Numărul 2 / 2005

 

 

LA TUTELLE DU CONSOMMATEUR DANS LE DROIT ITALIEN DES CONTRATS

MARIO ZANA

Professeur titulaire de Droit Privé

Faculté de Droit - Université de Pise

 

SOMMAIRE 1. Introduction 2. Contrats des consommateurs: technique d'exécution des Directives communautaires 3. Clauses abusives dans les contrats des consommateurs: cadre d'application 4. Clauses vexatoires 5. Inefficacité des clauses vexatoires 6. Vente des biens de consommation 7. Tutelle inhibitoire des droits des consommateurs

 

1.      Lors de sa publication en 1942, le Code civil italien ne contenait aucune disposition concernant expressément le « consommateur » bien que, à l'avant-garde par rapport aux autres codifications européennes, le législateur n'avait pas complètement négligé l'exigence de garantir une sorte de protection du contractant dit faible.

Dans les intentions des codificateurs, la partie se trouvant face à l'alternative de « prendre ou laisser » était considérée en condition de faiblesse : condition qui, dans la plupart des cas, se vérifie en présence de clauses souvent contenues dans des formulaires préparés unilatéralement par la partie adverse - habituellement un entrepreneur - dans le but de réglementer une série indéfinie de rapports contractuels.

Dans le Code civil, les prévisions des articles 1341, 1342 et 1370 revêtent donc une importance de premier ordre. En particulier, l'art. 1341, deuxième alinéa, prévoit l'inefficacité, quand elles ne sont pas approuvées par écrit, des clauses contenues dans les conditions générales d'un contrat ou dans des contrats conclus au moyen de formulaires - clauses généralement dites « vexatoires » - qui fixent, en faveur de celui qui les a conçues, des limitations de responsabilité, la faculté de résilier ou de suspendre l'exécution du contrat, ou bien qui imposent à l'autre contractant des déchéances, des limitations à la faculté d'opposer exception, des restrictions à la liberté contractuelle dans les rapports avec les tiers, la prorogation ou le renouvellement tacite du contrat, des clauses compromissoires ou de dérogation à l'autorité judiciaire compétente. Dans le cas de contrats conclus à travers la souscription de formulaires conçus par une des parties pour discipliner de façon uniforme certains rapports contractuels, l'art. 1342 donne la priorité aux clauses ajoutées au formulaire par rapport aux autres dans le cas où, même si elles n'ont pas été effacées, les premières se révèlent incompatibles avec les deuxièmes. Enfin, l'art. 1370 prévoit que les clauses insérées dans les conditions générales de contrat ou dans des formulaires conçus par un des contractants doivent être, en cas de doute, interprétées en faveur de la partie non prédisposant (principe dit de l'interpretatio contra proferentem).

La conscience de l'efficacité limitée d'une tutelle de ce genre, fondée exclusivement sur un contrôle formel et qui ne s'adresse nullement à un contractant faible bien identifié, avait depuis longtemps porté à encourager des interventions législatives en faveur du consommateur, même à la lumière des premières initiatives du Conseil des Communautés Européennes et du Conseil d'Europe : voir la « Charte Européenne de Protection du Consommateur », approuvée par l'Assemblée consultative du Conseil d'Europe en 1973, ainsi que le « Programme préliminaire C.E.E. pour une politique de protection et d'information du consommateur » du 14 avril 1975.

Malgré cela, le cadre normatif en Italie reste invarié pendant cinquante ans : c'est seulement grâce à ce qui a été appelé l' « interventionnisme massif » de la Communauté Européenne que le droit des contrats des consommateurs a été introduit dans le système juridique italien à travers la mise en œuvre de Directives communautaires à partir des années quatre-vingt dix jusqu'à aujourd'hui.

Les Directives exécutées sont, entre autres, par ordre chronologique, la Directive n. 85/577/CEE du 20 octobre 1985, en matière de contrats conclus en dehors des entreprises commerciales, avec le décret législatif 15 janvier 1992 ; la Directive n. 90/88/CEE du 22 février 1990, en matière de crédit de consommation, avec les articles 18-24 de la loi 19 février 1992, n. 142, (loi dite Communautaire 1991) ; la Directive 90/314/CEE du 13 juin 1990 n. 314, en matière de voyages, vacances et circuits « tout compris », avec le décret législatif du 17 mars 1995, n. 111 ; la Directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats avec les consommateurs, avec l'art. 25 de la loi du 6 février 1996, n. 52 (loi dite Communautaire 1994) ; la Directive 94/47/CEE du 26 octobre 1994, concernant la protection des acheteurs pour certains aspects des contrats en matière d'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel d'immeubles, avec le décret législatif du 9 novembre 1998, n. 427 ; la Directive 97/7/CEE du 20 mai 1997, en matière de contrats à distance, avec le décret législatif du 22 mai 1999, n. 185 ; la Directive 98/27/CEE du 19 mai 1998, relative à des dispositions inhibitoires pour la tutelle des intérêts des consommateurs, réalisée par la loi du 1 mars 2002, n. 39, qui modifie la loi du 30 juillet 1998, n. 281, avec la « discipline des droits des consommateurs et des usagers » ; la Directive 1999/44/CEE du 25 mai 1999, sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, avec le décret législatif du 2 février 2002, n. 24 ; la Directive 2000/31/CEE du 8 juin 2000, concernant certains aspects juridiques de la société de l'information, en particulier le commerce électronique sur le marché intérieur, avec le décret législatif du 9 avril 2003 n. 70.

La quantité du matériel normatif ci-dessus mentionné est telle qu'elle ne permet pas une analyse précise des différentes applications ; par contre, elle incite à faire un choix dans l'exposition des aspects les plus importants de la législation en matière de consommation, et donc à examiner tout d'abord la technique utilisée par le législateur italien en phase de réception des Directives, pour pouvoir évaluer ses conséquences sur le droit « commun » des contrats. Parmi les disciplines spécifiques, nous examinerons en particulier celle concernant les clauses abusives dans les contrats des consommateurs, et celle concernant la vente des biens de consommation ; ces deux disciplines revêtent une grande importance en raison de la place qu'elles occupent dans le code civil, ainsi que du caractère innovateur des solutions juridiques. Enfin, nous analyserons le profil de l'action inhibitoire en tant qu'instrument efficace pour la tutelle de la liberté de décision du consommateur.

2.      En Italie, le droit des contrats des consommateurs s'est formé sous le signe d'une technique législative fortement conditionnée par la provenance supranationale du matériel normatif.

Nous pouvons analyser l'influence de la genèse communautaire à partir de deux points de vue : par rapport aux sources du droit et par rapport à la terminologie utilisée dans les dispositions de réception des directives.

Du premier point de vue, il est évident que les Directives Communautaires ont été introduites dans le système juridique national en recourant fréquemment à la législation spéciale, avec la création de normes extérieures au Code civil. A ce propos, les cas de la Directive 93/13/CEE, en matière de clauses abusives dans les contrats des consommateurs, et ceux de la Directive 99/44/CEE, concernant certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation, représentent des exceptions importantes ; ces Directives ont été réalisées respectivement l'une avec l'introduction dans le Code civil d'un nouveau Chapitre XIV bis, répertorié Des contrats du consommateur, regroupant les articles de 1469-bis à 1469-sexies, dans Titre II, Des contrats en général, Livre IV, Des obligations ; l'autre, avec l'introduction dans la discipline du Code concernant achat et vente - en particulier, la vente de meubles dans les articles 1510 et suivants, Livre IV, Section II, Chapitre I, Titre III - d'un paragraphe 1. bis, répertorié De la vente de biens de consommation, regroupant les articles de 1519-bis à 1519-nonies.

En ce qui concerne le deuxième point de vue, le législateur italien s'est en général limité à reproduire à la lettre les dispositions communautaires, sans y apporter de modifications importantes, ni formelles ni substantielles (et dans les rares cas où il s'est éloigné du texte communautaire, les résultats n'ont pas été brillants).

Le recours à la législation spéciale et la simple imitation de la lettre des dispositions ont donné lieu à un ensemble de normes aux traits « alluviaux », à savoir décousu et incohérent par rapport à la législation précédente.

A partir de cette constatation, la technique législative utilisée - qu'on la considère comme l'expression d'un choix conscient en matière de politique du droit, ou comme le simple réflexe de la nécessité d'appliquer les directives le plus rapidement possible - a fait l'objet de considérations discordantes : en termes critiques, on a vu qu'un législateur aurait difficilement pu fournir un effort de coordination systématique et que, en l'absence d'inputs communautaires, il aurait probablement maintenu une attitude d'indifférence presque totale envers la matière ; en termes positifs, le fait d'avoir appliqué, en un premier temps, le nouveau droit des contrats des consommateurs à des cas concrets différents a non seulement représenté une attitude de « juste prudence » dans le but de le soumettre aux premières vérifications du droit et de la doctrine, mais a surtout servi à éviter une « précipitation dangereuse » qui aurait pu se révéler téméraire dans un horizon encore incertain.

La saison de l'exécution, caractérisée par un manque presque total de coordination et d'organisation, semble désormais finie, aussi parce que la tendance à une harmonisation du droit des contrats a pris pied sur la scène européenne. D'ailleurs, les prémisses d'un changement de technique législative sont bien visibles : un Texte Unique, « Le Code de la Consommation », a été rédigé dans le but de regrouper les dispositions en matière de tutelle des consommateurs qui, au stade actuel, sont éparpillées dans les différentes lois spéciales, et de les rendre plus cohérentes.

La partie III de l'ébauche du décret législatif, répertoriée « Circulation de biens et de services », qui regroupe les normes en matière de contrats des consommateurs, nous intéresse particulièrement. Nous ne pouvons, ici, en examiner les contenus spécifiques ; nous soulignons, cependant, que le Texte Unique représente, sans aucun doute, un premier changement de route important sous un profil de policy, mais en réalité se limite, en ce qui concerne la discipline des contrats, à coordonner les différentes normatives et à les rendre plus homogènes. Par exemple, il est prévu que le terme pour l'exercice du droit de résiliation ad nutum, reconnu au consommateur, est de 10 jours tant pour les hypothèses de contrats conclus en dehors des activités commerciales que pour les contrats à distance ; la discipline en vigueur prévoit, au contraire, 7 jours dans le premier cas et 10 jours dans le deuxième.

Dans une perspective de plus long terme, l'expérience du Code de Consommation pourrait être le but final du droit des contrats des consommateurs ; ou bien, comme le souhaite une partie de la doctrine, ce Code pourrait être une étape intermédiaire vers l'introduction de la matière dans le Code civil, sur l'exemple de l'Allemagne qui vient de réformer le droit des obligations contenu dans le Livre deuxième du B.G.B..

 

3.      L'art. 1469-bis, premier alinéa, qui réglemente le « contrat conclu entre le consommateur et le professionnel » - disposition qui se trouve au début du nouveau Chapitre XIV bis - définit les cadres objectif et subjectif d'application des nouvelles normes.

Sous le profil objectif, la discipline semble pouvoir être appliquée à toutes les typologies de contrats : cela est d'autant plus vrai que non seulement l'art. 1469-bis naît d'une intervention communautaire dite horizontale - telle est la typologie de la Directive 93/13/CEE - mais, surtout, que le fait d'avoir ajouté au terme « contrat » la phrase « ayant comme objet la cession de biens ou le louage de services » a ouvert une procédure d'infraction ex artt. 226 et 227 du Traité CEE contre l'État Italien et par conséquent le législateur national a abrogé l'incise considérée indûment restrictive du secteur réglementé par les nouvelles normes en excluant, par exemple, les contrats de garanties du crédit.

Quant au profil subjectif, pour appliquer les artt. 1469-bis et suivants, il faut que le contrat ait été conclu entre un professionnel et un consommateur. Le professionnel est défini par la loi : « la personne physique ou juridique, publique ou privée, qui se sert du contrat dans le domaine de son activité d'entreprise ou professionnelle », tandis que le consommateur est « la personne physique qui agit dans des buts extérieurs à l'activité d'entreprise ou professionnelle éventuelle ». L'importance de la qualité des contractants représente sans doute un premier indice de diversité du droit des contrats des consommateurs par rapport à la discipline générale du contrat dictée par le Code civil.

A ce propos, il est intéressant de souligner que, selon une partie de la doctrine, le status de consommateur, qui ressort de la nouvelle normative en application de la ratio fondamentale de tutelle du contractant faible, représente le principal élément d'innovation qui la distingue de la normative du Code. Si cela était vrai, on assisterait à une nouvelle bipartition entre contrats civils et contrats commerciaux, bipartition qui avait été supprimée par la codification de 1942 ; cependant, dans ce cas, la rupture de la discipline unitaire générale du contrat ne serait pas, comme dans le passé, favorable aux entrepreneurs, mais au contraire elle privilègerait la position du consommateur en tant que contractant faible.

Bien différente est cette partie de la doctrine qui, ayant posé l'exigence d'aider et d'encourager l'introduction et l'application du marché unique comme le but principal des interventions communautaires, reconnaît à la tutelle du consommateur le rôle de simple objectif instrumentaire. Dans cette optique, la limite plus générale d'application des nouvelles disciplines aux contrats conclus entre professionnel et consommateur, s'expliquerait non pas à la lumière de la nécessité de défendre le consommateur en tant que sujet faible, mais en raison de la nécessité d'éliminer les asymétries d'information des transactions unilatéralement commerciales. C'est seulement dans ce secteur spécifique du droit des contrats que les déséquilibres inévitables dans le patrimoine d'information des parties, qui pourraient miner l'efficacité du jeu de l'offre et de la demande du marché, justifient l'intervention de la Communauté Européenne, en cohérence avec le principe de subsidiarité ; au contraire, une intervention égale ne trouve pas de justification dans les transactions commerciales bilatérales.

La querelle sur la ratio des interventions communautaires en la matière ne se limite pas à la théorie, mais elle est destinée à conditionner les dymaniques d'interprétation et d'application des disciplines d'exécution.

Dans ce sens, revêt un grand intérêt la discussion sur l'application de la nouvelle normative aux contrats conclus par tous les autres sujets qui ne peuvent être considérés comme consommateurs aux termes de la lettre de l'art. 1469-bis (qu'ils soient des organismes collectifs sans but lucratif - fondations, comités ou associations, avec ou sans personnalité juridique - ou bien de petits entrepreneurs, des artisans, des exploitants agricoles, des entreprises familiales, des sociétés ayant une dimension économique modeste ).

Favorables à une interprétation extensive sont ceux qui posent la tutelle du marché comme le but réel de la législation communautaire : ils considèrent, en résumé, que la figure du consommateur prévue par les artt. 1469-bis et suivants inclut aussi le contractant qui adhère à des conditions de contrat prédisposées, et que les actions ayant un but professionnel ne sont pas celles que le sujet utilise dans le cadre de son activité professionnelle (à savoir les actions ayant un but objectivement professionnel), mais, d'un point de vue technique, les actions à travers lesquelles le sujet exerce sa profession et réalise ses intérêts professionnels. Toutes les autres actions qui, même si elles sont accomplies par le sujet en qualité de professionnel, ne constituent pas une application immédiate et directe de sa profession, celle-ci appartiennent à la catégorie des actions de consommation. De plus, d'après ce qui a été dit, la mention de personnes physiques contenue dans l'art. 1469-bis n'a pas valeur de forclusion, car il faut l'interpréter dans le sens plus général de partie contractuelle : cette lecture est cohérente avec l'interprétation des normes existantes du Code civil en matière de « contrats en général » (Titre II du Livre IV) qui, tout en considérant la personne physique, s'appliquent aussi bien, en parfaite harmonie avec le concept de subjectivité juridique, à des sujets de droit qui ne sont pas des personnes physiques.

A des conclusions semblables - bien qu'à travers un iter logique-juridique différent - aboutit une autre partie de la doctrine qui, elle aussi, se réfère à une interprétation de marché de la ratio de la nouvelle discipline. Il est admis d'appliquer par analogie les artt. 1469-bis et suivants aux contrats conclus entre professionnels chaque fois que l'on est en présence de clauses contractuelles standard prévues par une seule partie, indépendemment du rapport entre le contenu spécifique du contrat et l'activité professionnelle éventuelle de la personne qui le souscrit.

A partir de l'affirmation que la tutelle du consommateur en tant que sujet faible correspond à une exigence plus générale de « honnêteté dans les rapports contractuels dont le marché des entrepreneurs dans sa conception moderne est le théâtre », on identifie le trait d'union entre le but à niveau supranational et le but du législateur national dans l'emploi du principe de bonne foi objective en tant que critère d'évaluation de l'abus des clauses, ratifié par l'art. 1469-bis, premier alinéa.

La tutelle du consommateur naît d'une exigence plus générale « d'honnêteté dans les rapports contractuels sur un marché qui a évolué » : voilà le trait d'union entre le but du législateur national et la finalité à niveau supranational de l'emploi, ratifié par l'art. 1469-bis, premier alinéa, du principe de bonne foi objective comme critère d'évaluation de l'abus des clauses. L'évaluation selon la bonne foi objective (ou honnêteté) de l'accord contractuel (ex art. 1366 Code civil), aurait la fonction - en particulier dans les contrats de masse - d'empêcher qu'une seul partie ait le pouvoir de déterminer la discipline contractuelle. D'ailleurs, l'art. 1469-bis étant une norme non exceptionnelle mais simplement spéciale, il pourrait être appliqué suivant les règles de l'analogie même au delà de la lettre de la norme.

Le problème de l'existence de limites subjectives dans l'application de l'art. 1469-bis (par rapport aussi aux autres disciplines en matière de contrats des consommateurs) rencontre des solutions opposées même en jurisprudence.

Les juges du fond, qui ressentent plus encore l'incohérence de la possibilité donnée au législateur « de limiter le champ d'action entre consommateur (personne physique qui n'agit pas en tant qu'entrepreneur) et les autres catégories [...] étant donné que la tutelle des clauses vexatoires concerne aussi le marché des biens destinés à la production », prennent des décisions prudentes en faveur d'une application plus vaste, dans les termes ci-dessus mentionnés. Il a donc été décidé, à travers l'interprétation extensive de l'expression « agir dans le domaine de l'activité d'entreprise ou professionnelle », d'établir « si la conclusion du contrat est ou n'est pas un acte de la profession de celui qui achète le bien ou le service, comme elle l'est pour la partie adverse. L'administrateur d'une maison en copropriété qui conclut un contrat avec un professionnel, et le sujet qui signe un contrat avec un professionnel en vue d'une activité professionnelle future, rentrent dans la notion de consommateur, aux termes de l'art. 1469-bis, deuxième alinéa, Code civil.

La Cour de Cassation, au contraire, restreint l'application de la discipline des clauses abusives et des autres disciplines d'origine communautaire au profit du consommateur en tant que « personne physique qui, tout en étant un entrepreneur ou ayant une activité professionnelle, conclut un contrat pour satisfaire des exigences de la vie quotidienne étrangères à son activité », conformément à la lettre de l'art. 1469-bis, deuxième alinéa. Cette interprétation est d'ailleurs appuyée par la Cour de Justice des Communautés Européennes ainsi que par la Cour Constitutionnelle italienne. La première, en effet, a maintes fois appliqué le concept de consommateur ex Directive 93/13/CEE aux seules personnes physiques (cfr. décision du 22 novembre 2001-causes réunies C-541 et C542/99) ; tandis que la deuxième (la dernière sentence remonte au 22.11.2002, n. 469) a considéré comme raisonnable, par rapport aux buts d'harmonisation de l'Union Européenne, le choix du législateur national de limiter l'application de la discipline aux seules personnes physiques qui agissent pour des finalités étrangères à leur éventuelle activité professionnelle ou d'entreprise.

 

4.      Sur le plan des contenus, il est intéressant d'analyser la question de la définition des clauses contractuelles qui font l'objet de la nouvelle normative. Une première considération concerne le terme utilisé par le législateur italien pour en indiquer la caractéristique fondamentale : dès le titre de l'art. 1469-bis Code civil, en effet, l'expression utilisée est celle de « clauses vexatoires dans le contrat entre professionnel et consommateur », tandis que la Directive 93/13/CEE utilise l'expression « clauses abusives ». Le choix de deux adjectifs différents, que la parution du terme « abusivisme » dans le texte de certaines autres dispositions (cfr., par exemple, art. 1469-sexies) contredit, a été expliqué en raison du sens du terme « abus » qui se ramène à un comportement sanctionné au niveau pénal, ainsi qu'en raison de la familiarité avec laquelle l'opérateur juridique utilise l'adjectif « vexatoire ». Cependant, ces explications paraissent sans fondement puisque, comme l'enseigne la meilleure doctrine, l'une semble ignorer que la catégorie de l'abus du droit appartient depuis des années (même si c'est en termes de problème) au bagage de culture du civiliste ; l'autre se base sur l'assimilation - qui attend toujours d'être démontrée - entre la ratio des artt. 1469-bis et suivants et celle contenue dans la discipline des conditions générales de contrat ex art. 1341, deuxième alinéa, Code civil : à bien y regarder, en effet, les nouvelles normes imposent au juge le contrôle du contenu des clauses, tandis que la normative préexistante - et surtout les artt. 1341, deuxième alinéa, et 1342, deuxième alinéa, Code civil - se borne, comme nous l'avons déjà dit, à un contrôle exclusivement formel.

L'évaluation du juge qui établit si une clause est vexatoire (rectius abusive) ne considère ni la définition de l'objet du contrat, ni la rétribution des biens et des services, pourvu que « ces éléments soient identifiés de façon claire et compréhensible » (cfr. art. 1469-ter, deuxième alinéa) ; par contre, il examine le contenu normatif du contrat. Le législateur donne, ainsi, une importance fondamentale à la notion de clause vexatoire en ayant recours à la clause générale de l'art. 1469-bis, premier alinéa, à laquelle il joint une liste de clauses probablement vexatoires jusqu'à preuve du contraire (la liste dite grise de l'art. 1469-bis, troisième alinéa), ainsi qu'une liste de clauses dont le caractère vexatoire ne peut être exclu même si l'on démontre qu'elles ont fait l'objet d'une négociation individuelle (la liste dite noire de l'art. 1469-quinquies, deuxième alinéa).

A la lumière de l'art. 1469-bis, premier alinéa, on considère comme vexatoires « les clauses qui, malgré la bonne foi, déterminent pour le consommateur un déséquilibre important entre les droits et les obligations prévus par le contrat », en considération, comme le précise l'art. 1469-ter, premier alinéa, de « la nature du bien ou du service objet du contrat et par rapport aux circonstances existantes au moment de sa conclusion et aux autres clauses du contrat ou d'un autre contrat auquel il est relié ou dont il dépend ».

Du moment qu'il s'agit d'une clause générale typique, dont le système juridique ne détermine donc pas a priori le contenu, le juge doit établir le sens et le contenu de la bonne foi objective - selon une orientation qui peut sans doute être partagée, même si la doctrine et la jurisprudence ne l'acceptent pas à l'unanimité - à travers une estimation a posteriori du cas concret, en conciliant les intérêts des parties aussi à la lumière du comportement qu'elles ont eu au moment de la définition du rapport, de façon à garantir une application moins rigide et formelle de la norme juridique, qui est, elle, générale et abstraite.

On peut donc comprendre l'importance de la discussion, actuellement en cours en Italie, sur le problème de l'interprétation de l'expression « malgré la bonne foi », contenue dans l'art. 1469-bis Code civil : le sens littéral de cette incise semblerait mettre en jeu la notion de bonne foi dans le sens subjectif du terme, unanimement accepté, d' ignorance de léser le droit d'autrui (cfr. art. 1147 Code civil); en réalité, il doit être considéré - selon l'opinion de la majorité - comme le résultat d'une mauvaise traduction en italien des expressions "en dépit de l'exigence de bonne foi" et "contrary to requirement of the good faith" contenues dans les versions en langue française et anglaise de la Directive 93/13/CEE.

Si - comme il semble - il en est bien ainsi, il faut conclure que la bonne foi utilisée pour décider si les clauses des contrats souscrits entre le consommateur et le professionnel sont vexatoires, ne peut être interprétée que dans le sens objectif du terme ; cette affirmation semble être cohérente avec la nécessité - déclarée de façon claire par le législateur communautaire - d'assurer à l'évaluation selon la bonne foi (ou honnêteté) de la négociation, la fonction de limite au pouvoir d'une seule partie d'imposer à l'autre, surtout dans les contrats de masse, son pouvoir contractuel.

L'existence reconnue d'un rapport de genus a species entre les normes générales du Code civil qui font appel à la bonne foi objective, en particulier l'art. 1366 du Code civil, et les normes qui règlent les contrats des consommateurs, pourrait donc permettre d'évaluer aussi bien ex fide bona des clauses abusives typiques, que le caractère abusif de clauses atypiques, à savoir non prévues dans la liste des clauses considérées comme vexatoires. En confiant la tutelle des sujets faibles aux normes générales, les clauses que la loi considère par présomption légale comme abusives pourraient être évaluées avec attention par le juge appelé à les interpréter selon bonne foi indépendamment de la couleur de la liste qui devrait hypothétiquement les contenir : et cela avec des résultats sûrement plus satisfaisants sous un profil de justice substantielle.

Ramené sous le signe de la bonne foi objective dans sa dimension d'évaluation-correction ci-dessus mentionnée, le jugement sur le contenu concret du contrat, ratifié par les nouvelles normes, représenterait, à un niveau systématique, plus qu'une révolution, une véritable évolution du système : et cela aussi sur la base de la considération que le principe de bonne foi est en mesure de rendre inefficaces les clauses contractuelles et représenterait donc le dépassement de la tradition consolidée qui veut que la violation de la bonne foi contractuelle peut uniquement engendrer une responsabilité de dédommagement, sans aucune répercution sur la validité de l'acte juridique.

Il ne faut pas oublier qu'aux termes de l'art. 1469-ter, deuxième alinéa, les clauses qui reproduisent les lois (exception faite pour les règlements) ou qui reproduisent ou appliquent des principes contenus dans des conventions internationales dont tous les Etats membres de l'Union européenne ou l'Union européenne elle-même sont parties contractantes, ne sont pas vexatoires. De la même manière (troisième alinéa), les clauses et les élements de clause qui ont été l'objet d'une négociation individuelle ne sont pas vexatoires ; la preuve de la négociation individuelle l'emporte sur le caractère vexatoire des clauses contenues dans la « liste grise » : preuve qui, dans le cas d'un contrat conclu à travers la signature d'un formulaire, est du ressort du professionnel prédisposant et ne peut se limiter à l'acceptation écrite de la clause.

Cependant, il reste le problème de la coïncidence entre le contrôle formel, ex artt. 1341, deuxième alinéa, et 1342, deuxième alinéa, Code civil, et le contrôle substantiel, ex artt. 1469-bis et suivants Code civil. La doctrine soutient que les deux sytèmes de normes peuvent être appliqués en même temps, de sorte que la clause qui n'a pas été expressément approuvée par écrit, aux termes de l'art. 1341, pourrait être déclarée inefficace indépendamment et avant même l'analyse de son contenu ex artt. 1469-bis et suivants. A l'opposé, on a nié la possibilité de déclarer inefficace une clause sortie indemne du contrôle uniquement parce qu'elle n'avait pas été approuvée par écrit, ex art. 1341.

Enfin, l'art. 1469-quater, premier alinéa, énonce le principe qui veut que les clauses soient toujours rédigées de façon claire et compréhensible : il s'agit d'une règle qui caractérise le droit des consommateurs dans son ensemble, mais qui se révèle fondamentale dans le cas de contrats où toutes les clauses ou certaines d'entre elles ont été proposées au consommateur par écrit. A l'opposé, le contenu économique du règlement contractuel pourra, lui aussi, être considéré comme abusif.

Cette même norme affirme, au deuxième alinéa, le principe dit de l'interpretatio contra proferentem, déjà ratifié par l'art. 1370 du Code civil, et prévoit que « en cas de doute sur le sens d'une clause, c'est l'interprétation la plus favorable au consommateur qui l'emporte sur les autres ». Contrairement à la règle dictée dans la partie générale, la nouvelle disposition devrait avoir la priorité par rapport aux autres critères d'interprétation objective du contrat, et même dans le cas d'un contrat préparé par le professionnel pour une seule négociation.

 

5.      L'art. 1469-quinquies, premier alinéa, prévoit l'inefficacité des clauses vexatoires mais, en même temps, il décide que, pour le reste, le contrat conserve son efficacité et que l'inefficacité, que le juge peut relever ex officio, est uniquement au profit du consommateur.

Le législateur, en se référant textuellement à l'inefficacité, semble avoir évité de recourir aux catégories de l'invalidité absolue, à savoir de la nullité, ou de l'invalidité relative, à savoir de la possibilité d'annullation (même si l'inefficacité des clauses vexatoires est déjà prévue par l'art. 1341 du Code civil pour le cas où elles n'ont pas été approuvées par écrit).

La question est très importante, car elle soulève le problème du rapport avec les dispositions qui règlent ces catégories : certains soutiennent l'existence d'un vide normatif quant au régime de l'action qui porte au jugement d'inefficacité, et admettent que l'on ait recours à une application analogique des normes dictées par le Code civil pour discipliner l'action d'annullation du contrat (artt. 1441 et suivants) ; certains, au contraire, pensent que l'inefficacité ex art. 1469-quinquies n'est rien d'autre qu'une hypothèse de nullité dûe à la violation de normes impératives, et appliquent directement le régime de l'action de nullité du contrat ex artt. 1418 et suivants, à moins qu'il ne soit expressement et/ou différemment prévu.

Quant à la thèse de la nullité, il faut cependant souligner qu'il s'agit d'une forme de nullité spéciale par rapport à l'institution réglementée par le Code civil : et cela par rapport à la légitimation de l'action ainsi que par rapport à la discipline de la nullité partielle.

En ce qui concerne le premier aspect, contrairement à l'art. 1421 du Code civil, qui prévoit que la nullité peut être appliquée dans l'intérêt de quiconque (donc, une légitimation à l'action absolue), l'art. 1469-quinquies, troisième alinéa, limite la légitimation active au consommateur dans le but évident de le favoriser : de cette façon, il engendre une hypothèse de nullité relative.

En ce qui concerne le deuxième aspect, tandis que l'art. 1419, premier alinéa, du Code civil, dispose que la nullité partielle d'un contrat ou d'une seule clause détermine la nullité du contrat tout entier seulement s'il résulte que les contractants ne l'auraient pas souscrit en l'absence de la partie accusée de nullité ; l'art. 1469-quinquies, premier alinéa, prévoit la sauvegarde nécessaire du contenu contractuel privé de la clause d'invalidité (nullité partielle dite nécessaire).

Tout autre approfondissement des rapports entre inefficacité (ou nullité spéciale), prévue par la nouvelle discipline, et nullité aux termes de la normative pré-existante dictée par le code civil, est impossible dans les limites de ce compte rendu : une analyse ponctuelle devrait examiner, entre autres, le problème de l'éventuelle coïncidence entre les deux remèdes, qui pourrait se réaliser concrètement en présence d'une clause considérée comme abusive à la lumière des artt. 1469-bis et suivants, mais nulle en raison d'autres prévisions de loi.

Parmi les nombreuses implications de nature systématique, il nous semble important de traiter la réaction provoquée par les nouveaux cas de nullité spéciale d'origine européenne (dits aussi « de protection ») sur le sytème de l'invalidité réglementé par le Code civil italien. A cet égard, il a été souligné que la nullité contractuelle, conçue par le législateur du Code comme un instrument général et abstrait, et traduit selon des schémas conceptuels rigides, revêt, dans le droit européen des contrats, le sens d'instrument « conformé », à savoir de plus en plus dépendant - non seulement quant à la structure et aux fonctions, mais aussi quant à son fondement substantiel - de l'opération concrète évaluée sur la base d'intérêts spécifiques, de la condition des parties en jeu (consommateur, professionnel) et de la nature des biens et des services qui en font l'objet. Dans la législation communautaire, la nullité servirait donc à garantir un règlement contractuel à son tour « conformé » à travers la prévision d'un contenu minimum nécessaire, et aurait la fonction de tutelle du contractant faible grâce à son pouvoir d'invalider les contrats non conformes ou d'en imposer la substitution.

En d'autres termes, la nullité, conçue par le législateur du Code civil comme une sanction qui tutelle un intérêt public abstrait, souvent en contraste avec l'intérêt des contractants, aurait, dans la normative de dérivation européenne, une finalité de protection : il s'agit là d'un autre aspect important de la profonde évolution des catégories contractuelles traditionnelles auxquelles l'on s'est référé plus haut.

 

6.      Dans l'élaboration de la discipline de la vente des biens de consommation, conformément à la Directive 99/44CEE, le législateur italien a décidé de l'insérer dans le Code civil (artt. de 1519-bis à 1519-nonies, paragraphe 1-bis, Section II, Chapitre I, Titre III, Livre IV, dans le domaine des dispositions générales sur la vente de biens meubles) dans le but déclaré (voir la Relation gouvernementale qui accompagne le décret législatif 2 février 2002, n. 24) de « permettre la perception immédiate de la discipline biphasique qui se profile, à savoir la nette séparation entre la normative sur la vente en général, supportée par les artt. 1490 et suivants du Code civil, et la discipline sur la vente des biens de consommation, supportée par des dispositions profondément différentes ».

Au delà de la valeur purement indicative de cette affirmation, qui ne justifie pas le manque de coordination entre les règles déjà existantes sur la vente et les nouvelles, le caractère de ius singulare de ces dernières ressort si l'on réfléchit sur les trois principaux aspects qui les caractérisent.

Tout d'abord, on distingue entre bien de consommation et bien meuble (traditionnellement considéré à la lumière de la définition donnée par l'art. 812 Code civil) sur la base d'un critère subjectif qui n'est pas lié à la res en elle même mais à la qualité des contractants. Comme on peut le déduire de la coordination des définitions données par l'art. 1519-bis, le bien meuble prend le nom de bien de consommation - d'où l'application des normes en question - s'il fait l'objet d'un rapport juridique entre une personne physique ou juridique, publique ou privée, qui agit à l'intérieur d'une activité d'entreprise ou d'une activité professionnelle, et une personne physique qui agit dans un but étranger à l'activité d'entreprise ou à l'activité professionnelle. Il en dérive que trois régimes normatifs différents pourront être appliqués à la vente de biens meubles en raison du fait qu'une des parties de la négociation est un consommateur : en particulier, on applique la nouvelle normative aux contrats conclus entre vendeur et consommateur ; on applique la discipline déjà dictée par le Code civil pour la vente de biens meubles (artt. 1510-1519) dans le cas où aucune partie ne peut être considérée consommateur ; on applique la Convention de Vienne sur la vente internationale de biens meubles (signée le 11 avril 1980, ratifiée par l'Italie avec la loi du 11 décembre 1985, n. 765 et entrée en vigueur le 1er janvier 1988) lorsque les parties ont leur siège dans des Etats différents.

Une autre nouveauté absolue est l'introduction de l'obligation spécifique pour le vendeur de livrer des « biens conformes au contrat de vente » (art. 1519-ter Code civil) ; nous assistons ainsi à un changement radical de perspective : du système des garanties sur les vices de la chose vendue, qui dans le Code civil se base sur l'évaluation des caractéristiques de la res au moment de la conclusion du contrat (cfr. artt. 1490-1497), on passe à un système qui se base sur l'évaluation du comportement des parties se référant à la négociation sur le marché entre professionnel et consommateur. Voilà, en quelques mots, la ratio de la nouvelle normative dont les traits essentiels sont les suivants:

a)        la conformité au contrat est établie à travers l'identification d'une série de circonstances qui recouvrent la période allant de la phase de négociation à la livraison du bien à l'acquéreur (cfr. art. 1519-quater du Code civil); avec la conséquence que « sauf preuve contraire, on présume que les défauts de conformité qui se manifestent dans les six mois qui suivent la livraison du bien existaient déjà à ce moment- là » (art. 1519-sexies du Code civil);

b)        à de telles circonstances appartiennent les situations permettant d'identifier des caractéristiques qui se réfèrent objectivement au bien de consommation, ainsi que la description du bien faite par le vendeur au consommateur et vice-versa ;

c)        le rôle du message publicitaire qui a poussé le consommateur à l'achat.

Sur cette base, la doctrine italienne pose - avec des résultats contrastants - la question de savoir si le défaut de conformité comprend ou non la notion (et donc les statistiques) des vices de la chose vendue, ex artt. 1490 du Code civil, du manque de qualité, ex art. 1497, de la livraison de aliud pro alio, c'est-à-dire d'un bien qui appartient à un genre différent du genre convenu - hypothèse élaborée par une jurisprudence consolidée et récemment confirmée (cfr. Cassation civile, 17/9/2004, n. 18757). Cette question est vraisemblablement destinée à trouver une réponse dans ce sens que si, d'une part, le caractère spécial des nouvelles normes n'exclut pas que les vices soient reconnus à l'intérieur d'une évaluation de conformité, d'autre part, il empêche au juge d'attribuer aux institutions juridiques déjà existantes des hypothèses faites sur la base de critères essentiellement différents.

Le troisième aspect de la discipline examinée concerne la tutelle du consommateur acheteur en cas de non conformité du bien délivré. Nous pouvons imaginer qu'en ce cas le problème concernant la possibilité de cumuler ou d'alterner les remèdes avec ceux déjà prévus par les normes sur les vices de la chose vendue (réduction du prix ou résolution du contrat, sauf, en tout cas, le dédommagement), devra être résolu de façon cohérente avec les conclusions auxquelles nous venons d'arriver.

L'art. 1519-quater ne se limite pas à rédiger une liste de remèdes (rétablissement, sans frais, de la conformité du bien à travers réparation ou remplacement ; réduction adéquate du prix ; résolution du contrat), mais établit une hiérarchie précise et fixe des conditions nécessaires pour passer d'un remède à l'autre selon l'ordre prévu. Cette collocation essaye, autant que possible, de préserver le contrat et de permettre en même temps à l'acquéreur d'obtenir le résultat raisonnablement espéré plutôt que de vanifier l'opération contractuelle, comme le confirme l'article même, alinéa neuf, avec la prévision d'une négociation entre les parties ayant comme objet « tout autre remède possible » proposé par le vendeur pourvu que le consommateur l'accepte, et avec la négation du droit de résiliation de l'aquéreur en cas de « défaut léger dont la réparation ou la substitution n'a pas été possible ou est excessivement chère », selon une logique d'équilibre des intérêts en jeu (dernier alinéa).

L'art. 1519-nonies prévoit que les dispositions sur la vente des biens de consommation « n'excluent ni ne limitent les droits accordés au consommateur par d'autres normes du système juridique » : d'où la théorie qui veut que l'acquéreur puisse combiner, sans les superposer, les remèdes de partie générale et ceux de partie spéciale sur la vente, à savoir entreprendre à son choix l'un ou l'autre des parcours prévus.

A noter, à ce sujet, que l'art. 8 de la Directive 99/44CEE préservait « l'exercice d'autres droits dont le consommateur peut se servir en vertu des normes nationales sur la responsabilité contractuelle ou extra-contractuelle » ; la confusion entre « autres droits » et « autres normes », ainsi que les considérations faites ci-dessus sur le caractère spécial de la normative à l'objet, permettent de partager l'opinion de ceux qui affirment que le but de l'art. 1519-nonies - voulu par le législateur supranational - est de « garantir au consommateur l'emploi de remèdes en mesure de satisfaire d'autres prétentions nées de l'achat de biens de consommation, à l'intérieur ou à l'extérieur du contrat, et surtout différentes par rapport à celles qui concernent la non-conformité du bien au contrat ».

 

7.      A la tutelle du consommateur, garantie par l'inefficacité des clauses vexatoires prononcée après la conclusion du contrat, le législateur national adjoint - d'abord au moment de l'application de l'art. 7 de la Directive 93/13/CEE, ensuite avec la loi du 30 juillet 1998, n. 281, et modifications successives en application de la Directive 98/27/CEE - un modèle de tutelle judiciaire collective ayant nature inhibitoire. L'art.1469-sexies, premier alinéa, prévoit, en effet, que les associations qui représentent les consommateurs et les professionnels, et les Chambres de Commerce « peuvent citer en justice le professionnel ou l'association de professionnels qui utilisent ou qui recommandent des conditions générales de contrat et demander au juge compétent d'inhiber l'application des conditions qui ont été reconnues comme abusives aux termes de ce Chapitre».

Il faut souligner que, aux termes de l'art. 1469-quater, troisième alinéa, dans le jugement inhibitoire on n'applique pas le critère de l'interpretatio contra proferentem, qui, comme nous l'avons déjà dit, représente la règle dans les jugements ordinaires : et cela en fonction de la nécessité d'évaluer les clauses du contrat dans la perspective d'un intérêt qui va au delà de l'intérêt des parties du contrat.

A l'action « en cession », prévue dans le premier alinéa, suit l'action inhibitoire préventive prévue dans l'alinéa suivant, qui subordonne son acceptation à l'existence de « raisons justes d'urgence, aux termes des articles 669-bis et suivants du code de procédure civile ».

Les raisons qui représentent le fondement de la tutelle préventive sont facilement prévisibles : l'action individuelle accordée au consommateur pourrait ne pas se révéler toujours un remède effectif, et cela pour deux raisons : la première parce que le consommateur, conscient de l'infériorité de ses moyens et entravé par la difficulté de faire face aux frais de justice, préfèrera en général éviter d'entreprendre une initiative judiciaire ; la seconde parce que la disposition du jugement individuel se révèlerait efficace seulement vis-à-vis des parties du procès, et non pas vis-à-vis des autres consommateurs qui souscrivent des contrats semblables, ou vis-à-vis des autres professionnels qui utilisent ou recommandent d'utiliser les mêmes conditions générales de contrat.

Dans sa première formulation, l'art. 1469-sexies ne contenait pas la « recommandation » explicite à l'utilisation de conditions générales de contrat abusives, même si la principale tendance de la doctrine et de la jurisprudence, qui s'était formée à partir de l'interprétation de la référence à des « professionnels ou associations de professionnels qui utilisent des conditions générales de contrat abusives », attribuait au verbe utiliser un sens large ; autrement dit, on considérait aussi les hypothèses de conditions générales de contrat abusives qui n'étaient toujours pas entrées concrètement dans le domaine des échanges juridiques à travers l'insertion dans un contrat spécifique souscrit par le consommateur, ou dont on avait simplement recommandé l'utilisation. C'est seulement à la suite de la condamnation, de la part de la Cour de Justice des Communautés Européennes (section V, 24 janvier 2002, C 372/99) pour non-exécution des obligations ratifiées par l'art. 7, n. 3, de la Directive 93/13CEE, que l'on a intégré la lettre de l'art. 1469-sexies du Code civil prévoyant le recours au remède inhibitoire même vis-à-vis de professionnels ou d'associations de professionnels qui se limitent à recommander l'emploi de conditions générales de contrat abusives.

Il est intéressant de remarquer que, en un premier temps, le législateur national ne s'était nullement préoccupé de préciser les critères que le juge aurait pu ou dû adopter pour évaluer l'importance des associations des consommateurs afin d'en reconnaître la légitimation active. La loi suivante 30 juillet 1998, n. 281, qui contient des normes sur la « Discipline des droits des consommateurs et des usagers », fixe, à travers (art. 5) la rédaction d'une liste des associations des consommateurs et des usagers « représentatives à niveau national », les critères nécessaires pour pouvoir être inscrits, et résout ainsi (en tout cas du point de vue formel) le problème de la représentativité. Cependant, cette loi soulève en même temps une autre question, car elle précise les actions inhibitoires que ces associations ont le droit de proposer (art. 3) sans établir une liaison avec le contenu de l'art. 1469-sexies du Code civil ; on se demande donc si cette légitimation s'applique à l'action inhibitoire prévue par cette norme (dans ce sens, l'art. 140, douzième alinéa, de l'ébauche de décret législatif qui contient le Code de Consommation cité, est destiné à réaliser une plus grande harmonisation et à combler le vide que nous venons de signaler).

L'action inhibitoire, prévue par la loi en question, peut être proposée par les sujets légitimés en présence d'une violation des droits fondamentaux des consommateurs et des usagers reconnus tels par l'art. 1, deuxième alinéa, à savoir les droits : à la tutelle de la santé ; à la sécurité et à la qualité des produits et des services ; à une information adéquate et à une publicité correcte ; à l'éducation à la consommation ; à l'honnêteté, transparence et équité dans les rapports contractuels concernant biens et services ; à la promotion et au développement de l'associationnisme libre, volontaire et démocratique entre consommateurs et usagers ; à la distribution de services publics selon un standard de qualité et d'efficacité. Elle peut aussi être proposée dans les hypothèses de violation des intérêts collectifs prévus par les Directives en matière de tutelle des consommateurs indiquées dans l'Annexe à la loi qui inclut, entre autres, la Directive 93/13/CEE.

En cas de non-exécution de l'ordre inhibitoire et des autres obligations établies par la disposition - telles que sa publication dans un ou plusieurs journaux, dont un au moins à diffusion nationale - ou sur la base de l'éventuel procès-verbal de conciliation, le juge, même sur demande de l'association actrice, disposera le paiement d'une somme allant de 516 Euros à 1.032 Euros pour chaque jour de retard selon la gravité du fait (art. 3, alinéa 5-bis, loi 281/98).

Les nouvelles normes sur l'action inhibitoire prennent une importance systématique, en attribuant à cette forme de tutelle un rôle fondamental dans le domaine du droit des consommateurs, avec des répercussions indéniables sur le sens et la fonction de cette institution juridique dans le système des procès.

Si d'un côté l'on reconnaît la possibilité d'activer la tutelle inhibitoire seulement dans les cas expressément prévus par la loi, de l'autre l'on rencontre la tendance à élargir le rôle de la tutelle inhibitoire pour en faire un remède général, sur la base des changements qui ont eu lieu à l'intérieur de la législation.

En conclusion, même dans ce secteur de la tutelle civile des droits, la normative communautaire exerce un rôle fondamental dans l'évolution en cours du système juridique national.

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