, le tout l’emporta sur les parties.

[61] Cf. Heinz Hübner, Kodifikation und Entscheidungsfreiheit des Richters in der Geschichte des Privatrechts (Königstein : Hanstein 1980) 74 pp. [Beiträge zur neueren Privatrechtsgeschichte 8].

[62] Pour Frederic le Grand — Publikationspatent (1794), art. XVIII —, les juges ne doivent pas « s’autoriser à s’écarter arbitrairement des termes précis et explicites de la loi, même de manière réduite, en prétendant poursuivre un raisonnement logique ou sous prétexte d’une interprétation fondée sur le but et les finalités de la loi. »

[63] Cet échec obligatoire est vérifiable tout au long de notre histoire, comme l’analyse de Hans-Jürgen Becker, « Kommentier- und Auslegungsverbot », in Handwörterbuch zur Deutschen Rechtsgeschichte hrsg. Adalbert Erler et al., II (Berlin : Schmidt 1978), pp. 963 et s., le montre.

[64] Hans Kelsen, Allgemeine Staatslehre (Wien : [als Manuskript gedruckt] 1922).

[65] Et il s’agissait d’un déplacement radical, équivalent à l’abandon de la fonction originelle qui a amené la codification, puisque par conséquent, le code perd le rôle qu’il avait dans la définition du droit pour se limiter à l’indication toute simple du topos systémique du modelage pratique du droit. Cf. Varga, Codification ..., op.cit.,particulièrement ch. V, para. 5.

[66] Christian Wolff, Institutes juris naturae et gentium, § 62.

[67] Zimmermann, « Codification ... », p. 110.

[68] Ibid., p. 114. Cf. également au sens similaire dans Heinrich Kötz, « Taking Civil Codes Less Seriously », Modern Law Review 50 (1987), pp. 1 et s., particulièrement pp. 13 et s. et dans Peter Birk, « The Need for the Institutes in England », Zeitschrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte : Romanistische Abteilung 108 (1991), pp. 708 et s.

 


« Back